La
Saga Vorkosigan s'agrandit. Que ceux qui n'ont pas lu les épisodes précédents se rassurent. Ils peuvent consommer
Immunité diplomatique, écrit en 2002, comme une œuvre unique, tant Lois McMaster Bujold est habile dans l'art d'évoquer les aventures antérieures de son héros sans infliger au lecteur un pénible résumé.
Le cadre de cette intrigue est la station Graf de l'Union des Habitats Libres où vivent les
Quaddies, des humains génétiquement modifiés dont les jambes ont été remplacées par des bras, pour une meilleure adaptation à l'apesanteur. La naissance de cette colonie marginale avait été évoquée dans un roman qui n'appartient pas à la
Saga Vorkosigan :
Opération Cay. Pour le héros, l'Auditeur impérial Miles Vorkosigan, la présente mission s'annonce comme une corvée. L'Empereur barrayaran lui demande d'interrompre son voyage de noces, afin de mettre un terme à un incident diplomatique mineur en apparence. Un officier des troupes barrayaranes escortant une flotte de commerce en transit sur la station Graf a disparu. Soupçonnant un assassinat, les autres militaires ont ouvert le feu contre les Quaddies. Par mesure de rétorsion, ces derniers interdisent à la flotte de reprendre le chemin de l'espace. Miles constate très vite que l'incident est grave et ses implications multiples. Il lui faudra faire preuve d'une grande finesse diplomatique et d'un talent d'enquêteur hors pair, mais aussi mettre sa vie en jeu pour éviter une guerre entre l'Empire barrayaran et son rival, l'Empire cetagandan.
Avec
Immunité diplomatique, Lois McMaster Bujold offre un agréable roman d'aventures : les personnages sont séduisants par leur diversité et l'intrigue semée de rebondissements. Empire galactique, vaisseaux, manipulations génétiques, clonage, on retrouve des thèmes classiques de la SF. Un lecteur attentif peut en outre déceler, sous l'apparence conventionnelle, une vision de l'Amérique contemporaine. La station Graf doit faire face à un chantage terroriste : une bombe bactériologique menace d'exploser. Il importe de retrouver et de désarmer le criminel sans scrupules, un être d'une autre race, inquiétant. Ce thème est cher aux scénaristes d'Hollywood, surtout depuis le 11 septembre 2001. Deux méthodes s'affrontent. Les Quaddies, soucieux de leur indépendance et très respectueux de la démocratie, veulent enquêter en appliquant strictement les lois. Miles Vorkosigan, représentant d'un Empire habitué à la violence, prône des méthodes plus expéditives. Face à un suspect, le sérum de vérité et même la torture ne lui posent aucun problème : «
Dans ce cas d'urgence, les règles militaires semblaient plus appropriées que les règles civiles. En d'autres termes, s'ils veulent nous fiche la paix, on arrachera les ongles du Ba à leur place. »
On songe aux reproches faits par Donald Rumsfeld à la « Vieille Europe », trop molle à ses yeux, et au sort des prisonniers de Guantanamo. Et l'on se dit que la science-fiction, une fois de plus, est le lieu où s'expriment le mieux les interrogations de l'homme face à un monde qu'il peine à maîtriser.