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Terre il faut mourir

James BLISH

Titre original : Galactic cluster, 1959
Première parution : New York, USA : Signet, 1959   ISFDB
Traduction de Michel DEUTSCH
Illustration de Pascal MORET

DENOËL (Paris, France), coll. Présence du futur précédent dans la collection n° 50 suivant dans la collection
Dépôt légal : mai 1988, Achevé d'imprimer : mai 1988
Réédition
Recueil de nouvelles, 256 pages, catégorie / prix : 6
ISBN : 2-207-30050-1
Format : 10,8 x 17,8 cm
Genre : Science-Fiction


Quatrième de couverture
De mort naturelle ou de mort violente, il faudra bien, sans doute, que la Terre meure un jour. Cependant, d'ici là, même s'ils ne parviennent jamais à embrasser le temps dans la vision panoramique que leur donnerait l'omniscience, les hommes peuvent espérer avoir colonisé assez de planètes pour que la fin de la Terre ne signifie pas la fin de l'humanité. Mais le prix de cette conquête de l'inconnu — conquête simultanée de l'espace et du temps — est souvent l'équilibre mental de ceux qui la tentent.
Huit récits ingénieux et profonds, par l'auteur du célèbre Un cas de conscience.

L'auteur :
Écrivain américain né en 1921 et mort en 1975, James Blish a souvent nourri son talent des théories scientifiques ou philosophiques les plus avant-gardistes de son temps, ce qui lui a valu d'être surnommé "l'intellectuel de la S.-F.". Présence du Futur a publié de lui plusieurs recueils de nouvelles et romans, dont l'extraordinaire tétralogie des Villes nomades.

Sommaire
Afficher les différentes éditions des textes
1 - Les Pompe-cervelles (Tomb Tapper, 1956), pages 7 à 35, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
2 - L'Affaire du VS 1 (King of the Hill, 1955), pages 37 à 52, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
3 - Sautes de temps (Common Time, 1953), pages 53 à 81, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
4 - Oeuvre d'art (Art-Work / A Work of Art, 1956), pages 83 à 105, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
5 - Le Joueur de flûte (To Pay the Piper, 1956), pages 107 à 127, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
6 - Les Étoiles sont des prisons (Nor Iron Bars, 1957), pages 129 à 173, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
7 - Bip (Beep, 1954), pages 175 à 224, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
8 - Terre, il faut mourir (This Earth of Hours, 1959), pages 225 à 254, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition DENOËL, Présence du futur (1961)

    James Blish est un homme aux talents multiples. Il commença par étudier la biologie avant de se mettre à écrire, et cette dernière occupation le conduisit dans le domaine de la poésie aussi bien que dans celui de la science-fiction. Il s'occupa de « public relations », et il lui arriva également de composer de la musique. À quarante ans, il compte indubitablement au nombre des écrivains les plus brillants de la science-fiction actuelle. S'il n'est pas exclusivement composé de chefs-d'œuvre, le présent recueil est néanmoins d'un niveau très élevé, et il donne au lecteur une idée de la diversité des cordes composant l'arc littéraire de James Blish.

    Les moins réussies de ces nouvelles sont « L'affaire du VS-1 » et « Le joueur de flûte ». Ce sont cependant des récits construits avec adresse – le premier utilise le suspense créé par un militaire dément qui, seul sur un satellite artificiel, croit devoir bombarder Washington, alors que le second brosse un décor plausible de vie souterraine, rendue nécessaire par les conséquences d'une guerre bactériologique – et c'est surtout par comparaison avec les autres nouvelles du livre qu'ils semblent quelconques. 

    « Sautes de temps », « Les étoiles sont des prisons » et « Terre, il faut mourir » racontent trois épisodes d'une histoire commune, celle de la conquête de l'espace intersidéral. Dans le premier de ces récits, James Blish évoque avec une vraisemblance hallucinante les sensations d'un pilote pour lequel le temps paraît se dilater puis se contracter ; le second combine avec une ingéniosité considérable les thèmes du voyage intersidéral, de l'exploration de l'infiniment petit et de la communication télépathique, tandis que le troisième montre l'humanité en présence d'une race qui, tout en étant dépourvue d'intelligence, règne sur la plus grande partie de la Galaxie. Dans chacune de ces histoires, le dosage des divers éléments demeure à peu près constant, et donne une idée des préoccupations dominantes de l'auteur. La situation scientifique est minutieusement évoquée, rendue perceptible au lecteur par l'abondance et la précision des détails ; les personnages demeurent assez sommairement esquissés, et leur caractère n'a pas d'influence directe sur l'évolution de l'action ; enfin, le problème à résoudre – problème d'ordre scientifique – est énoncé avec clarté, de même que les raisons qui justifient le choix de la solution. Cette dernière, en revanche, n'intéresse que très modérément l'auteur : dans le second et le troisième de ces récits, James Blish se contente d'indiquer comment ses personnages s'y prendront pour se tirer d'affaire ; il ne montre pas en détail le processus de l'opération. C'est là l'attitude d'un homme qui fait confiance à l'humanité, et qui s'intéresse davantage aux grands mouvements par lesquels celle-ci progresse, plutôt qu'aux exploits individuels de ses héros. Dans sa trilogie (« Year 2018 », « Earthman come home » et « The triumph of time ») qu'on souhaiterait voir traduite en français dans son ensemble, on assiste à un phénomène analogue, sur une plus grande échelle : Blish ne s'attache aux personnages que dans la mesure où ils jouent un rôle – positif ou négatif – dans le progrès de l'ensemble.

    Il ne faut cependant pas s'exagérer la simplicité des personnages créés par James Blish : « Œuvre d'art », par exemple, est un véritable chef-d'œuvre dans lequel l'auteur imagine ce que seraient les impressions et les réflexions de Richard Strauss s'il revenait à l'existence au XXIIe siècle. Le portrait qui nous est présenté du compositeur de « Till Eulenspiegel » est extrêmement vivant, et Blish témoigne de connaissances musicales solides. On se demandera peut-être où est la place de la science-fiction dans un tel récit ; il est difficile de répondre précisément à une telle question sans dévoiler l'excellent effet de chute ménagé par l'auteur. Mais que l'on veuille bien croire que « Œuvre d'art » se rattache, indubitablement, au genre littéraire qui nous occupe – et même que ce récit mérite d'en devenir un classique. 

    Des deux récits restants, le premier, « Les pompe-cervelles », est un tableau assez sinistre, mais construit avec art : on y voit des savants s'efforçant, très littéralement, de pomper les cervelles des morts, en vue d'en extirper les connaissances qui pourront servir les intérêts de leur pays. Sans verser dans le grand-guignolesque, James Blish traite ce sujet étrange avec dextérité, et évite d'exagérer le caractère sinistre du fond devant lequel ses héros évoluent.

    « Bip », enfin, constitue une variation extrêmement ingénieuse sur le thème de l'homme qui connaît l'avenir. James Blish ne recourt aucunement au fantastique, mais exploite uniquement un certain nombre de données scientifiques. Il possède à un haut degré l'art de mener insensiblement son lecteur des faits réels aux extrapolations imaginaires, et l'angle par lequel il aborde son récit n'est pas moins original que la teneur de celui-ci.

    La diversité des thèmes présentés dans ces nouvelles, ainsi que la variété de leurs traitements, montrent que James Blish est une sorte de caméléon parmi les auteurs de science-fiction. Parti d'une conception assez van vogtienne – celle du héros qui ignore les limites exactes de ses pouvoirs, comme aussi la situation précise du conflit dans lequel il doit intervenir – qu'il développa dans un de ses premiers romans importants, « The warriors of day ». il en vint à une vision dans laquelle la science conditionnait la plupart des relations, et dictait l'optique du narrateur. Il en est parfois résulté une certaine froideur à l'égard des protagonistes ; non certes que ceux-ci fussent tenus pour négligeables, mais leurs destinées étaient considérées dans la limite où elles contribuaient à régler celles de leurs semblables.

    Tel est le cas, dans ce recueil, de Garrard, le héros de « Sautes de temps » : il est le premier homme à revenir après un voyage qui l'a emmené dans un autre système planétaire (et, à ce propos, il faut féliciter Michel Deutsch pour l'intelligence avec laquelle il a traduit la syntaxe et les néologismes introduits par James Blish en marge de ce séjour sur le monde lointain), il a donc toutes les chances de laisser son nom dans l'Histoire. Or, que savons-nous de lui ? À part la lucidité de son esprit et son intégrité foncière, bien peu de chose en vérité. Garrard est typique d'une optique particulière, qui serait celle de Blish-le-philosophe : ce qui importe le plus à ce dernier, c'est que l'humanité aille de l'avant, et les actes de ses protagonistes l'intéressent principalement en fonction de leur rôle dans ce progrès.

    Mais il y a aussi, en James Blish, un homme sensible que nous montre « Œuvre d'art » : ce n'est pas seulement l'amateur de musique qui obtient la sympathie du lecteur, mais bien l'écrivain qui réussit à décrire d'émouvante manière les pensées d'une grande intelligence créatrice perdue loin de son époque. Et dans les plus récentes des nouvelles réunies ici – comme « Les étoiles sont des prisons » et « Terre, il faut mourir » – on sent une préoccupation croissante à l'égard de l'individualité des protagonistes. Ceux-ci sont encore assez monolithiques, mais leurs réactions sont parfaitement plausibles, compte tenu d'événements que l'auteur leur fait affronter. 

    Cet approfondissement progressif des émotions humaines constitue une preuve de l'évolution constante dont l'art de James Blish est en quelque sorte le théâtre. Sans égaler l'hallucination épique de van Vogt, l'assurant de témoin oculaire d'Arthur C. Clarkc, ou le réalisme scientifique de Robert Heinlein, James Blish combine certaines qualités de ces trois auteurs, et possède en outre une lucidité qui n'appartient qu'à lui. Il est sans doute un des auteurs de science-fiction dont l'avenir semble le plus brillant : il possède en effet de la maturité, du métier et de l'individualité, en même temps que le désir d'aller de l'avant en enrichissant son registre d'expression. Le présent recueil en témoigne.

Demètre IOAKIMIDIS
Première parution : 1/11/1961
Fiction 96
Mise en ligne le : 21/1/2025

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