Stepford est un village résidentiel de la banlieue new-yorkaise. C’est là que décident de s’installer Walter, un jeune avocat, sa femme Joanna et leurs deux enfants, tout à la joie de retrouver l’espace et la verdure après la vie harassante de Manhattan.
Jeune femme « libérée », Joanna a su préserver son autonomie, elle est intellectuellement épanouie et très « dans le vent ». Aussi est-elle frappée par le comportement de ses voisines : des femmes qui passent le plus clair de leur temps à faire leur ménage, nettoyer, cirer, briquer, frotter, tout en restant par ailleurs très soignées de leur personne. En un mot, le rêve de tous les maris !
Ceux-ci, d’ailleurs, ont constitué un club absolument fermé aux femmes, et qui tient ses assises dans une vieille maison entourée d’une haute palissade. Le soir, il s’en dégage une drôle d’odeur… Que peuvent bien faire là les hommes de Stepford ? s’interroge Joanna, dont le mari, lui aussi, a adhéré au club…
Avec deux autres nouvelles venues à Stepford, Joanna essaie de créer une association féminine. Mais ses deux amies ne tardent pas à se couler dans le moule des parfaites ménagères. Stupéfaite, puis soupçonneuse et enfin terrorisée, Joanna se demande si les femmes de Stepford ne sont pas victimes de leurs maris qui, grâce aux savants du club, les transformeraient selon leur désir – ou, qui sait même, les remplaceraient par des robots ?
Déployant ici le même art insidieux que dans Rosemary’s Baby, Ira Levin laisse monter peu à peu en son héroïne – et en nous – une véritable angoisse. Et, lorsque Joanna tente de fuir Stepford sous la neige, à travers les bois, l’extraordinaire suspense est à son comble. Ce roman plein de cruauté, mais parfois aussi d’humour, décrit avec une rare intensité le cauchemar aseptisé et climatisé qui, dans leur vie quotidienne, guette les Américains d’aujourd’hui - et les européens de demain.
Ce nouvel ouvrage de l'auteur de Rosemary's Baby ne déçoit pas, bien que le thème soit beaucoup plus terre-à-terre et la terreur plus feutrée. A première vue, c'est l'illustration de Caza qui m'a déçu ; mais, après lecture, on comprend le pourquoi de ces seins agressivement sphériques et de cette chevelure blonde faite de copeaux de métal. Sont-elles conditionnées ou carrément remplacées par des automates, les femmes de cette petite ville provinciale, si préoccupées de tenir à la perfection leur « intérieur » et leur... extérieur qu'elles n'ont plus aucune vie personnelle ? Celle qui pourrait répondre, Joanna, l'héroïne, n'a pu finalement éviter le piège qu'elle avait senti ; et celle qui reste encore normale à la fin ne le verra pas parce que, Noire, le racisme lui cache le sexisme, Alors, peut-être science-fiction, mais peut-être portrait satirique, prémonitoire mais à peine extrapolé, de la femme d'Outre-Atlantique (et d'outre-Rhin, donc !) si efficacement décervelée qu'elle en vient à ressembler à l'image « idéale » d'elle-même que lui propose/impose la publicité : maîtresse de maison mettant toute sa fierté dans ses talents de consommatrice avisée, et amante mettant toute sa confiance dans le sex-appeal en bouteilles (selon le tout récent Captains of Consciousness de Stuart Ewen).