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Solaris

Stanislas LEM

Titre original : Solaris, 1961
Première parution : Varsovie, Pologne : MON, 1961
Traduction de Jean-Michel JASIENKO
Illustration de Benjamin CARRÉ

GALLIMARD (Paris, France), coll. Folio SF n° 92
Dépôt légal : mars 2002
Réédition
Roman, 336 pages, catégorie / prix : F7
ISBN : 2-07-042239-9
Genre : Science-Fiction



Quatrième de couverture
     Une équipe scientifique débarque sur Solaris, un monde inhabité tournant autour de deux soleils. L'immense océan protoplasmique qui recouvre entièrement la planète reste depuis des siècles un irritant mystère.
     Dès son arrivée, le Dr Kelvin est intrigué par le comportement du physicien Sartorius et du cybernéticien Snaut, qui semblent terrorisés par la visite d'une femme, Harey ; une femme que Kelvin a autrefois aimée et qui s'est suicidée plusieurs années auparavant.
     Impossible... A moins qu'une entité intelligente n'essaie d'entrer en contact avec eux en matérialisant leurs fantasmes les plus secrets, et qu'en l'océan lui-même réside la clé de cette énigme aux dimensions d'un monde.
     Magistrale interrogation sur les possibilités de communication avec des intelligences radicalement autres, de la même ampleur que Rendez-vous avec Rama d'Arthur C. Clarke, Solaris est une des pierres angulaires de la science-fiction.
     Solaris a été porté à l'écran en 1971 par Andreï Tarkovski.

     Né en 1921 en Pologne, Stanislas Lem est l'un des auteurs les plus respectés de la science-fiction. Médecin de formation, passionné de philosophie, de cybernétique, de physique et de biologie, mais aussi humoriste à ses heures, il est l'auteur de quelques-uns des plus grands chefs-d'oeuvre du genre.
Critiques
     On peut distinguer, dans l'œuvre de l'écrivain polonais Stanislas Lem, d'une part les nouvelles, qui marient idéalement humour corrosif et vertiges métaphysiques (Les Mémoires d'Ijon Tichy par exemple), et d'autre part des textes plus graves, souvent des romans, approfondissant une réflexion jusqu'à la corde (comme dans Le Rhume), épuisant toutes ses possibilités. Solaris, son œuvre la plus célèbre, appartient à cette deuxième catégorie. Écrit en 1961, il fut adapté au cinématographe en 1972 par Andrei Tarkovski. Le film éponyme, assez fidèle au roman, est peut-être, avec 2001, Odyssée de l'espace de Kubrick, le meilleur film de SF de l'histoire du septième art. Mais qu'en est-il du texte de Lem ?
     Solaris est une planète recouverte par un Océan étrange, qui semble manifester les signes d'une certaine intelligence, d'une « métaconscience » qui reste un mystère absolu pour les scientifiques, depuis sa découverte plusieurs siècles auparavant. Le docteur Kelvin arrive sur la station en orbite autour de Solaris et observe le comportement anormal de ses habitants, Snaut et Sartorius. Très vite, et contre toute logique, il constate en effet qu'ils ne sont pas seuls à bord... Surgie de sa mémoire, une femme morte quelques années plus tôt réapparaît en chair et en os dans la station. Serait-ce donc cet Océan indéchiffrable ? Ce dernier tenterait-il de communiquer avec l'équipage en matérialisant ainsi les produits de leur inconscient, leurs fantasmes les plus enfouis ? L'Océan veut-il les punir ? Leur faire plaisir ? Ou rien de tout cela ?
     La construction de Solaris s'apparente à une démonstration. À travers l'historique de la « solaristique », le narrateur envisage les hypothèses, les réfute, en examine d'autres pour enfin reconnaître son impuissance. À la fois roman psychologique — tout se passe entre les personnages, astronautes et « créations chimériques » de l'Océan — et roman philosophique, il entraîne le lecteur dans un lent processus de réflexion, au cours duquel sont remis en question la place de l'homme dans l'univers et son aptitude (ou non) à comprendre ce qui lui est parfaitement étranger, totalement inhumain. C'est cette approche novatrice de la science-fiction, cette vision adulte, matérialiste et néanmoins transcendantale, qui a propulsé ce roman au rang mérité de mythe et de classique, dont l'influence est encore vive. Car malgré l'obsolescence de certains développements scientifiques — notamment en matière de physique quantique — , Solaris n'a pas pris une ride, porté par une thématique universelle et par un style sans fioritures. On peut simplement regretter dans cette réédition une illustration hideuse et lui préférer le design plus élégant de la précédente édition, dans la défunte collection Présence du Futur, chez Denoël.

Olivier NOËL
Première parution : 1/6/2002 dans Galaxies 25
Mise en ligne le : 1/2/2004

Critiques des autres éditions ou de la série
Edition DENOËL, Présence du futur (1966)

    Ce compte rendu pourrait se borner à une seule ligne : « Solaris est LE roman de SF de l'année. » Voici longtemps que ne nous avait pas été offert roman de cette qualité.

    Le sujet en est simple, et les monstres, les luttes galactiques, les accessoires obligés de la panoplie spatiale y font singulièrement défaut. N'empêche, les quelques anodines matérialisations qui se découvrent, se révèlent finalement plus terrifiante que les plus réussis des monstres galactiques.

    Solaris est une planète gravitant autour de deux soleils, connaissant un jour bleu et un jour rouge, que l'auteur ne se lasse pas de nous décrire, comme la base qui flotte dans les airs, au-dessus de cet océan monocellulaire, être gigantesque recouvrant toute la planète. Cet être inconcevable, les hommes l'étudient depuis près d'un siècle, et Kelvin, le héros, vient prendre son service dans la base.

    Il apprend que son ami Gibarían s'est suicidé… Tout semble à l'abandon, les deux autres savants semblent au bord de la folie, se barricadent et refusent tout contact avec le nouvel arrivant… Et le malaise, l'angoisse ne feront que croître ; tout est à la fois normal, banal et déroutant. Quelle est cette négresse circulant dans les couloirs, que Kelvin retrouve endormie contre le cadavre de Gibarían, dans un milieu qui devrait être mortel pour elle ? Que signifie cette expérience entreprise, ces sous-entendus, cet effroi que manifestent les survivants ?

    En quelques heures, Kelvin se retrouve au bord de l'hallucination et de la folie, il sent le réel le fuir, l'abandonner, pour l'isoler dans un monde de fantasmes aberrants. Mais ce qui l'entoure a-t-il une autre réalité que son cerveau enfiévré ? Comment Kelvin s'y prend pour redonner au monde qui l'entoure sa matérialité et sa netteté est proprement remarquable. Et c'est alors, quand le réel est revenu, que paraît Harey, la femme aimée, jadis bêtement poussée au suicide, et qui est là, aimante, réelle, vivante, se souvenant d'événements survenus après sa mort…

    Dès lors, le récit évolue sur deux plans. Il y a le roman de Kelvin, effrayé d'abord, puis qui recommence un amour gâché jadis par l'inexpérience, et qui finalement perdra Harey une seconde fois, sans espoir.

    En face, ses deux collègues qui, désespérément, veulent comprendre ce qui se passe. C'est le roman de la confrontation de deux pensées étrangères l'une à l'autre. C'était le thème déjà de La Cité des Sphères, mais l'ouvrage polonais souligne, cruellement, ce que le roman américain a de factice, de fabriqué, de demi-audaces, il ne s'agit pas ici d'une lutte contre la montre, de sauver la Terre, de se libérer d'un esclavage… Il s'agit de comprendre.

    Voici des décennies et des décennies que les hommes étudient Solaris et les manifestations de son océan vivant. Et les dizaines de pages où sont rapportées les approches, les observations, les essais, les erreurs d'interprétation, les théories qui se succèdent vainement, sont merveilleuses d'invention, d'imagination et de justesse de ton. Elles pourraient être extraites d'un ouvrage scientifique, d'un essai sur l'évolution et l'histoire de la pensée.

    Car le grand thème de l'œuvre est de rendre sensible à la fois l'incommunicabilité des expériences et des observations dès qu'il s'agit d'un monde totalement différent, et l'impossibilité où se trouvent les observateurs de mettre en commun leurs expériences, car le langage fait défaut qui s'est modelé au contact d'une autre réalité.

    Ensuite de nous faire partager la sensation de cette incommunicabilité, l'impuissance et la lassitude des hommes devant leurs efforts désespérés.

    Nous en arrivons à une qualité d'angoisse ou de malaise presque métaphysique, née de cette perception de l'incommunicabilité des esprits. Et si finalement les savants parviennent à détruire les créatures créées par l'océan, ils restent tout aussi ignorants de leurs fins, du motif de leur apparition, du pourquoi de leurs manifestations. 

    Écrit d'une plume grise, un tel récit suffirait déjà à nous attacher, mais Lem l'éclaire d'images percutantes, secouant le lecteur, et s'imposant avec une évidence brutale.

Jacques VAN HERP
Première parution : 1/6/1966
Fiction 151
Mise en ligne le : 18/1/2023

Cité dans les pages thématiques suivantes
Contacts

Cité dans les Conseils de lecture / Bibliothèque idéale des oeuvres suivantes
Denoël : Catalogue analytique Denoël (liste)
Jacques Sadoul : Anthologie de la littérature de science-fiction (liste parue en 1981)
Jean Gattegno : Que sais-je ? (liste parue en 1983)
Denis Guiot & Jean-Pierre Andrevon & George W. Barlow : Le Monde de la science-fiction (liste parue en 1987)
Albin Michel : La Bibliothèque idéale de SF (liste parue en 1988)
Lorris Murail : Les Maîtres de la science-fiction (liste parue en 1993)
Association Infini : Infini (1 - liste primaire) (liste parue en 1998)
Jean-Pierre Fontana : Sondage Fontana - Science-fiction (liste parue en 2002)
François Rouiller : 100 mots pour voyager en science-fiction (liste parue en 2006)

Adaptations (cinéma, télévision, BD, théâtre, radio, jeu vidéo...)
Solaris , 1972, Andrei Tarkovsky
Solaris , 2002, Steven Soderbergh

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