J'AI LU
(Paris, France), coll. Fantasy (2000 - 2007) n° 7362 Dépôt légal : septembre 2004, Achevé d'imprimer : 15 septembre 2004 Roman, 384 pages, catégorie / prix : L ISBN : 2-290-32530-9 Format : 11,0 x 17,8 cm✅ Genre : Fantasy
A Newdon, dans le fog, John Moon traîne un spleen spectaculaire depuis que sa carrière d'entraîneur sportif, couronnée par une énième et ridicule défaite, vient brusquement de prendre fin. Si encore il était capable de se suicider correctement ! Mais voici qu'une fâcheuse contrariété vient bousculer ses plans : possédée par le diable, la reine elle-même décide d'ouvrir la porte des enfers pour déchaîner le mal sur le monde. Désigné par un sort facétieux pour juguler ce terrifiant péril, notre brave John est contraint de s'adjoindre les services d'Oriel Vaughan, un elfe magicien incurablement médiocre, de Gloïn MacCough, un nain neurasthénique, et de Gryphius le dragon — petit, domestique et totalement imprévisible. Euh... Et ça se termine bien ?
Fabrice Colin
est né en 1972. Infatigable explorateur des sentiers du merveilleux, il en propose une vision tour à tour féerique (Winterheim) ou romantique (Vestiges d'Arcadia), pour les plus jeunes (Les Enfants de la lune) ou les adultes (Dreamericana), le tout servi par une exceptionnelle maestria narrative. Avec A vos souhaits, il nous offre une aventure rocambolesque à l'humour « so british », absurde et délicieusement farfelu, que ne renierait pas Terry Pratchett.
Bienvenue à Londres. Ou plutôt à Newdon, équivalent victorien et fantaisiste de la capitale anglaise. Dans ses rues, on peut croiser des elfes, des nains, des trolls, etc. Les Anglais s'y passionnent pour un jeu violent, croisement improbable entre Rollerball, le Risk et le football américain. John Moon est l'entraîneur d'un des clubs du championnats, les Ogres de Chelsey. Un entraîneur plutôt malchanceux, d'ailleurs : son équipe se morfond dans les profondeurs du classement, ses jours à son poste sont comptés, et par-dessus tout ça, voilà que deux de ses amis, le nain Gloïn et l'elfe Vaughan – le seul de sa race à ne pas être doué pour la magie – s'accrochent à ses basques.
Non, vraiment, rien ne va pour John Moon dans le monde de Newdon. Heureusement pour lui (si l'on peut dire), sa ville va être le théâtre d'un affrontement magistral entre le Diable et les trois déesses tutélaires de la cité : la Nature, la Magie et la Mort. Et John Moon aura son rôle à jouer dans ce combat épique...
Dès la première page, qui porte la mention « ce roman est totalement dépourvu de cochon », on est mis dans le bain : roman humoristique il y aura. Humour décalé, nonsense comme l'apprécient habituellement, dit-on, les Anglais. Aussi Fabrice Colin fait-il feu de tout bois : personnages truculents et attachants (mention spéciale à John Moon, Vaughan et Horatius), situations toujours plus cocasses (ah, les scènes de la Fédération Omnisciente pour la Libération d'une Irréalité Eventuelle, où tous portent des masques d'animaux), obsession saugrenue pour le cochon. Mais parfois, il est bon de ne pas trop enrichir le plat principal au détriment des autres mets du repas. Ici, l'intrigue est mince, qui rejoue l'habituel affrontement entre deux divinités, et où les hommes ne sont que fétus de paille. Encore saura-t-on gré à Colin de ne pas être trop manichéen : s'il faut choisir entre le Diable et la Mort, que faire ?
L'autre faiblesse du roman, ce sont les dialogues, drolatiques mais omniprésents. Colin ne parvient pas à trouver l'équilibre entre dialogues et narration, et ne fait progresser l'intrigue que par le biais des premiers.
Bref, ce roman vaut la peine d'être lu pour son cadre insolite et son parti pris d'humour débridé (pas si courant que ça parmi les romans français). Le lecteur passera ainsi un agréable moment, fort divertissant, même si il peut se lasser des dialogues au fil des pages.
Direction Londres ou plutôt Newdon, une cité victorienne à souhait où humains et créatures magiques se côtoient. Ainsi le promeneur pourra croiser dans une ruelle embrumée Jack l'Eventreur, Sherlock Holmes, Oscar Wilde, Lewis Carroll mais aussi l'ogre des bas-fonds ou un célèbre charmeur de dragons. C'est aussi à Newdon que vit John Moon qui, lorsque débute cette histoire rocambolesque, est au plus bas de sa forme : il n'a plus un seul crédit en tant qu'entraîneur sportif et son avenir est bien sombre. Pourtant, avec trois autres créatures sans avenir non plus, il va devenir un héros et peut-être même sauver le monde. Avec l'elfe Vaughan, qui vient de tripler sa première année de magie, Gloïn MacCough, un nain qui n'a rien d'un nain de jardin car il n'a pas la main verte et Gryphius, un petit dragon domestique déprimé, notre John Moon se lance à la poursuite du Diable qui s'est emparé de la volumineuse personne de sa très gracieuse majesté Victoria pour conquérir le monde. Un roman vraiment jubilatoire, mené tambour battant, animé par une galerie de personnages tous plus drôles les uns que les autres, à ne rater sous aucun prétexte. De l'excellente fantasy, tonique, humoristique, à ne rater sous aucun prétexte. A partir de 14 ans.
Il n'aura pas fallu longtemps à Stéphane Marsan, un an environ, pour créer sa maison d'édition après son départ houleux des éditions Mnémos qu'il avait fondées et dirigées en association avec la boîte de jeux de rôles Multisim. Associé à Alain Névant, il lance Bragelonne avec trois titres sur octobre-novembre 2000 et annonce un roman d'Henri Loevenbruck et un autre de David Calvo (parus à l'heure où vous lisez ces lignes). Force est de constater que la maquette est particulièrement malheureuse, estampillée d'un logo Bragelonne apte à faire travailler les zygomatiques de n'importe quel acheteur de bouquins doté d'un minimum de matière grise. Les couvertures, à l'exception du Légende de David Gemmell, sont moches ou tristes. Pour ce qui est de la composition intérieure des livres, pas de quoi pavoiser : des titres courants trop hauts, un interlignage trop grand pour un corps de caractères trop petit sur le Colin et le Gemmell, de nombreuses fautes de typo, d'orthographe, de grammaire qui gênent la lecture (principalement sur le Gaborit) 1.
Mais passons aux textes...
Avec À vos souhaits, Fabrice Colin livre un roman humoristique des plus honnêtes qui mélange allègrement le steampunk et la fantasy. Le Diable est en virée ! Youpi, sauf qu'il est parti de chez lui en laissant les clés à l'intérieur. L'action se situe à Newdon (sorte de Londres halluciné) et nous est contée par un calamiteux entraîneur sportif : John Moon. On s'amuse, on s'ennuie, ça tombe parfois à plat, on est souvent époustouflé par la facilité de l'auteur... Et au final À vos souhaits s'impose comme la copie fainéante d'un élève surdoué, lorgnant un peu trop du côté du duo Pratchett/Gaiman de De Bons présages (J'ai Lu). Fabrice Colin ne livre pas encore son grand livre, mais remplit mieux son contrat qu'Alain Névant (le traducteur de Légende) et Mathieu Gaborit, l'autoplagiaire-peut-mieux-faire.
Reste que Bragelonne est une maison d'éditions toute jeune qui se lance dans de la traduction dès le départ, chose ardue s'il en est. Voilà, bien sûr, une entreprise à soutenir. En achetant par exemple le livre de Fabrice Colin qui, même s'il n'est pas exempt de défauts, reste le plus plaisant, le mieux écrit de cette première livraison de trois titres. La parution de Coeur de Phénix est aussi l'occasion de lire Bohème, beau diptyque passé inaperçu qui prouve que Mathieu Gaborit mérite le public qu'il a su gagner.
Notes :
1. La chronique portait sur les trois premiers romans publiés par les éditions Bragelonne : Légende de David Gemmell, Coeur de Phénix de Mathieu Gaborit et À vos souhaits de Fabrice Colin. La partie portant sur les deux autres livres n'est pas reprise ici. Se reporter aux pages traitant de ces ouvrages. (Note de nooSFere)