Cath et Luc ont fait quelque chose de défendu. De très défendu. Et les crabes se sont mis à sourire... Alors, ils sont partis tous les deux. Loin de leurs parents. Sur l'autoroute. Direction : le bout de la nuit. Et vite. Vite ! Vite !...
Un livre dur, sans concession. Une violence à couper le souffle. Un mépris total des interdits et des tabous. Une explosion de sang et de colère. Et surtout une dynamique, une rapidité qui vous entraînent sans vous laisser un seul instant pour respirer.
Livre déconseillé aux personnes sensibles !
Pierre PELOT : né en 1945 dans la montagne vosgienne, où il vit toujours actuellement, il a écrit en moins de dix ans plus de soixante-dix romans. Mais ce recordman de vitesse sait aussi manifester les qualités d'un remarquable styliste comme en témoignent certains de ses romans d'aventures publiés au "Fleuve Noir" sous le pseudonyme de Pierre Suragne.
Critiques
Il y a des romans, rares mais précieux, que l’on reçoit comme une gifle, des romans dont la lecture vous laisse hébétés, pantois. Le Sourire des crabes fait sans conteste partie de cette catégorie.
L’histoire est celle de Luc et Cath, frère et sœur, amants, fous à lier, désespérés, humains, monstrueux. Elle a été jugée incurable et bonne à interner par la médecine, lui ne peut envisager un seul instant la vie sans elle. Ensemble, ils vont se lancer dans une fuite en avant éperdue et meurtrière, exécutant tous ceux dont ils croiseront le chemin, hommes, femmes, enfants.
La première chose qui frappe à la lecture de ce roman, c’est sa violence, sidérante. Pierre Pelot décrit dans ses moindres détails l’errance folle de ses deux héros, sans jamais jeter le moindre voile pudique sur l’horreur de leurs actes. Cela donne des scènes de carnage prolongées jusqu’à l’insoutenable (l’attaque du restaurant, l’agonie interminable de Cath), d’autant plus éprouvantes que la plume de l’auteur y est d’une précision chirurgicale.
Mais aussi atroces soient les actes de Luc et Cath, Pelot se garde bien de les condamner – pas plus qu’il ne les absout. Il est avant tout là pour les accompagner, et permettre au lecteur de percevoir tout le désespoir et le malheur à l’origine de ces horreurs. Il n’en est que plus éprouvant de les voir au fil des pages se défaire de leurs dernières traces d’humanité comme d’une peau morte pour embrasser la monstruosité à laquelle ils se sont résignés.
Le Sourire des crabes est paru il y a bientôt quarante ans. Dans son portrait d’un état totalitaire maquillé en démocratie torpide et d’une société du spectacle recyclant les horreurs du monde en armes de distraction massive, le roman, trop caricatural et outrancier, trop marqué par l’imagerie de son époque, accuse un peu le poids des ans. En revanche, dans la description au plus près qu’il fait de ses héros, dans sa volonté affichée de donner un éclairage brut sur leur parcours et leurs actes, il n’a peut-être jamais été autant d’actualité qu’aujourd’hui.
Roman après roman, l'incroyablement prolifique Pierre Pelot s'affirme comme l'écrivain français de SF le plus violent, le plus engagé de la nouvelle génération. On peut féliciter Jacques Goimard d'avoir osé publier ce livre de Pelot refusé par J'ai Lu parce que trop vitriolé. De fait, on n'a pas souvent vu en livre de poche un livre aussi anarchiste, aussi critique, aussi politique.
Un frère et une sœur, fous tous les deux, s'enfuient d'une ville caserne pour une dernière course sur l'autoroute. Ils sèment des bombes sur leur passage et zigouillent à tour de bras : dans une société capitaliste castratrice, c'est tout ce qu'il leur reste, la violence gratuite, aveugle.
On peut ne pas être d'accord avec les analyses de Pelot qui refuse ici toute possibilité de révolution collective (un contre-pouvoir « c'est toujours un pouvoir », et les militants organisés vont « gérer » la société qu'ils veulent détruire, c'est pas très juste, non ?) à la façon des anarchistes extrémistes. Mais on ne peut que saluer sa description précise et quasi-exhaustive de toutes les contraintes sociales, travail, famille, ordre moral, armée, consommation qui sous-tendent notre société libérale.
Violence verbale, violence de l'action, furieuse histoire d'amour incestueuse : une sacrée claque. Pierre Pelot est un peu trop provocateur et manque de réalisme politique (pour changer le monde, il ne suffit pas de cramer les supermarchés), mais c'est le premier qui va aussi loin dans la SF française : un grand coup de chapeau pour 1977, l'année Pelot.