[Chronique commune à deux romans de Barbary Hambly :
Ishmaël et
Le sang d'immortalité]
1 Barbara Hambly ne s'est pas arrêtée en si bon chemin : elle a depuis fait une carrière passionnante dans le domaine de la
Fantasy (souvenez-vous de l'article que lui a consacré
Sylvie Denis dans notre
Dossier Fantasy, YS #86). En fait, je la considère comme étant un(e) des auteur(e)s les plus intéressants du genre, à l'heure actuel. Même lorsqu'elle donne dans la
Fantasy la plus « générique », elle sait toujours appliquer aux thèmes une légère distorsion, ajouter quelques points d'ironie, qui font toute la différence (voir par exemple
Fendragon, aux Presses de la Cité).
Avec
Le Sang d'immortalité, Hambly est sortie de la
Fantasy conventionnelle pour donner dans le
steampunk — cet enfant bâtard de la SF, du fantastique gothique et de Sherlock Holmes, qu'a illustré avec brio un
Tim Powers, par exemple, ou un
Brian Stableford (
Les loups-garous de Londres).
Il y a un tueur dans les rues de Londres, en ce début du siècle. Mais ses proies ne sont pas de chair mortelle. Quelqu'un tue les vampires de Londres. Quelqu'un les chasse, et les assassine alors qu'ils dorment dans leur cercueil durant le jour. Un tueur qui semble décidé à effacer toute trace de sang immortel à Londres.
James Asher, lui, n'a rien d'un vampire. C'est un citoyen britannique comme les autres, enfin, presque : accessoirement, il a été agent secret pour les services de Sa Majesté. Et c'est bien pour cela que Don Simon Xavier Christian Morado de la Cadena-Ysidro l'a choisi pour enquêter sur les meurtres de vampires. Créatures nocturnes, les vampires n'ont pas la liberté de mouvement d'un humain pour mener à bien une telle enquête.
Le Sang d'immortalité est à la fois un polar passionnant,(agréablement kitsch, comme il se doit quand on écrit dans un style à la Sherlock Holmes), et un roman d'horreur trés efficace : pas d'effets de Grand-Guignol, nulle trace de gore, Barbara Hambly joue sur du velours, bâtit l'angoisse par petites touches, sans avoir l'air d'y toucher. On avait déjà pu apprécier ses talents dans le domaine de la terreur avec la trilogie
Darwath (en français au
C.L.A. Opta), sorte d'alchimie entre
Lovecraft et
Tolkien. Cette fois on se trouve du côté de
Bram Stoker et de
Conan Doyle, et la réussite est encore plus éclatante !
On ne peut que louer l'éclectisme éclairé de
Patrice Duvic dans ses choix pour « Terreur ». Voilà enfin une collection qui n'hésite pas à régulièrement présenter des livres isolés d'auteurs (in)connus, et qui sait jouer de toute la gamme que peut lui offrir le genre fantastique moderne. Regrettons qu'il n'y ait plus aujourd'hui, en France, de collection de science-fiction aussi intelligente.
Notes :
1. Le début de la chronique, qui portait sur le roman Ishmaël, est disponible sur la fiche de celui-ci. [note de nooSFere]
André-François RUAUD (lui écrire) (site web)
Première parution : 1/3/1994 Yellow Submarine 108
Mise en ligne le : 4/3/2004