Jonathan Stroud avait éclaté sur la scène internationale avec la trilogie de Bartiméus, splendide saga pour la jeunesse où l’on suivait les aventures tragico-comiques d’un garçon et du djinn récalcitrant qu’il invoquait. Succès public et critique qui devait se conclure par l’obtention d’un Grand Prix de l’Imaginaire. Les Héros de la Vallée marque le retour de Stroud, toujours pour la jeunesse, mais dans un genre très différent.
Dans une vallée visiblement située en Scandinavie si l’on en croit les patronymes de ses habitants, Halli est un jeune garçon de la maisonnée de Svein ; il est même le fils cadet du Conciliateur de celle-ci. Il grandit bercé par les légendes des héros qui peuplaient jadis sa vallée, et notamment Svein, qui libéra le pays des Trâles. Ces derniers sont d’immondes créatures qui surgissent la nuit pour tuer ceux qui s’aventurent au-delà des barrières. Halli rêve au jour où lui aussi pourra accomplir ces actes héroïques. Un drame causé par l’antagonisme entre les différentes maisonnées de la vallée va lui donner l’occasion de tester son courage et de mettre en pratique ses plans...
Roman d’apprentissage de la plus pure espèce, Les Héros de la Vallée s’enrichit d’une réflexion intéressante sur le rapport des jeunes – et des moins jeunes – aux mythes, à leur construction et à leur valeur morale, parfois un peu dangereuse : à trop vouloir les imiter, Halli risque plusieurs fois sa vie. Mais il apprendra aussi que les mythes sont versatiles : les autres maisonnées ont le même type de légendes, sauf que chez eux Svein n’est qu’un faire-valoir pour le Héros local. A partir de là, Halli mûrira plus vite qu’il n’aurait lui-même pu le croire, tandis qu’il compare son aventure personnelle à ce qu’il croit savoir de la vie de Svein et des siens. De péripéties en péripéties, de rencontres en rencontres, parfois dramatiques comme lorsqu’il tue un homme pour la première fois et subit toutes les conséquences de son acte, le jeune garçon va comprendre que tout ne doit pas être accompli sur un coup de tête, et qu’il faut savoir parfois prendre un peu de recul. La présence à ses côtés d’Aud, issue d’une autre maisonnée, sera à ce propos riche d’enseignements, en même temps que génératrice de quelques passages savoureux ou romantiques.
Aventures menées tambour battant, suspense, légendes, personnages attachants ou truculents, le jeune lecteur retrouvera ici ce qui faisait le charme des livres précédents de Stroud : un roman qui se dévore de la première à la dernière page, sans que la réflexion soit ici sacrifiée sur l’autel de l’efficacité. Une preuve supplémentaire que Jonathan Stroud est l’un des meilleurs auteurs jeunesse actuels.