Ah là, je ne crois pas.

Dessiner, c'est pas mon truc.

Alors raconte-moi un héros.

Ah ben ça, je peux essayer...

Alors voilà. Mon héros est un champion, probablement le meilleur dans sa discipline. Vous allez voir. Il est tellement fort, tellement spécial, qu'il n'a généralement pas d'adversaire à sa hauteur. Et il n'y a pas de pire malédiction pour le héros que de ne pas avoir de méchant à sa mesure, car il va se heurter à quelque chose de bien plus terrible, plus résistant, plus pervers : il va se heurter à la Force des Choses. Car mon héros est un insatisfait. La façon dont le monde tourne lui déplaît. Il va entrer en résistance...
Le fou !

 

Les Héros ne sont plus ce qu'ils étaient...

 

Des clochards du paradis guerrier d'Odin en passant par l'attentat manqué contre Hitler en juillet 1944, jusqu'aux espaces parallèles d'Aleph-Deux, Colin Marchika poursuit avec Les Poubelles du Walhalla son exploration de la thématique du Révolté. Colin Marchika est né en 1968 et vit aujourd'hui à Paris. Son précédent roman, La Reine de Vendôme, a ravi les amateurs de fantasy intelligente et décalée.

     Colin Marchika a un esprit aiguisé ; nous le savions déjà à la lecture de La Reine de Vendôme, roman de fantasy original et surprenant. Cette même vivacité d'esprit se retrouve dans ce recueil de nouvelles, qui fait la part belle à la SF, mais tâte également du côté de la fantasy, du fantastique et même de la littérature générale.

     Marchika traite en filigrane des thématiques de l'héroïsme, et de la révolte contre une fatalité dévorante, mettant d'ailleurs les deux en parallèle à de nombreuses reprises. Les héros de Marchika ne sont parfois pas ceux qu'on attend ; ou bien leurs motivations sont obscures, et souvent la valeur de leurs actes n'est connue que d'eux-mêmes ou d'un petit nombre (mais n'est-ce pas justement là que réside leur héroïsme ?). C'est le cas par exemple de John DuVal dans VENUS 1, étudiant en psychologie appelé à s'entretenir régulièrement avec un cosmonaute perdu dans l'espace profond, afin de l'aider à maintenir son équilibre psychique et à rentrer sur Terre. DuVal n'est pas une célébrité, il a parfois mauvais caractère, mais il a un bon fond ; c'est un homme ordinaire jeté dans des circonstances extraordinaires, et qui s'efforce d'agir au mieux selon sa conscience — ce qui ne l'empêche pas de commettre des erreurs parfois tragiques. C'est également le cas de Cincinnatus, matador qui exécute des êtres humains au cours d'une corrida grotesque poussée à son paroxysme, et qui cherche à comprendre la raison de ces Jeux atroces, dont il est devenu un acteur de premier plan (La Saga du Taureau). On retrouve d'ailleurs assez souvent la thématique du jeu en second plan, comme dans Les Treize Honorables, métaphore basée sur le mah-jong, ou dans Comme Pégase renaissant de ses cendres, nouvelle centrée sur la chasse.

     On peut regretter plusieurs lourdeurs d'expression, et un rythme de narration pas toujours bien maîtrisé, notamment pour les fins de récits, qui sont parfois un peu rapides et laissent un goût d'inachevé. Néanmoins, par le choix de ses univers, par le traitement de ses thèmes, Marchika sait bien souvent faire preuve d'originalité et réserve de nombreuses surprises ; et quand le choix de ses intrigues est plus classique, il reste un conteur efficace, parfois drôle, souvent tragique.

     Les Poubelles du Walhalla est donc une lecture variée et agréable, qui plaira aux amateurs de textes dynamiques. Marchika est un auteur à suivre.