GALLIMARD
(Paris, France), coll. Folio SF n° 354 Date de parution : 29 octobre 2009 Dépôt légal : octobre 2009, Achevé d'imprimer : 19 octobre 2009 Réédition Roman, 496 pages, catégorie / prix : F10 ISBN : 978-2-07-035972-1 Format : 10,8 x 17,8 cm✅ Genre : Science-Fiction
Sur Terre, le docteur Daniel Dann est chargé de suivre les sujets du projet Polymère, tous des télépathes potentiels. Pendant ce temps, dans l'espace, un être gigantesque et tout-puissant détruit les systèmes solaires les uns après les autres, obéissant à un ordre dont il a oublié la provenance et la signification. La planète Tyree va, à son tour, être anéantie. Ses habitants, les Tyrenni, cherchent désespérément un moyen de survivre, et tout particulièrement les Pères, chargés de porter et d'élever les enfants. Ces trois espèces, si différentes, vont-elles parvenir à communiquer ? Les Tyrenni échapperont-ils au Destructeur de mondes ?
Dans ce roman de science-fiction vertigineux, James Tiptree Jr. parvient à nous faire ressentir l'altérité de ses personnages brisés, menacés d'extinction, tout en maintenant un suspense haletant.
James Tiptree Jr. est le pseudonyme d'Alice Bradley Sheldon. Née en 1915 aux États-Unis, elle commence à écrire de la science-fiction en 1967. Le 19 mai 1987 elle met fin aux souffrances de son mari grabataire avant de se suicider. Elle consacra la plus grande partie de sa carrière à la nouvelle et ne publia que deux romans.
Le premier roman de James Tiptree Jr., dont on resta longtemps sans savoir que le pseudonyme masculin dissimulait une vénérable aïeule.
Le ressort d'écriture adopté par Tiptree est, semble-t-il, simple : une alternance stricte de trois points de vue — une sorte d'immense arche stellaire apparemment douée de conscience ; sur Terre, les protagonistes d'une expérience « psi » ; une planète lointaine en train de mourir (Tyree) et peuplée de « raies manta » intelligentes et télépathes. Pendant un bon tiers du livre, les trois perspectives, hétérogènes, se succèdent avec une régularité métronomique, elles se passent sagement la balle. Mais elles tardent à se lier. Ce qui a pour résultat, tout le temps que dure la mise en place, de produire un effet de collage. Aucune partie n'apparaît motivée par les deux autres. Du coup, le procédé s'exhibe, il devient évident, un peu encombrant, au lieu de rester discret, dynamique. Mais ce n'est qu'un petit reproche. Lorsque le collage est dynamité, lorsque les parties s'interpénètrent, pour raconter une formidable histoire d'échanges de corps et d'esprits (cf. le titre-référence à Lovecraft), l'effet produit est l'abattage des cloisonnements qui fusionnent à tous les niveaux. Formel : la succession des points de vue s'étiole. Thématique : choc des civilisations et des personnages par le biais d'une sorte de « possession » et d'un « voyage astral » à l'échelle galactique. Ce qui, au début, faisait croire à un pur procédé transforme le texte en une belle machinerie (dictionnaire : « ensemble de machines concourant à un but commun ») à rêver.
A noter également la traduction en tous points excellente d'Elisabeth Vonarburg (on chuchote qu'elle assurerait désormais la traduction du cycle de Tanith Lee, Karrakazi, dont Marabout a entamé la publication. Eu égard à son travail remarquable sur Tiptree, on ne peut que s'en réjouir).