Fidel Castro agonise. La lutte pour sa succession se développe au sein du Conseil de la Révolution et dans la société civile. Les deux « candidats » les plus sérieux sont Hector Sedano, prêtre jésuite, opposant au régime, (le gentil) et Alejo Vargas, Ministre de l'Intérieur et chef de la police secrète (le méchant). On devine qui va gagner. Pour arriver à ses fins — être le nouveau dictateur de Cuba — , Vargas n'hésite pas à dérober des armes bactériologiques aux Américains de Guantanamo Bay, l'enclave US sur Cuba, au moment où ceux-ci décident de les évacuer pour les détruire. Vargas s'appuie aussi sur le programme bactériologique développé par Castro (un virus mutant de la polio qui tue en quelques secondes) et sur six missiles de moyenne portée capables de frapper le sud des Etats-Unis. Fidel a réussi à dissimuler ces missiles de fabrication russe lors de la crise de la Baie des Cochons.

     Jack Grafton, reponsable du porte-avions United States, est chargé de superviser l'évacuation des armes bactériologiques de Guantanamo Bay. Le président des Etats-Unis lui confie la difficile mission de détruire les missiles stationnés à Cuba équipés de têtes bactériologiques. Le roman raconte en parallèle la lutte pour le pouvoir au sein du gouvernement cubain, et l'opération de Grafton et de ses troupes pour l'élimination de la menace bactériologique.

     On retrouve ici le personnage emblématique de Coonts, Jake Grafton, que nos lecteurs suivent depuis Le vol de l'Intruder. Et surtout... qu'ils attendent, car Grafton n'apparaissait pas dans les deux derniers romans de Coonts, Les Guerriers du Ciel et Destins de Guerre. Le retour de Grafton et de ses petits camarades, dont son second et meilleur ami Toad Tarkington, est donc une bonne nouvelle pour les nombreux fans de Coonts.

     Le thème principal du roman, une menace bactériologique contre les Etats Unis, est traité ici avec tous les détails techniques nécessaires : opérations militaires, guerre électronique, scènes de combats aériens et attaques terrestres (sur les cents dernières pages). A aucun moment, pourtant, cette technicité ne pèse sur le suspense du livre, qui se lit comme un thriller géopolitique.

     Le lieu de l'action, Cuba, est évidemment « payant » : Cuba est à la mode (aujourd'hui, destination touristique majeure / explosion en France de la musique cubaine) et on sait que Fidel Castro ne va pas tarder à mourir. S'il pouvait le faire au moment de la sortie de la version française de ce Coonts, nous lui en serions très reconnaissants.

     On pouvait tout craindre de cette vision yankee républicaine du communisme cubain. Or, si Coonts, comme d'habitude, ne cache pas ses sympathies pour l'Amérique droitière et l'armée US « gendarme du monde », il décrit Cuba et ses problèmes sans jamais tomber dans les clichés. Fidel Castro, qui apparaît dans la première moitié du livre, est même parfois sympathique et touchant dans ses dernières heures ! Cuba et sa vie quotidienne y sont vues au plus près de la réalité (que je connais un peu) et, là encore, loin des clichés.

     On pourrait seulement reprocher à ce récit le peu d'importance accordé par l'auteur aux réactions internationales à l'attaque militaire US contre Cuba. La géopolitique, ici, se résume à Cuba et aux USA, et c'est un peu court en ces temps de mondialisation.

     Le style de Coonts s'est encore affiné : précis, journalistique, sans la moindre lourdeur, il est bien meilleur que celui de son challenger, Tom Clancy. Les références techniques et les passages purement militaires ne sont jamais épuisants (au contraire, par exemple, des Guerriers du Ciel).