Site clair (Changer
 
    Fiche livre     Connexion adhérent
Butcher Bird

Richard KADREY

Titre original : Butcher Bird, 2007
Première parution : Night Shade Books, 2007   ISFDB
Traduction de Jean-Pierre PUGI
Illustration de LASTH

DENOËL (Paris, France), coll. Lunes d'Encre précédent dans la collection suivant dans la collection
Dépôt légal : avril 2012, Achevé d'imprimer : 30 mars 2012
Première édition
Roman, 384 pages, catégorie / prix : 23,00 €
ISBN : 978-2-207-10893-2
Format : 14,0 x 20,5 cm
Genre : Fantastique


Quatrième de couverture
     Tout juste largué par sa copine, Spyder se rend dans le seul bar tibétain de San Francisco pour s'y saouler. Alors qu'il se demande quelle est la pire façon de mourir, il rencontre une aveugle fort désirable, Pie-grièche. En sortant du bar, le jeune tatoueur féru d'occultisme est agressé par un démon. Au moment où il va recevoir le coup de grâce, Pie-grièche intervient et décapite le monstre avec sa canne-épée. Le lendemain, perclus de douleurs, Spyder découvre une Californie hantée par des démons aztèques, tibétains, des créatures fabuleuses qu'il est le seul à voir. Une personne peut lui expliquer ce qui lui arrive : Pie-grièche. Mais on ne se mêle pas impunément des affaires de la belle tueuse de démons.
 
     Butcher Bird, mélange d'action débridée, de dialogues tarantiniens et de démonologie érudite, véritable concentré de fantasy urbaine, marque le grande retour en France de Richard Kadrey.
 
     Auteur de deux romans de science-fiction (Kamikaze l'amour, Métrophage), Richard Kadrey a complètement changé de veine avec ce Butcher Bird et, dernièrement, la série Sandman Slim qui lui a valu un succès considérable outre-Atlantique.
Critiques
 
     Cela fait si longtemps qu'on n'a plus rien lu de Richard Kadrey qu'on en aurait presque oublié son existence. Non que ses précédents livres parus en France dans la collection « Présence du Futur », Métrophage (1988) et Kamikaze l'amour (1997), soient mauvais, mais ils n'ont pas vraiment marqué le genre non plus. Retour de l'auteur donc, quinze ans plus tard, avec cette fois un roman de fantasy urbaine, appellation à prendre dans son ac-ception la plus contemporaine, celle qu'on rencontre plus volontiers chez Bragelonne ou Milady que chez Denoël.
     L'histoire est celle de Spyder Lee, garçon pas particulièrement fréquentable, qui tient un salon de tatouage en compagnie de son amie d'enfance, Loulou Garou, dans l'un des quartiers les plus sinistres de San Francisco. Sa vie bascule un soir de cuite, lorsqu'occupé à vider une vessie malmenée par une consommation immodérée de bière dans l'arrière-cour d'un bar miteux, il est attaqué par un machin grumeleux ressemblant foutrement à un démon. Pas encore dessoulé, Spyder est sauvé in extremis par l'intervention d'une jeune femme aveugle maniant le sabre comme seule une héroïne de films de la Shaw Brothers en serait capable. L'épisode aurait pu être classé sans suites dans la catégorie délirium tremens si, dès le lendemain, Spyder n'avait découvert d'un autre œil l'univers qui l'entoure. Il constate alors que San Francisco est peuplée de créatures monstrueuses aussi diverses que variées, que certains passants se baladent avec un parasite sur le dos, et que même son amie Loulou n'est pas tout à fait celle qu'il a toujours connue. C'est le début d'une aventure qui va le conduire jusqu'en Enfer, en compagnie de Pie-grièche, l'aveugle qui lui est venue en aide.
     Dans un genre parfaitement balisé, écrit presque exclusivement par et pour des femmes, Richard Kadrey débarque avec la délicatesse d'un bûcheron aviné en pleine soirée sex-toys. Le cheveu défait et l'hygiène corporelle approximative, il s'amuse ici à insuffler un petit vent d'esprit punk dans l'univers bien rangé et faussement libéré de la fantasy urbaine actuelle. Et il y parvient presque. Grâce à un rythme frénétique, des personnages attachants et des dialogues énergiques et assez souvent drôles, Butcher Bird se lit d'une traite et fait sourire plus d'une fois. Mais si l'on en gratte la surface, on découvre que le roman repose sur pas grand-chose de solide. Et à force de traits d'esprit et de « répliques qui tuent », sa superficialité n'en est que plus apparente au fil des pages. Plus gênant encore, l'écriture de Kadrey s'avère incapable de donner vie aux univers qu'il met en scène. Sa descente aux Enfers est très loin des descriptions dantesques qu'elle tente vainement d'invoquer, et la bataille finale, censée être le clou du spectacle, a des allures d'embuscade fauchée. Bref, si le projet était enthousiasmant, la réalisation laisse à désirer. En tant que pastiche grossier et irrespectueux, Butcher Bird atteint sa cible, parfois jusqu'au jouissif. Mais chaque fois que Kadrey tente d'élever les enjeux de son roman, il se ramasse douloureusement. Ce qui au bout du compte en fait un bouquin plaisant mais anecdotique.

Philippe BOULIER
Première parution : 1/7/2012 dans Bifrost 67
Mise en ligne le : 5/12/2015


     Richard Kadrey n'est pas un inconnu en France : il y a été publié deux fois, dans la défunte collection Présence du Futur. Métrophage parut en 1988, et Kamikaze l'Amour en 1997 ; les deux s'attirèrent plutôt de bonnes critiques. Alors, comment cela se fait-il que l'on n'ait plus croisé ensuite l'auteur ? Tout simplement parce que Kadrey était un auteur rare jusqu'à il y a peu : sur les sept romans qu'il a publiés, cinq datent de moins de dix ans. Et la cadence s'est accélérée depuis 2007 et la parution de Butcher Bird : à partir de 2009, il écrit un roman par an dans la série Sandman Slim, que Denoël devrait faire paraître à partir de 2013. Ajoutez à cela une passion pour la photographie, notamment fétichiste (dont on peut voir certains clichés — attention, ils ne conviennent pas à tous publics — en cherchant Kaos Beauty Klinik sur le net), et vous comprendrez sans doute mieux que l'on n'a pas affaire ici à une carrière d'auteur classique.
     Spyder Lee exerce la profession de tatoueur à San Francisco. Comme il vient de se faire larguer par sa copine, il occupe ses soirées à se saouler. Et c'est à la sortie d'un bar qu'attaqué par un démon, il ne doit sa survie qu'à l'intervention d'une jeune aveugle dont la canne se transforme en une épée que Pie-Grièche manie à la perfection malgré son handicap. Dès lors, Spyder découvre qu'au monde qu'il connaît s'en superpose un autre, empli de démons et autres créatures peu recommandables. Ayant perdu tout attrait à continuer à mener sa vie présente, il accepte de tout lâcher pour suivre Pie-Grièche dans une quête qui l'emmènera loin, très loin...
     Après un roman cyberpunk (Métrophage) puis un digne successeur du Ballard de La forêt de cristal (Kamikaze l'Amour), Kadrey change donc une nouvelle fois de registre en arpentant les terres de la fantasy urbaine. Il nous livre ici un livre particulièrement réjouissant, un roman de démonologie mâtiné de roman d'aventures picaresques, entre batailles aériennes et plongée étourdissante dans les entrailles de la Terre, le tout traversé par des personnages particulièrement déjantés. C'est sympa, rythmé, léger mais aussi parfois grave, et surtout c'est porté par un humour corrosif qui s'exprime essentiellement par des dialogues percutants. La quatrième de couverture parle de Tarantino, et en effet la filiation est évidente : formules cinglantes, plaisir de la polémique, vulgarités bienvenues et un recours permanent à d'éléments de culture et de contre-culture ; Elvis Presley est par exemple convié, au motif de savoir si la chanson « Suspicious Minds » justifie à elle seule les longues années de décadence du King sur la fin de sa vie. Ce plaisir de la langue fleurie, et des discussions à n'en plus finir (comme lorsque John Travolta et Samuel Jackson préfèrent différer un règlement de comptes dans Pulp Fiction afin de pouvoir finir leur café peinards), participe beaucoup à l'attrait de ce roman cool.
     Au final, Butcher Bird se révèle un livre fort plaisant, une distraction démonologique et rock. On se réjouit donc de revoir Richard Kadrey dans les librairies, et ce d'autant plus qu'on a l'assurance de le retrouver bientôt avec sa série Sandman Slim. Et si des éditeurs avisés pouvaient avoir l'idée de rééditer Métrophage et Kamikaze l'Amour, ça n'en serait que justice pour le talent protéiforme de Kadrey.
 

Bruno PARA (lui écrire)
Première parution : 29/4/2012 nooSFere

retour en haut de page

Dans la nooSFere : 87292 livres, 112207 photos de couvertures, 83728 quatrièmes.
10815 critiques, 47164 intervenant·e·s, 1982 photographies, 3915 adaptations.
 
NooSFere est une encyclopédie et une base de données bibliographique.
Nous ne sommes ni libraire ni éditeur, nous ne vendons pas de livres et ne publions pas de textes. Trouver une librairie !
A propos de l'association  -   Vie privée et cookies/RGPD