Lire les contes de ce recueil, c'est nécessairement découvrir l'envers de la réalité quotidienne — ce qui est à côté, derrière, en dessous, au-delà la crainte, la peur et bientôt l'épouvante ! Avec un talent rare et inégalé, Thomas Owen renverse toujours l'ordre des valeurs universelles en entraînant le lecteur, sans même qu'il s'en aperçoive, au cœur même du fantastique. Et souvent alors, la chose la plus anodine devient la plus monstrueuse...
1 - Pitié pour les ombres, pages 7 à 24, nouvelle 2 - Son époux regretté, pages 25 à 35, nouvelle 3 - Le Coffret, pages 37 à 48, nouvelle 4 - Passage du Dr Babylon, pages 49 à 60, nouvelle 5 - Métamorphose, pages 61 à 72, nouvelle 6 - La Montre, pages 73 à 82, nouvelle 7 - Les Vilaines de nuit, pages 83 à 92, nouvelle 8 - Les Petites filles modèles, pages 93 à 102, nouvelle 9 - Lumineuse dans la nuit, pages 103 à 111, nouvelle 10 - Et la vie s'arrêta..., pages 113 à 124, nouvelle 11 - L'Assassinat de Lady Rhodes, pages 125 à 135, nouvelle 12 - Nocturne, pages 137 à 147, nouvelle 13 - Donatienne et son destin, pages 149 à 157, nouvelle 14 - Fantôme es-tu là ?, pages 159 à 170, nouvelle 15 - Villa à vendre, pages 171 à 186, nouvelle
Critiques
Critique tirée de la rubrique « Diagonales » signée par Alain Dorémieux
Quatrième recueil de Thomas Owen chez Marabout, après La cave aux crapauds, Cérémonial nocturne et La truie. Ce qui veut dire que l'essentiel de l'œuvre du grand conteur belge a été ces dernières années rendu disponible pour le public français Pitié pour les ombres rassemble une quinzaine de nouvelles relativement récentes (leur rédaction remonte en générai aux années cinquante ou soixante). Contrairement aux textes plus anciens de l'auteur (ceux qu'on trouvait principalement dans La cave aux crapauds et en partie dans Cérémonial nocturne), ils ne jouent pas tellement sur les registres de la terreur et de l'horreur ; ils sont plutôt des flâneries dans les domaines de l'inquiétude, et s'ils touchent à l'angoisse, c'est avec une nonchalance élégante. Mais qu'on ne s'y trompe pas : derrière cet air de ne pas y toucher, Owen garde l'art de susciter, en une phrase ou en quelques mots, le petit frisson qui fait que par la suite son lecteur cessera de se sentir à l'aise. Tout cela comme si de rien n'était, en sourdine, et en maniant au suprême degré l'ambiguïté et le sous — entendu, au point que dans certains contes c'est vraiment entre les lignes qu'il faut chercher le pourquoi des choses. Le fantastique à ce stade devient un exercice de virtuose : c'est à la fois la force d'Owen et sa limitation. Il n'a plus l'air de se sentir tellement concerné par ce qu'il écrit ; il s'adonne au fantastique en artiste et en dilettante. Il nous communique certes ses fantasmes et ses refoulements, mais avec une pudeur distanciée qui les met sous vitrine. On aimerait qu'il cède par moments à un peu plus de folie.