Psychotique, la mère de Ben croit que nombre d'humains sont des lézards qui reviennent prendre possession de la Terre et qui redoutent la couleur rouge dont elle se barbouille le visage. Ben doit assumer ce poids, sans pouvoir compter sur son père qui a abandonné le domicile conjugal et ne veut même plus entendre parler d'eux...
C'est alors que Ben rencontre Marco, un adolescent dont la propre mère serait également malade. Marco lui raconte son étrange histoire : il a découvert sous un chêne un passage vers l'an 4000, où il s'est rendu pour chercher un traitement...
Mi-incrédule, mi-fasciné, Ben écoute Marco dont le récit fait curieusement écho au délire de sa mère et à son invasion de lézards...
Ecrit dans un style simple et concis, en phrases courtes de quelques mots et en chapitres non moins brefs de quelques pages, Le Temps des lézards est venu brosse avant tout le portrait d'un adolescent qui bascule lui-même pour un temps dans la folie. Car malgré la cohérence du récit de Marco, ce voyage dans le futur paraît bien étrange, surtout lorsqu'il intègre des éléments que seul Ben peut connaître. D'ailleurs l'endroit où habite Marco semble curieusement inhabité, personne d'autre que Ben n'a rencontré Marco et, contrairement à ce qu'il prétend, aucune femme de son nom n'est internée à l'hôpital... Et si Marco n'était qu'une personnalité dissociée de Ben ?
Cette bascule, vue de l'intérieur par un jeune homme meurtri qui oscille entre le doute quant à sa propre santé mentale et l'adhésion à l'incroyable fable que lui raconte Marco, se montre une illustration convaincante de la façon dont la réalité peut se déliter autour de soi. Si dans beaucoup de romans de SF, le personnage principal, d'abord pris pour un fou, se révèle sain d'esprit, Charlie Price a choisi l'approche inverse. Et ça fonctionne bien, même si le dénouement peut paraître abrupt — et même si en fin de compte, il ne s'agit plus de SF.
Malgré une situation de départ qui pourrait devenir larmoyante, Le Temps des lézards est venu se lit plutôt comme un roman d'aventures, notamment grâce à son style très aisé à lire mais aussi à une vision globale assez positive et à une peinture amusante de l'an 4000. Voilà donc une lecture « jeunesse » relativement originale et d'autant plus recommandable que le livre est doté d'une fort jolie maquette.
Pascal PATOZ (lui écrire)
Première parution : 25/5/2009 nooSFere