Edwin ABBOTT Titre original : Flatland: A Romance of Many Dimensions, 1884 Première parution : Seeley & Co, 1884ISFDB Traduction de Elisabeth GILLE Illustration de FLAMIDON Illustrations intérieures de Edwin ABBOTT
LIBRIO
(Paris, France), coll. Littérature n° 1066 Dépôt légal : octobre 2022, Achevé d'imprimer : septembre 2022 Réédition Roman, 128 pages, catégorie / prix : 3 € ISBN : 978-2-290-38140-3 Format : 13,0 x 20,5 cm✅ Genre : Science-Fiction
Sous-titre : Une aventure à plusieurs dimensions
L'éditeur indique, sur son site, qu'il s'agit d'une version Collector.
« Permettez-moi de vous dire qu'au pays de la ligne la vie doit être bien monotone »
Les personnages de cette allégorie sont des figures géométriques : triangles isocèles, carrés, polygones, cercles... Dans leur monde plat, en deux dimensions, ces figures sont très hiérarchisées et ont des coutumes et des croyances bien ancrées. Aussi, quand un modeste carré doté d’une conscience découvre la troisième dimension lors de l’apparition soudaine et invraisemblable d’une sphère, on crie à l’hérésie.
Tout à la fois critique de la rigidité de la société victorienne et texte fondateur de la science-fiction, Flatland aborde la question troublante de la possibilité d’une quatrième dimension spatiale.
Professeur et théologien anglais, Edwin Abbott Abbott (1838-1926) abandonne en 1889 son poste de directeur de la célèbre City of London School afin de se consacrer à des travaux littéraires. Il est notamment l'auteur d'une biographie de Francis Bacon et d'un ouvrage philologique, La Grammaire de Shakespeare (1870).
1 - (non mentionné), Préface de l'éditeur à la deuxième édiition révisée (1884), pages 7 à 10, préface, trad. Elisabeth GILLE 2 - William GARNETT, Introduction de l'édition anglaise, pages 121 à 124, postface, trad. Elisabeth GILLE
Classique inclassable, longtemps ignoré en France 1, Flatland séduit par sa logique mathématique qui, elle seule , autorise la prouesse de décrire la société d'un univers à deux dimensions, plat, sans haut ni bas, peuplé de figures géométriques ayant leurs moeurs, leur religion, leurs classes sociales. On y apprend ainsi que les Triangles, obtus militaires, sont moins irréfléchis lorsqu'ils se rapprochent de l'isocèle, que la hiérarchie sociale est affaire de segmentation : les formes les plus segmentées se rapprochent toujours plus du cercle, modèle inaccessible de perfection.
Discret pamphlet de l'époque victorienne, ce récit d'un Carré (pas très haut dans l'échelle sociale, donc) appréhendant la troisième dimension, acquiert de fait une dimension universelle quand il s'en prend aux esprits étroits qui refusent d'imaginer quelle perception ils auraient d'un univers doté d'une dimension supplémentaire, autrement dit qui refusent les jeux spéculatifs tels qu'en propose la science-fiction. Message de tolérance, plaidoyer pour l'ouverture d'esprit et la liberté d'opinion, la leçon d'Abbott conserve, plus d'un siècle après, toute son actualité. Mais l'œuvre était indubitablement en avance sur son temps : la façon dont un habitant d'un monde à deux dimensions appréhenderait un être venu de la troisième développe des concepts qu'on ne retrouvera que trente ans plus tard, dans la théorie de la Relativité.
Comme son confrère Lewis Carroll, né six ans avant lui, Abbott est un clergyman qui a développé dans sa littérature un délire basé sur la logique.
Pour ne pas gâcher le plaisir de la lecture, il est déconseillé de commencer par la préface de Manganelli, qui paraphrase plus qu'il ne commente l'oeuvre. Lisez-la ensuite si ça vous chante, mais ne manquez surtout pas ce petit bijou fascinant qu'est Flatland. Toute l'essence de la S-F est là et, dans la description d'un univers à deux dimensions, on n'a encore jamais fait mieux !