Julien CAMPREDON Première parution : Toulouse, France : Monsieur Toussaint Louverture, 2006
POCKET
(Paris, France), coll. Littérature - Best n° 15680 Date de parution : 5 septembre 2013 Dépôt légal : septembre 2013 Réédition Recueil de nouvelles, 140 pages, catégorie / prix : 4 ISBN : 978-2-266-24312-4 Format : 11,0 x 17,6 cm❌ Genre : Imaginaire
ICONOCLASTE, BIDONNANT, FOISONNANT, ÉPASTROUILLANT... Voilà l'objet littéraire non identifié que vous tenez entre les mains. Pour l'équipe Pocket, ce fut le coup de foudre au premier elfe : ces nouvelles, c'est tout un poème... D'ailleurs, on en ferait presque des vers :
Des marins maltais aux vieux saules de Tolkien,
Des parkings aériens aux appâts des sirènes,
chez Julien Campredon, cher lecteur, tout est bon.
Et si vous trouvez mieux, n'hésitez pas à nous écrire. Votre prose ornera peut-être cette couverture...
L'équipe Pocket
P.S. : L'auteur, s'il parvient à tromper la vigilance de ses gardiens n'est pas habilité à jouer à ce petit jeu. Merci.
Nouvelle édition revue et corrigée
Pour le service après-vente,
Merci de vous reporter à la page 139.
Julien Campredon est un jeune nouvelliste français né en 1978. À son actif, plusieurs recueils de nouvelles, chez Monsieur Toussaint Louverture (éditeur qui nous propose systématiquement de très beaux livres, à la finition très soignée) et Léo Scheer. En 2006 paraissait chez Monsieur Toussaint Louverture Brûlons tous ces punks pour l'amour des elfes ; ce livre ressort dans une édition « véloce » (entendez : plus courte, donc plus efficace) pour accompagner la sortie de L'attaque des dauphins tueurs, et la lecture conjointe de ces deux volumes s'impose pour saisir toute l'originalité de l'auteur. Car, en effet, dès la préface du premier livre, on comprend que Campredon va nous emmener sur des itinéraires quelque peu mouvementés : dans son texte introductif, l'éditeur Dominique Bordes recopie la lettre que son futur auteur lui fit alors pour accompagner la soumission de son premier manuscrit. Très largement inspirée de Borges, cette correspondance est une nouvelle en soi, Julien Campredon narrant ses recherches tragi-comiques de la Bibliothèque Universelle. Ce recueil commence donc dans un grand éclat de rire, et la promesse que ce nouvelliste ne fait rien comme les autres (n'oublions pas le titre du livre, toute une promesse en soi). Le texte inaugural (« Le Lièvre, l'olivier et le représentant en ronds-points ») est une fable de nonsense légèrement inquiétante sur les bords, un représentant en ronds-points sillonnant le pays pour tenter de démarcher les maires... Le second, « La Branleuse espagnole », revisite la mythologie grecque du point de vue d'un docker à Sète, biker et amateur de bière et de femmes tatouées. De ce mélange improbable naît un pur moment de bonheur, marqué par un travail stylistique impressionnant de Campredon, mais on en reparlera. « De l'homme idéal de ma femme, d'elle et de ma maîtresse » (admirons au passage le goût certain de l'auteur pour des titres à nul autre pareil) est un récit emberlificoté de relation conjugale qui tente de se réinventer par le biais d'expédients imprévisibles. Le plus original conte du mari, de la femme et de l'amant qu'il m'ait été donné de lire. Dans la nouvelle qui donne son titre au recueil, il suffira de décrire la situation de départ (des gardiens de musée qui, tels des snipers dans une guerre civile, dégomment des hordes de punks qui s'attaquent à la vénérable institution) pour comprendre qu'encore une fois Campredon ne ressemble guère à tout ce qu'on peut lire par ailleurs. On laissera donc au lecteur de cette chronique la surprise des textes suivants, qui revisitent Kafka (« Avant Cuba ! », l'érotisme (« Heureux comme un Samoyède ») ou encore la politique (« Jean-François Cérious ne répond plus »)... Tout en l'avertissant que cette plongée dans les univers tordus de Julien Campredon risque fort de lui occasionner le mal des caissons, tant on a envie de rester en immersion longue durée. Car l'auteur sait y faire : son style, généreux, enlevé, communicatif, est une merveille d'adéquation de la forme au fond. On pourrait picorer ici ou là une citation, mais on aurait un embarras du choix tel que ce dernier deviendrait cornélien, tant ces pages recèlent de trésors.
L'attaque des dauphins tueurs est légèrement plus court que son prédécesseur, puisqu'il ne nous présente que cinq textes. Mais le plaisir du mariage du style, de l'absurde et de l'inventivité est toujours là. Dans le texte qui donne son titre au recueil, où l'on voit donc des dauphins surgir d'un peu partout, dans un monde en proie au couvre-feu militaire ; et si les dauphins, plutôt que de représenter une menace, n'étaient pas la dernière forme possible de liberté ? « Diablerie diabolique au clubhouse » reprend le thème du pacte avec le diable, sur fond de swing et autres birdies (comprenez : de golf), en déroulant avec un bonheur compulsif la pelote de conséquences abracadabrantesques issues du postulat de départ. « La vengeance du livre urugayen » est une sorte de mariage entre Jorge Luis Borges (référence évidente et revendiquée de l'auteur) et le Robert Sheckley de « La clef laxienne ». « La coulée de béton infernale » manie le rire et le drame écologique, à mesure que le béton recouvre peu à peu tout le paysage. Enfin, « M., M. M., D. & M. » est un texte totalement improbable, peut-être le plus invraisemblable du recueil, où le narrateur nous parle depuis un jet-ski planté en plein milieu d'un rond-point à quelques kilomètres de la mer et nous raconte comment il en est arrivé là.
Au final, ces deux livres nous présentent un jeune auteur déjà incontournable, qui sait marier à merveille humour et inventivité, dans une déferlante iconoclaste, mâtinée de nonsense et de surréalisme, et portée par un style gourmand et jouissif. Une bien belle découverte.