Dans son bureau du département Eugénie, Fausto Talpa sait que tous les regards sont tournés vers la capitale française : l'Exposition Universelle n'attend que l'arrivée de la reine d'Angleterre pour ouvrir ses portes. Et à cette occasion, la Fée électricité illuminera Paris, marquant son entrée dans une ère de modernité.
Plus que jamais un danger peut alors survenir.
Mais ni la peste des Tuileries, ni la révolte des gueux de la cour des Miracles n'inquiètent Fausto Talpa. Car il y a bien pire, un évenement connu de lui seul : Georges Beauregard est de retour. Et cela ne peut que signifier le début de nouveaux bouleversements dans la Bibliothèque Noire...
Après LE ROI SANS VISAGE, le second volume de la Bibliothèque Noire oscille entre mythologie antique et mythe moderne.
Critiques
Avec le premier épisode de La Bibliothèque noire (cf. Galaxies n° 12), il fallait quelques acrobaties pour faire le lien avec la SF. Cette fois, on s'est beaucoup rapproché du steampunk. Une exposition universelle imaginaire et ses machines fournissent pour cela un décor idéal, où Victoria ne dépare pas. S'y ajoutent des accents brussoliens quand le coke des usines à gaz libère les fantômes des dinosaures fossiles qu'il contenait. Et quelque chose de jeuryen quand un univers limité à Paris trouve l'occasion de se dilater en accueillant le monde extérieur, et donc en créant icelui. Et si le récit est désormais plus linéaire, avec un peu moins de surprises et de ruptures, le rythme n'a pas faibli, et on reste dans un second degré permanent, qui permet de réutiliser des personnages réels, de Morny aux Péreire, et autorise des anachronismes flagrants (Raspoutine, dans ce contexte...) ou de monstrueuses ficelles de roman-feuilleton (un personnage peu sympathique s'appelle Letraître). Tout est possible, puisque l'histoire elle-même se déroule dans un roman, que le héros le sait, qu'il a été en exploration dans la marge des livres et absent de sa propre vie jusqu'à ce qui est clairement indiqué comme sa deuxième aventure. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de s'étonner de voir ou de revoir un robot pensant, la Cour des miracles ou les Parques. Bref, dans la réécriture du xixe siècle dans laquelle la SF s'est engagée, Jubert fait entendre sa voix. Originale et jubilatoire.
Quatre mois à peine après la publication de son frénétique premier roman, Le Roi sans visage (critiqué dans Bifrost 12), Hervé Jubert revient avec ce deuxième volume de sa Bibliothèque Noire. On se souvient qu'à la fin du précédent tome, Georges Beauregard, agent du département Eugénie, découvrait que le Paris de 1860 dans lequel il évoluait n'était qu'un univers fictif, et parvenait en définitive à s'en échapper pour explorer « la marge ». Son escapade s'achève abruptement lorsque débute cette nouvelle aventure, un an plus tard, quelques jours avant l'inauguration de l'Exposition Universelle. Une Exposition que Beauregard se souvient parfaitement avoir visité, six ans plus tôt. En outre, la présence annoncée de la reine Victoria lui fait craindre le pire, d'autant plus que l'on a signalé plusieurs morts mystérieuses dans les jardins des Tuileries, précisément là où les premiers lampadaires électriques, clou de l'Exposition, ont été mis en service...
Le premier roman de Jubert détonnait dans la production courante par son inventivité et son rythme effréné. En comparaison, de prime abord, La Fête électrique déçoit quelque peu. Outre le fait que le récit peine à se mettre en place, l'intrigue qui nous est offerte ici est beaucoup plus policée que la précédente. Mais que l'on s'amuse moins ne signifie pas que l'on s'y ennuie : Jubert nous gratifie de quelques trouvailles bienvenues, de quelques personnages aussi improbables que mémorables. De plus, ce pseudo-Paris du Second Empire — les lecteurs attentifs pourront s'amuser à repérer les quelques anachronismes qui parsèment le texte, renforçant le côté décalé de cet univers — s'avère être un décor de choix pour les aventures rocambolesques que met en scène l'auteur. À la croisée des genres, quelque part entre science-fiction, fantasy, steampunk et fantastique, La Bibliothèque Noire confirme donc qu'elle est certainement la série la plus rafraîchissante du moment.