HACHETTE HEROES
(Vanves, France), coll. Le Rayon Imaginaire Date de parution : 2 octobre 2024 Dépôt légal : octobre 2024 Première édition Roman, 464 pages, catégorie / prix : 25 € ISBN : 978-2-01-721454-0 Format : 15,0 x 23,0 cm✅ Genre : Fantastique
Couverture à rabats sous jaquette. Création graphique : Pauline Ortlieb (Micaela Alcaino illustre la jaquette).
Quatrième de couverture
La mâchoire en fer sculpté d’un portail, la langue rouge d’une allée, l’ombre noire de sycomores enchevêtrés : dans les rêves d’Opale, la mystérieuse Starling House exerce une fascination lancinante. Comme si c’était pour elle que la demeure rayonnait de sa lumière ambrée, frémissante dans la nuit brumeuse.
C’est pourtant un domaine interdit dont on ne sait rien, et qui tient chaque habitant de la petite ville d’Eden à distance. Mais Opale, sans mère ni vrai foyer, sans avenir ni mémoire, n’est plus à une transgression près, surtout s’il suffit de quelques gouttes de son sang pour que le portail s’ouvre. Surtout s’il suffit d’écouter des histoires pour que des secrets inavouables se déploient, aussi ténébreux que ses cauchemars à elle.
Entrez si vous l’osez.
Alix E. Harrow (Les Dix Mille Portes de January, Le Temps des sorcières) nous régale d’un nouveau tour de force. Sous le couvert d’une réécriture gothique de La Belle et la Bête, elle tresse le récit d’une âpre histoire familiale et sociale, qui est aussi un plaidoyer pour la vérité et la magie créative de la littérature. Magistral.
Critiques
Opale vit avec son petit frère dans un motel d’une ville du fin fond du Kentucky, Eden, ville tenue par une famille riche dont la fortune vient notamment d’une exploitation minière maintenant fermée. Dans cette ville se trouve la mystérieuse maison Starling, plus ou moins abandonnée, dont l’occupant, Arthur Starling, un jeune homme aussi repoussant physiquement, couvert de tatouages et de cicatrices, que peu aimable, serait le descendant de la première Starling, Eleanor, autrice d’un effrayant livre pour enfant à l’aura inquiétante. Poussée par la curiosité, Opale tente de pénétrer Starling House ; après l'avoir repoussée brutalement plusieurs fois, Arthur change d’avis et l’engage pour nettoyer la maison, plus proche de la ruine que d’un lieu habitable.
Présenté comme une réécriture de la Belle et la Bête, Starling House est bien plus que cela. Mêlant le thème classique de la maison hantée (on pensera bien évidemment au roman de Shirley Jackson) à celui du gardien éternel face au Mal, le récit ajoute des préoccupations sociales et politiques. Si la maison de Jackson avait été construite par un riche industriel, c’est ici la femme spoliée par trois frères riches qui a érigé cette maison vengeresse pleine de colère féminine, colère aussi portée (bien qu’enfouie) par Opale suite à la mort de sa mère. Ce roman est également la description d’une petite ville pauvre à la limite du Midwest, ville en déclin dont l’industrie a périclité, ville aux mains du notable local descendant de l’un des trois frères.
L’horreur de Starling House vient autant de son intrigue gothique, cette maison hantée du XIXe siècle et sa mystérieuse lignée de gardiens, que de son entourage actuel, cette Amérique de la campagne, pauvre et en déclin, sa violence sociale et sa corruption. Alix Harrow utilise la fiction pour parler de la douleur, des traumatismes sociaux et familiaux et de ce que la société fait subir aux femmes qui sortent du moule, aussi bien dans le passé qu’aujourd’hui. C’est ainsi que l’histoire d’Eleanor nous est racontée plusieurs fois, d’abord écrite par les vainqueurs, ceux qui dirigent la ville, puis avec diverses variations suivant la source. Pour autant, l’autrice n’oublie pas qu’elle est dans un récit d’horreur : progression de l’intrigue, perception grandissante de la menace, évolution des personnages, confrontation au Mal, tout cela est présent et réussi.
Roman gothique moderne, Starling House, avec un traitement et un ton différent de la fantasy du Temps des Sorcières, le précédent roman d’Alix Harrow, creuse le même sillon avec le même talent.