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, coll. Perles d'Épice Dépôt légal : septembre 2016 Première édition Roman, 408 pages, catégorie / prix : 20 € ISBN : 978-2-36629-821-5 Format : 14,0 x 20,0 cm Genre : Science-Fiction
Ancien chercheur en physique quantique, Jacob Kelley voit son monde basculer le soir où Brian Vanderhall s'invite chez lui et tire sur sa femme pour lui prouver l'existence d'intelligences découvertes au cœur même de la matière.
Mais lorsque Vanderhall est retrouvé assassiné et que la famille de Jacob disparaît, c'est lui que la police met sous les verrous.
Emprisonné, il va devoir prouver son innocence au cours d'un procès très médiatique.
Heureusement, il peut compter sur une aide précieuse : celle de Jacob Kelley.
Mais lorsque Vanderhall est retrouvé assassiné et que la famille de Jacob disparaît, c'est lui que la police essaie de mettre sous les verrous.
En cavale, il va devoir mener sa propre enquête pour très vite prouver son innocence.
Car au même moment, au tribunal, se joue le destin d'un homme : celui de Jacob Kelley.
Bienvenue dans un monde où l'impossible devient possible.
David Walton est un auteur de science-fiction américain. Terminal Mind, son premier roman, a reçu le prix Philip K. Dick. Avec Superposition, dont les droits d'adaptation en série télévisée ont été vendus, il signe un thriller quantique à la mécanique implacable, qui tient en haleine jusqu'à la dernière page.
1 - Roland LEHOUCQ, Physique et réalité, pages 383 à 406, postface
Critiques
Il existe assez peu de fictions axées sur la physique quantique. Les gens qui rejettent la SF le font car ils ne parviennent pas à suspendre suffisamment leur incrédulité pour accepter les divers objets science-fictifs. Bien qu’il s’agisse de science, et non de science-fiction, la physique quantique exige le même genre de démarche intellectuelle. Au niveau subatomique où s’applique la théorie quantique apparaissent comme possibles, comme vrais, des événements qui heurtent violemment le bon sens commun. La physique quantique résiste à sa traduction littéraire car, étant difficile à se représenter, elle est impropre à l’élaboration des métaphores dont se nourrit le genre. C’est la gageure qu’a entrepris de relever l’auteur.
Lorsqu’un soir d’hiver, Brian Vanderhall déboule chez Jacob Kelley, son ancien collaborateur, ce dernier sent que les ennuis viennent de lui tomber sur le râble. Vanderhall a réussi à transposer les phénomènes quantiques dans le macrocosme. Ce faisant, il a provoqué des entités quantiques qui semblent voir d’un mauvais œil (qu’elles n’ont pas) cette découverte et entendent bien refermer la boîte de Pandore.
Le lendemain, Kelley retrouve Vanderhall mort dans leur ancien laboratoire de l’accélérateur de particules du New Jersey. Exactement dans le même temps, il est arrêté par la police pour le meurtre de Vanderhall alors qu’il vient, lui, d’assister au massacre de sa famille par l’entité quantique bien qu’il n’y ait nul cadavre. Fuyant le labo de Vanderhall pour échapper à l’entité quantique, Jacob Kelley et son oncle tombent sur un Vanderhall bien vivant, planqué dans sa bagnole… Faut suivre, oui.
Tandis que les chapitres impairs nous montre Kelley enquêtant pour tenter de se disculper, d’y comprendre quelque chose et si possible de retrouver sa famille, on le voit passer au tribunal dans les chapitres pairs pour le meurtre de Vanderhall, de nouveau disparu. Pour flics et magistrats, il est clair que l’on cherche à leur faire prendre des vessies pour des lanternes, même quand un second Jacob Kelley se présente à la barre pour témoigner au procès de l’autre lui-même.
Le monde de Kelley finira par retomber sur les pattes de la normalité (ou presque) une fois que les probabilités se seront effondrées, comme lorsque l’on ouvre la boîte du fameux minou qui cesse dès lors d’être « à la fois » mort et vivant.
Superposition est un thriller judiciaire et un polar où les phénomènes quantiques d’ordinaire circonscrits à l’univers des particules se voient transcrits à échelle humaine pour y défier le sens commun. Le tour de force de David Walton est de réussir à offrir un roman accessible bien qu’à base de concepts ardus. Peut-être pour y parvenir en fait-il un peu trop en ce sens, d’ailleurs. Il demande une telle suspension de l’incrédulité qu’on peine à y croire. Et si vous étiez jurés, vous, à ce procès-là ? Même s’il ne satisfait pas pleinement, si on est loin de recevoir toutes les explications qu’on est en droit d’espérer, l’ensemble n’en fonctionne pas moins et se lit fort agréablement.
Américain né en 1975, David Walton avait déjà gagné le prix Philip K. Dick en 2008 pour Terminal Mind. C’est une idée issue de ce roman qui a donné naissance à Superposition et sa suite Supersymmetry (qui n’est pas encore parue en France). On rappelle que le prix Philip K. Dick est décerné chaque année à une œuvre publiée l’année précédente au format poche. Moins connu que le Hugo, il a néanmoins récompensé, entre autres, les célèbres Neuromancien de Gibson ou Roi du matin, Reine du jour de Ian McDonald ainsi que Carbone Modifié de Richard Morgan qui fait l’objet d’une série aujourd’hui visible sur Netflix.
Jacob Kelley est un chercheur en physique quantique. Un de ses collègues fait un jour une découverte assez extraordinaire qui peut potentiellement bouleverser la vie telle que nous la connaissons. Suite à ses expériences, un être bizarre prend forme dans notre réalité. Cet être peut « démonter » un humain et le « remonter » comme s’il s’agissait d’une construction de mécano. Kelley, accusé de meurtre, va avoir du mal à convaincre les juges qu’il n’est pas coupable. En effet, ses explications scientifiques ressemblent plutôt à des élucubrations pour le jury qui est bien entendu néophyte en la matière…
On l’a compris, la science est au cœur de l’intrigue de Superposition. Ce titre fait d’ailleurs référence à la propriété de certaines particules qui n’existent à un certain endroit (si on a bien compris) que sous forme de probabilités. Dès lors, quand on applique à notre échelle des principes qui ne sont vrais qu’à l’échelle quantique, on obtient tout un tas de situations abracadabrantes qui procèdent pourtant d’une logique que l’humanité commence à mieux comprendre. On apprend d’ailleurs pas mal de choses sur ce monde atomique qui est décidément bien bizarre. Les bases sont d’abord posées : zone de valence, zone de conduction et zone interdite sont des concepts très clairs. Ensuite il faut un peu s’accrocher pour suivre.
Si les lois savantes qui sous-tendent l’intrigue sont expliquées, ce n’est pas dans les mêmes proportions que chez un Greg Egan ou un Stephen Baxter. Nul besoin de parcourir plusieurs longues pages constituées de concepts impénétrables : tout est succinctement énoncé et intégré dans une histoire qui reste profondément humaine. La famille de Kelley lutte pour le sauver et tous les sentiments inhérents aux relations enfants/père et épouse/époux sont bien là aussi.
Au final, cet heureux mélange de sciences et de situations tragico-loufoques est bien divertissant et ouvre une fenêtre sur l’étrange univers microscopique dont nous sommes constitués. Walton ne fait donc pas que nous distraire, il nous procure un véritable moment de lecture science-fictive.