Frank Miller avait toujours aimé la mort. Ses prothèses, ses masques et ses corps mutilés en mousse de latex étaient tellement réalistes que tous les producteurs de films d'horreur faisaient appel à lui. Seulement, un jour, Frank perdit un œil sur un plateau de cinéma en voulant régler un effet spécial. Une greffe le lui rendit mais rien, désormais, ne fut plus comme avant. Car l'œil greffé de Frank Miller voyait au-delà de la vie, au-delà de la mort. Il voyait les victimes à venir du plus pervers des assassins... Et c'était un spectacle dépassant en horreur tout ce qu'il aurait pu imaginer.

     [Critique des 2 premiers livres de la collection Maniac :

     Victimes par Shaun Hutson et Un festin de rats par Berma

note nooSFere]

     MANIAC est le nom de la nouvelle collection de Fantastique qui vient de voir le jour aux éditions Patrick Siry. Dirigée par Daniel Riche, qui fut pendant plusieurs années le directeur de la collection Gore, Maniac nous proposera chaque mois un choix des meilleurs spécialistes britanniques et américains et tentera de révéler et promouvoir une véritable « école » française de la littérature de l'horreur. Selon les dires de Patrick Siry, l'objectif de Maniac est de combler un manque dans l'édition populaire. « Il manque dans le paysage éditorial français une série qui, tout en étant soucieuse de qualité littéraire, privilégie le rythme, l'audace et la provocation là où d'autres préfèrent l'atmosphère, l'angoisse ou... la dérision. Tel est le projet de Maniac, une collection revendiquant haut et fort, dans son contenu comme dans sa présentation, les liens qui la rattachent aux séries B du grand comme du petit écran ».

     Rapide, moderne, audacieuse, novatrice, ainsi se veut la nouvelle collection de Patrick Siry.

     Rapide parce que l'horreur ne souffre pas de temps mort (donc Maniac publiera des romans courts semblables à ceux de la collection Gore).

     Moderne parce que les histoires proposées par Maniac se déroulent aujourd'hui, dans des décors familiers, avec des personnages terriblement proches.

     Audacieuse parce que Maniac ira puiser la matière de ses romans aux sources vénéneuses de nos plus effroyables cauchemars, la seule règle imposée aux auteurs de la collection est de ne pas en avoir afin d'explorer l'horreur au-delà de ses dernières limites.

     Novatrice enfin parce que Maniac entend offrir à ses lecteurs des romans tels qu'ils n'en liront nulle part ailleurs.

     Une précision encore pour signaler que toutes les couvertures de la collection seront signées Gourdon. les « Anciens » se rappelleront des magnifiques couvertures de la défunte collection Angoisse. Aussi est-ce une très bonne initiative que d'avoir fait appel à ce grand dessinateur populaire. On ne pouvait pas trouver mieux. Gourdon, c'est la classe !

     Reste à savoir ce que valent les premiers numéros de cette nouvelle collection. Pour l'inaugurer, Daniel Riche a choisi une valeur sûre, le jeune prodige anglais Shaun Hutson, déjà connu des lecteurs de la collection gore puisque plusieurs de ses romans y ont été publiés. « Victimes » ne diffère guère des autres productions de l'auteur. Même style, même manière de raconter une histoire et de mettre en place une atmosphère insolite, avec une intrigue qui se dévoile progressivement pour aboutir au coup de théâtre final.

     Un spécialiste en effets spéciaux perd un œil pendant le tournage d'un film fantastique. Une opération révolutionnaire lui permet de retrouver l'usage de son œil perdu, mais l'œil qu'on lui a greffé est celui d'un meurtrier. Dès lors, son comportement va changer et il découvrira en lui un pouvoir extraordinaire, celui de savoir à l'avance quelles seront les futures victimes du destin, don très pratique et très inquiétant à la fois, surtout lorsque la personne que l'on aime compte parmi les prochaines victimes.

     Rien à redire, ce livre de Shaun Hutson est bien ficelé et réussit à nous tenir en alerte d'un bout à l'autre.

     Shaun Hutson s'affirme de plus en plus comme l'un des meilleurs auteurs de Fantastique populaire d'Outre-Manche.

     Passons maintenant à la production française, « Un festin de rats », signé Berma, première interrogation : qui est Berma ? Pourvu que ce ne soit pas un pseudonyme des Verteuil !... Je dis cela parce que « Un festin de rats » ressemble à du Verteuil (ce qui n'est pas un compliment). J'ose donc espérer que l'équation Berma = Verteuil s'avérera fausse. Ce livre raconte l'histoire d'une femme qui se débarrasse des personnes gênantes de son entourage en les donnant en pâture à des rats, après les avoir mutilées quelque peu (c'est là où on verse dans des scènes hémoglobinesques qui auraient pu nous être épargnées). Et puis, il y a le directeur des « Ormes », une maison de retraite pour personnes âgées. Cet homme est un sadique irrécupérable qui n'hésite pas à provoquer la mort des vieillards trop encombrants pour leur famille, en échange d'espèces sonnantes et trébuchantes. Berma a su nous décrire un beau salaud ; dans le genre escroc, on ne fait pas mieux. Question psychologie des personnages, Berma s'en sort plutôt bien. Mais ce livre, qui aurait pu être une réussite, car tous les ingrédients étaient là, n'arrive pas à convaincre pleinement. Demi-réussite, demi-échec. Le récit commençait pourtant bien avec un début d'intrigue prometteur, malheureusement, les relents putrides et sanguinolents du gore de bas étage sont venus ternir ce qui aurait pu être un bon roman fantastique. Le ketchup (cette horreur infecte qui traduit le mauvais goût des anglo-saxons en matière culinaire) gâte les plats les plus fins comme l'abondance d'hémoglobine gâte un bon livre (ou un bon film). Assez d'hémoglobine, qu'on se le dise ! Arrêtez l'hémorragie, de grâce !

     Difficile donc de se prononcer pour cette nouvelle collection. Attendons la suite...