Tous les lecteurs ont été ravis de retrouver Arnaud dans la série « Anticipation » du Fleuve Noir : un grand retour à fêter au Champagne. Mais qui parle de retour ? Arnaud n'avait jamais abandonné la SF. Il l'avait seulement déplacée d'une collection à l'autre. Le coucou dans la série « Spécial Police » appartenait au genre, et à part entière. Et, dans « Espionnage ». Coquelicot party aussi. C'est un superbe livre auquel je suis tout particulièrement sensible, puisqu'il se déroule sur la frontière de Canjuers, le plus vaste terrain militaire d'Europe qui empoisonne le Haut Var, juste là où j'habite. Arnaud n'invente rien : pour qui connaît bien le pays (il ne vit pas loin, lui non plus), tout y est. Arnaud se contente de gratter un peu fort la réalité, mais sa SF existe, je la rencontre presque chaque jour quand je suis coincé sur la route par un convoi d'AMX 30... Des officiers français qui ont fait des stages dans des centres de torture argentins (ça existe, c'est prouvé) poursuivent à la lisière de Canjuers un témoin gênant qu'ils veulent faire disparaître. Pour cela, ils montent de gigantesques manœuvres antiterroristes, ils demandent le soutien de la population et bouclent toute la région sous prétexte d'exercice. Ils prennent tous les pouvoirs, un mini coup d'état — très possible. Politique-fiction ou réalité ? Les lecteurs de Calais n'y verront sûrement que de l'imaginaire. Ceux d'ici (et tous ceux qui vivent à proximité de terrains militaires) savent bien que la SF d'Arnaud est simplement un joli coup pour raconter le réel.