LIVRE DE POCHE
(Paris, France), coll. Stephen King n° 15165 Date de parution : 9 mai 2007 Dépôt légal : mai 2007, Achevé d'imprimer : avril 2007 Réédition Roman, 608 pages, catégorie / prix : 7,50 € ISBN : 978-2-253-15165-4 Format : 11,0 x 17,8 cm Genre : Fantastique
Un homme et une femme font l'objet d'une expérience scientifique ultra-secrète du gouvernement américain sur les pouvoirs psychiques. Tout a été prévu, sauf que cet homme et cette femme auraient un an plus tard une fille : Charlie... Elle a huit ans, elle peut anéantir le monde ; il lui suffit de vouloir... Le pouvoir envoûtant d'un des plus grands romans de Stephen King, le génie de l'épouvante.
Angoissant au possible, Charlie est peut-être le meilleur des Stephen King parce qu'il est aussi un roman tendre et un hommage merveilleux à l'enfance.
Sylvie Genevoix, Lire.
[...] Charlie, la petite fille au charme incendiaire, un nouveau monstre qui nous hypnotise.
Marie Claire.
Critiques
« Ma femme raconte encore avec délices comment son mari, la première fois où il fit son devoir de citoyen, à l’âge encore tendre de vingt et un ans, vota aux élections présidentielles pour Richard Nixon. “Nixon avait dit qu’il avait un plan pour nous sortir du Vietnam, conclut-elle avec d’ordinaire une petite lueur moqueuse dans l’œil, et Steve l’a cru !” » – Stephen King, Introduction à Rêves et cauchemars
Les années 70 furent riches en électrochocs pour la population américaine : au Flower Power succédèrent l’affaire du Watergate et les révélations sans fin apparente sur l’affaire MK-Ultra. Ce projet, mené illégalement par la CIA dès 1953, fut dévoilé au public à partir de 1975 : il consistait notamment en l’étude des manipulations mentales. Les expériences allèrent de l’injection de LSD à des sujets plus ou moins avertis, à des actes de pédophilie destinés à favoriser les troubles dissociatifs de la personnalité chez les jeunes enfants.
En 1977, Stephen King termine le premier jet de deux romans très influencés par cette période bien trouble : un premier, Dead Zone, où il règle son compte à l’homme politique providentiel Stilson/Nixon ; un second, Charlie, qui essaie de rendre compte des horreurs qu’un gouvernement est capable de faire subir à ses administrés et de sa capacité à dissimuler la vérité à une population endormie par les médias.
« Charlie McGee dont les parents, un jour, avaient eu besoin de deux cents dollars. » Stephen King – Charlie
Andy McGee et Vicky Tomlinson tombent amoureux lors d’une expérience pour laquelle ils se sont portés volontaires contre quelques billets verts. On leur injecte une drogue appelée Lot 6 qui modifie les chromosomes et permet le développement de pouvoirs psychiques.
« Imaginez que vous ayez alors une gamine capable de provoquer une explosion nucléaire par la seule force de sa volonté. » ibid.
Les deux cobayes, discrètement surveillés par une agence gouvernementale secrète appelée « la Boîte » finissent par mettre au monde la petite Charlie qui, très tôt, présente de puissants pouvoirs. Tout se gâte quand la mère de Charlie est assassinée lors d’une bavure de la Boîte. Andy et sa fille de huit ans prennent la fuite et n’en reviendront pas indemnes.
« Le délai avait permis d’agencer tous les éléments disponibles de façon à présenter ce que les habitants des États-Unis semblent réellement demander lorsqu’ils prétendent vouloir des “informations”. Ils veulent simplement qu’on leur“raconte une histoire” avec un début, un milieu et une sorte de fin. » ibid.
Malgré un vieillissement certain, des personnages stéréotypés et quelques longueurs pesantes, Charlie, dont le message global est toujours d’actualité et la fin absolument charmante, reste très bien adapté à la plage, à la montagne ou à toute salle d’attente un peu bruyante.
[Critique commune à Charlie de Stephen King et Crossfire de Miyuki Miyabe]
Etats-Unis. Années 70. Au milieu de dix autres étudiants, Andy McGee et Vicky Tomlinson participent, contre 200 dollars, à une expérience du docteur Wanless durant laquelle leur est injecté un soi-disant hallucinogène léger apparenté au LSD et appelé Lot 6. L'expérience tourne mal : un des étudiants s'arrache les yeux, un autre fait un arrêt cardiaque fatal. Andy et Vicky ont l'impression d'être passés au travers et se mettent en couple, jusqu'à ce qu'ils s'aperçoivent que cette expérience les a changés. Andy a le pouvoir de pousser les gens à agir contre leur gré, un pouvoir qui lui occasionne ensuite de terribles migraines ; Vicky ferme le frigo depuis l'autre côté de la cuisine sans vraiment y penser, sans vraiment s'en rendre compte. Et puis le bonheur arrive dans la maison, sous la forme d'un bébé, Charlie, une petite fille qui en cauchemardant ne va pas tarder à mettre le feu à sa chambre, car elle a un don autrement plus impressionnant que ceux de ses parents : elle est dotée du pouvoir de pyrokinésie. Après la mort (accidentelle ?) de Vicky, il est temps pour le docteur Wanless de réapparaître et avec lui « La Boîte », cette étrange agence gouvernementale qui n'est ni la CIA, ni le FBI, ni la NSA...
Stephen King a commencé sa carrière littéraire en 1974 avec Carrie (adaptée au cinéma par Brian De Palma dès 1976) et n'a jamais vraiment cessé d'écrire sur les pouvoirs parapsychologiques : Shining (1977), Dead Zone (1979, écrit juste avant Charlie), La Ligne verte (1996), Cœurs perdus en Atlantide (1998), Dreamcatcher (2001), etc. En considérant cette liste non exhaustive et la qualité de ces titres (Dreamcatcher est sans doute le plus faible de la liste), force est de constater que les pouvoirs psys ont plutôt bien inspiré King. Charlie (dont l'intrigue ressemble sans doute trop à Furie (1976) de John Farris ; le traqueur est Amérindien dans les deux livres, ce qui a donné lieu à quelques explications d'avocats) est une des réussites majeures de l'auteur, une sorte de « roman de gare » parfait. La course-poursuite est haletante, les personnages fouillés, les scènes d'action remuent, ça chauffe (pour le moins) et le vertige naît à plusieurs moments. Servi par un sens de la narration, et notamment du flash-back, tout simplement magistral, Charlie se dévore par paquets de 100 pages (malgré une traduction française qui mériterait d'être revue, F. M. Lennox arrivant à restituer à l'identique tous les faux amis de la langue américaine ou presque). Cette lecture, qui nous happe comme par un torrent furieux, nous rappelle, car on l'avait un petit peu oublié ces dernières années, que Stephen King est un géant, tout autant dans le domaine de la littérature populaire que celui de la littérature dite « générale ».
La première chose qui vient à l'esprit à la lecture de Charlie est l'apparente similitude de son scénario avec celui de Furie,le film de De Palma tiré d'un roman de l'excellent John Farris. Mais, en réalité, la ressemblance n'existe qu'en surface, dans le fait que les deux histoires sont conçues comme des Thrillers purs mettant en scène complots, services secrets très « spéciaux », etc., et dont les victimes/proies sont des êtres humains doués de pouvoirs paranormaux qui, pour leur malheur, intéressent de près la défense nationale américaine...
Le roman de King se présente donc au départ comme l'histoire de la fuite éperdue d'une enfant douée de pyrokinésie (la jeune Charlie du titre) et de son père Andy (lui aussi capable de quelques prouesses psychiques), lesquels sont poursuivis par un organisme surnommé « La Boîte » pour être réduits à l'état de cobayes. Mais rapidement le combat entre le Bien, représenté par l'innocence de l'enfant et le Mal qui, lui, a pris le visage ténébreux des forces obscures qui gouvernent le pays, va devenir le thème central du livre (comme cela arrive souvent chez l'auteur). Ce combat entre l'enfant et ses geôliers agités par des passions morbides constitue le morceau de choix du roman et montre ce talent qu'a Stephen King pour dépeindre des personnages solitaires et mal dans leur peau. King est un maître en matière de psychologie dès qu'il aborde son terrain favori, c'est-à-dire la peur et les pulsions troubles qui peuvent agiter l'âme humaine.
Ceci dit, Charlie est également une histoire initiatique dans le sens où elle montre comment un enfant va perdre petit à petit son innocence au contact de l'horreur dont peut être capable le monde des adultes. Et cette perte de l'innocence va coïncider avec la découverte de la puissance donnée par un Pouvoir capable de mettre le feu à tout le pays et, sans doute au monde entier.
L'ensemble est propulsé par le style superbe de l'auteur qui, comme toujours, sait jouer sur tous les registres : des pages d'extraordinaire suspense alternent avec des séquences psychologiques qui prennent le lecteur « aux tripes » (on est loin du nombrilisme intellectuel qu'affectionnent beaucoup d'auteurs français de littérature générale... et, souvent, de SF) et il me semble qu'on tient là un des meilleurs romans de King. Dommage qu'une fois de plus, l'éditeur ait cru bon de pratiquer de nombreuses coupes dans le texte... Editeurs et charcutiers, même combat !