De tous les auteurs contemporains, Philip K. Dick est celui dont l'influence sur les écrivains et leurs lecteurs aura été la plus profonde. Chacun de ses textes, même "de jeunesse", a sa place dans l'histoire de la littérature.
Nous entamons donc ici, par ordre chronologique, l'intégrale de ses nouvelles, soit inédites en France, soit difficilement accessibles parce que publiées dans des revues mais jamais reprises en volumes.
Connaissant son œuvre, quoi de mieux que de faire précéder les sept nouvelles de ce tome, datées de 1952 et 1953, par un texte inédit, intitulé "Comment construire un univers qui ne s'effondre pas deux jours plus tard" ?
L'auteur
Né en 1928 et mort en 1982, Philip K. Dick a laissé une œuvre considérable tant dans le domaine de la nouvelle que dans celui du roman.
De ces derniers, les plus importants sont sans doute Ubik et Le Maître du Haut-Château (Laffont).
Il s'était engagé cependant, au cours des dernières années, dans une voie assez différente avec Substance Mort et son ultime trilogie que l'on trouvera dans Présence du Futur.
1 - Emmanuel JOUANNE, Introduction, pages 7 à 8, introduction 2 - Comment construire un univers qui ne s'effondre pas deux jours plus tard (How to build an universe that doesn't fall apart two days later, 1985), pages 11 à 39, article, trad. Emmanuel JOUANNE 3 - Aux confins de l'espace guette le wub (Beyond Lies the Wub, 1952), pages 43 à 52, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 4 - Le Canon (The gun, 1952), pages 55 à 71, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 5 - Le Crâne (The Skull, 1952), pages 75 à 101, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 6 - Monsieur le Vaisseau (Mr. Spaceship, 1953), pages 105 à 140, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 7 - Le Joueur de pipeau vit tout au fond des bois (Piper in the Woods, 1953), pages 143 à 166, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 8 - Le Monde qu'elle voulait (The World she Wanted, 1953), pages 169 à 187, nouvelle, trad. Pierre-Paul DURASTANTI 9 - Colonie (Colony, 1953), pages 191 à 213, nouvelle, trad. Ben ZIMET & Christine ZIMET
Critiques
On nous annonçait il y a deux ans environ la publication prochaine par Denoël de l'intégrale des nouvelles de Philip K. Dick. Malheureusement, certains directeurs de collection (dont nous tairons les noms) ayant entre temps refusé de céder les droits des recueils qu'ils avaient publies, le projet dut être partiellement abandonné pour se réduire à une simple série de recueils compilant la totalité des nouvelles, inédites ou non, n'ayant jamais été reprises en volumes. Le Crâne n'est autre que le premier volet de cette grande saga dickienne. Nous y découvrons un Dick « première période », encore tout imprégné par ses lectures, par Van Vogt diront certains, à travers sept nouvelles de jeunesse publiées originellement entre 1952 et 1953. et traduites, à l'exception de « Colonie » (qui était déjà disponible dans Galaxie et Marginal), par Pierre-Paul Durastanti. A noter une nouvelle traduction de « Beyond lies the Wub », la première nouvelle de l'auteur ayant trouvé acquéreur, différente de celle d'Iawa Tate dans Univers n° 11.
Il n'y a malheureusement que peu de rapports entre ces textes, toujours plaisants il est vrai, et les grands romans de l'auteur (Ubik, Le Dieu venu du Centaure, Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? Le maître du Haut Château, La transmigration de Timothy Archer...). même si on y aperçoit plusieurs thèmes qu'il développera plus tard et certains de ses traits caractéristiques : son humour (« Aux confins de l'espace guette le Wub »), sa vision paranoïaque du monde et des objets (« Le canon » et « Colonie »), sa définition de l'univers (« Le monde qu'elle voulait »)...
Pas de fresques grandioses, de scènes puissantes, de séquences délirantes (à l'exception du texte clôturant le volume), on pourrait le regretter. Mais quand on sait ce qu'était la SF dans les années cinquante (voir à ce propos la vision de Dick de l'édition spécialisée à cette époque dans le numéro de Science-Fiction qui lui est consacré), on ne peut que se féliciter de la bonne tenue de l'ensemble qui. à défaut de nous passionner, nous fait passer un bon moment grâce à de bonnes et efficaces histoires classiques tenant toujours la route trente cinq ans plus tard. Que dire de plus si ce n'est que pendant ces années la SF (et Dick du même coup) a considérablement évoluée ?
Toujours est-il que le travail que nous proposent Alain Dorémieux, Pierre-Paul Durastanti et Emmanuel Jouanne devait être fait un jour ou l'autre, aussi les remercions-nous d'avance pour le second volume et les encourageons-nous à poursuivre cette vaste entreprise d'exhumation qui devrait satisfaire conjointement passionnés de Dick et amateurs de bonne Science-Fiction !