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Le Double corps du Roi

Ugo BELLAGAMBA & Thomas DAY

Première parution : Paris, France : Mnémos, coll. Icares, juin 2003

Illustration de Guillaume SOREL

GALLIMARD (Paris, France), coll. Folio SF précédent dans la collection n° 278 suivant dans la collection
Date de parution : 10 mai 2007
Dépôt légal : avril 2007, Achevé d'imprimer : 10 avril 2007
Réédition
Roman, 402 pages, catégorie / prix : F9
ISBN : 978-2-07-034194-8
Format : 10,8 x 17,8 cm
Genre : Fantasy

Édition révisée.


Ressources externes sur cette œuvre : quarante-deux.org
Ressources externes sur cette édition de l'œuvre : quarante-deux.org

Quatrième de couverture
     À Déméter, la monarchie se meurt. Absû Déléthérion, général ambitieux, assassine le vieux roi Yskander et se proclame régent. Pour asseoir son règne, il a besoin de l'armure fabriquée jadis par le Dieu-Forgeron, symbole de la légitimité monarchique : l'Hérakléion. Malheureusement pour le régicide, Égée Seisachtéion, poète et bretteur hors pair, confident d'Yskander, s'empare de l'armure. Aidé du contrebandier Johan Solon, il la cache dans la Canopée, royaume sylvestre réputé impénétrable, où vivrait un héritier au trône. La lutte contre le despote Déléthérion s'engage, inégale, sanglante, désespérée...
     Inspiré des travaux de l'historien Kantorowicz, Le double corps du roi est un roman de fantasy épique où les drames intimes se résolvent en batailles d'un réalisme stupéfiant. Un livre grand spectacle, à couper le souffle.
 
     Quand il n'enseigne pas l'histoire du droit et des idées politiques à l'université de Nice, Ugo Bellagamba écrit. On lui doit de nombreuses nouvelles et deux romans en collaboration avec Thomas Day (L'Ecole des assassins et Le double corps du roi). Né en 1971, ce dernier s'est imposé en quelques années comme l'un des auteurs les plus passionnants de l'imaginaire francophone.
Critiques

    Royaume de Déméter. Le roi Yskander est assassiné par l’ambitieux général Déléthérion, qui lui reproche d’affaiblir la monarchie et pense être l’homme idéal pour la restaurer. Si Déléthérion, qui se proclame Régent, est assisté dans l’exécution de son forfait par les Eizihils, de terrifiants insectoïdes carnassiers, Yskander avait su gagner l’amour et la loyauté d’Égée Seisachtéion, poète et bretteur, qui assiste à l’assassinat et n’aura dès lors de cesse de renverser l’usurpateur et d’installer sur le trône la fille cachée d’Yskander, Eiroénée. Commence alors, pour le poète puis pour ses poursuivants, un voyage vers la Canopée, refuge de la jeune fille et société utopique qui tente de vivre en harmonie avec la Nature. Un voyage qui transformera le monde.

    Le Double corps du roi s’inspire librement de la théorie des deux corps du roi de Kantorowicz. Le roi, dit l’historien, a deux corps : un corps physique, faillible et mortel, et un corps politique, le corps immortel du royaume. Le roi n’est roi que parce qu’il transcende son enveloppe mortelle pour habiter celle, immortelle, du royaume : « Terre et roi sont un. » Dans le royaume de France, c’est le sacre qui réalisait cette forme particulière de transsubstantiation ; à Déméter, c’est la fusion avec l’Heraklion, l’armure magique de quartz habitée par le souffle divin, qui assure la continuité temporelle du royaume en confrontant chaque roi aux mémoires de tous ceux qui le précédèrent.

    Alors, quand Égée s’enfuit avec l’armure et l’apporte à Eiroenée pour qu’elle la revête, il crée une situation qui ne peut se résoudre que dans la guerre, car de son sacre l’usurpateur ne peut être privé s’il veut régner vraiment.

    Que reprochaient Déléthérion et son allié, le Pontife Théagénès, à Yskander ? D’avoir commencé à se détourner de la tradition pour réformer le royaume dans le sens d’une plus grande justice. Il le paya de sa vie, l’ambitieux général voulant « restaurer » une monarchie inégalitaire aux allures d’autocratie, et le Pontife rêvant d’installer une oligarchie qu’il pourrait, via l’Église, contrôler – deux glaives, c’est un de trop pour une alliance qui ne pourra durer. C’est donc dans une lutte pour la justice et la liberté, pour une réforme et la sortie d’une tradition sclérosante, que s’engagent Égée et ses alliés. Une lutte qui sera violente comme l’est la société démétérienne, une lutte qui se déportera jusque dans la paisible Canopée.

    Le Double corps du roi est une histoire de réunions et de fusions. Après les emprisonnements, les tortures et la guerre, la solution ne peut venir d’une victoire à la Pyrrhus qui assèche autant la techniciste Déméter que la frugale Canopée. Pour triompher, il faudra que deux peuples séparés par le temps se rapprochent – aidés en cela par deux sangs-mêlés –, que la part féminine de l’humanité retrouve sa juste place, que la société de caste démétérienne, fracturée par un système de tripartition, soit refondée sur des bases plus égalitaires, et que les domaines divins même se réunissent enfin. Il faudra pour cela un sacrifice, au sens littéral du terme, c’est à dire un passage au sacré.

    Le Double corps du roi est donc un roman de fantasy scientifique passionnant qui mêle théorie politique et action violente, mais aussi amour véritable, dont certains passages rappellent Conan et sa frénésie guerrière ou Elric et ses bretteurs ironiques, et qui, enfin, propose un message d’élévation spirituelle et sociale par une union raisonnée entre la tradition et le mouvement.

Éric JENTILE
Première parution : 1/10/2020 dans Bifrost 100
Mise en ligne le : 21/5/2024

Critiques des autres éditions ou de la série
Edition MNÉMOS, Icares (2003)

     Parce qu'il juge son monarque vieux et pusillanime, faible et sans grandeur, qu'il veut redonner à sa cité, Déméter, sa puissance d'en temps, le général Déléthérion fomente un coup d'état sanguinaire. Grâce à l'appui de l'armée et son association avec les Eizihils, un race insectoïde sur le déclin, il parvient à ses fins en une journée, balaye la monarchie et prend le pouvoir. Il va désormais lui falloir composer avec les instances religieuses de la cité-état, qui se verraient bien à la tête d'une théocratie, et surtout mettre la main sur l'Héraklion, armure-relique symbole du pouvoir monarchique de Déméter disparue lors du coup d'état, un artefact aux pouvoirs immenses dépositaire de la mémoire de tous les rois passés de la cité...

     Le Double corps du roi est, après L'Ecole des assassins (le Bélial'), le second roman que nous devons à l'association de deux de nos jeunes auteurs les plus doués : Thomas Day, qui a fait davantage que confirmer en une dizaine de livres (le présent Bifrost en est une preuve supplémentaire), et Ugo Bellagamba, plus vert que son comparse, mais qui nous a dores et déjà montré toute son ambition dans le recueil La Cité du Soleil (le Bélial'). Un livre attendu, donc, avec comme toujours dans pareil cas le risque de la déception. Et nous n'y coupons pas. Ou tout du moins pas totalement. Car Le Double Corps du roi souffre de défauts patents, ce qui ne lasse pas d'énerver quand pareil constat s'applique à un ouvrage qui aurait pu être épatant.

     Le livre nous raconte l'histoire d'un coup d'état, des bouleversements qu'il implique, de la résistance qui s'organise autour de cet événement et des motivations des personnages qui se trouvent happés par le flot de l'Histoire. Un sujet classique mais ambitieux. Il y a de la dualité dans ce Double corps. Manichéisme bien sûr, mais pas uniquement : impérialisme face au monarchisme ; conservatisme et progressisme ; science et nature (la science étant plutôt le mal et la nature, ou « l'état de nature », le bien — un symbolisme de base répandu dans nos société modernes et finalement assez réac') ; fausse religion et vraie foi ; dualité des personnages tiraillés entre leurs origines et le nouveau monde qu'ils découvrent, leur vision éthique et politique et leur environnement social, familial... Finalement rien n'est simple et c'est tant mieux, le mal à ses raisons et peut se justifier : méfions nous des visionnaires. Alors ?

     Alors à l'ampleur des personnages, leur épaisseur, leur complexité, on opposera la puérilité de certaines de leurs réactions, l'invraisemblance crispante, ça et là, de leurs propos. Mais ceci relève du détail. Plus gênant est le fait qu'on ne saisit pas pourquoi, dès le début du livre, alors qu'Egée dispose de l'Héraklion, cette armure qui fait de lui un espèce de super héros, un Iron Man invincible, il ne s'en sert pas pour balayer les putschistes. Ou plutôt si, il s'en sert, un peu... Puis on nous explique que pour des questions morales, vraiment, il ne peut pas, non, vous comprenez, c'est pas bien, quoi, faut réserver ça au messie, et le messie, ben c'est pas lui... Mwouais. Et puis surtout, le plus handicapant, c'est cette construction en trois parties centrées autour de trois personnages différents (mais semblables, en fait), cette fausse disparité qui fait qu'on se retrouve avec des actes héroïques mais pas de héros, un paradoxe alors que le livre tout entier est un appel au héros. Du coup les moments de bravoures se succèdent mais, en fait d'un ouragan épique qui nous porterait du début à la fin, ce n'est qu'une succession de bourrasques — dommage, vraiment, même si certaines de ces bourrasques n'en sont pas moins magistrales... On ne peut se départir de l'idée que les auteurs sont restés le cul entre deux choix narratifs : un point de vue éclaté à travers une véritable multiplicité de personnages (et plus aucun héros, juste des acteurs/spectateurs), et un unique point de vue (ou deux, disons, celui du régicide et celui qui s'y oppose) jouant pleinement la carte de l'héroïsme... Las.

     On l'a dit : on reste quelque peu déçu face à se livre ambitieux qui promettait plus qu'il ne donne. Demeure toutefois un roman qui se lit d'une traite, inscrit dans un univers au substrat politique et géographique riche et savoureux, le tout ponctué de scènes marquantes. Alors on lit, oui, on apprécie, aussi, même si on regrette, un peu...

ORG
Première parution : 1/10/2003
dans Bifrost 32
Mise en ligne le : 9/1/2005

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