Critique des n° 2 & 3 de la série « Poupée aux yeux morts »
Le monde est fou, semble-t-il. La science ne répond plus aux lois que l'on croyait rationnelles. Tout va de travers.
Peu à peu, Kerl comprend ce qui arrive. Le fouinain lui a mis la puce à l'oreille. La Perturbation est un phénomène qui vient du fin fond de l'univers et qui affecte les lois jusque-là valables. Elle représente une véritable révolution et est synonyme de progrès pour peu qu'elle soit acceptée. Mais la plupart des peuples qu'elle touche la rejette et la fuit. Ils voient en elle la fin de l'univers, un ennemi sans visage plus dangereux que tout ce qu'ils connaissent.
Dans ce tumulte, Kerl parvient à récupérer Sue, son amour de toujours, et à briser son conditionnement. Mais là ne s'arrêtent pas ses malheurs. Pour vivre tranquille, et encore ça n'est même pas sûr, il devra vaincre le Gardien, ce Gestalt né du Néo-Puritanisme déclinant.
Les chemins suivis par les différents personnages se croisent et s'entrecroisent pour se rejoindre d'une façon définitive à la fin par la fusion de tous les esprits. Le héros vit une partie de ces aventures dans la tête des autres, sans trop savoir ce qu'il lui arrive. Il paraît même dans les dernières pages qu'il serait mort, ce qu'il refuse catégoriquement de croire.
Curieuse triologie où l'auteur alterne le bon et le moins bon. Assurément, son projet est original et ambitieux. Un peu trop, sans doute. Il nous plonge dans une atmosphère déroutante, haute en couleurs (le fouinain, les Salvoïdes, les Transylvanniens, les Doux-Dingues...) et en inventions. Mais son œuvre est finalement trop longue et un tantinet confuse. Trois romans, c'est trop. L'originalité s'émousse au bout du compte. On ignore réellement quels seront les effets à long terme de la Perturbation et à quoi elle sert, finalement. Elle bouleverse, d'accord, mais dans quel but ?
On l'aura compris, je ne suis pas tout à fait convaincu par cette œuvre teintée de hard-science. Néanmoins, je ne voudrais pas rester sur une mauvaise note. Au fond, cette triologie, malgré ses défauts, est lisible. Elle est même pleine de qualités. Peut-être suis-je trop exigeant avant Roland C. Wagner parce que je le connais ? C'est possible. Il est plus facile de critiquer le livre d'un écrivain qui est anonyme à vos yeux.
De toute façon, un critique n'est là que pour donner à lire un sentiment ; un sentiment qui n'est parfois partagé par aucun autre que lui !
Éric SANVOISIN
Première parution : 1/3/1989 dans Fiction 406
Mise en ligne le : 13/3/2003