Le VISAGE VERT
(Cadillon, France), coll. Le Visage Vert (revue) n° 18 Dépôt légal : juin 2011, Achevé d'imprimer : mai 2011 Première édition Revue, 192 pages, catégorie / prix : 17 € ISBN : 978-2-918061-11-3 Format : 16,2 x 24,0 cm✅ Genre : Fantastique
Et une mue de plus pour le Visage Vert. Et quelle mue !
Après un premier numéro auto-édité en octobre 1995, puis douze numéros chez Joëlle Losfeld entre janvier 1997 et mai 2003, et enfin quatre numéros chez Zulma entre juin 2007 (après un black-out de quatre ans) et octobre 2010, le dix-huitième numéro revient à l'auto-édition. En effet, entre-temps se sont créées les éditions du Visage Vert, qui ont déjà publié une petite dizaine d'ouvrages, et c'est donc tout naturellement au sein de cette structure que revient la revue, qui au passage reprend son rythme semestriel. Bonne nouvelle : elle se pare désormais d'une splendide maquette, sous couverture en papier gaufré, qui fait la part belle aux illustrations.
Comme on le sait, le Visage Vert se consacre aux textes fantastiques, plutôt classiques (même si le sous-titre en est « revue de littérature » sans plus de précision), qu'agrémentent des études fouillées. C'est donc sans surprise que ce nouveau numéro s'ouvre sur une nouvelle lycanthropique d'Howard Pyle, illustrée par l'auteur lui-même, se déroulant à Salem, ce qui permet à l'érudit Michel Meurger de le compléter par une étude très intéressante sur la descendance des sorcières de Salem dans la fiction américaine. Vient ensuite un texte de Robert Barr extrait d'un recueil de l'auteur à paraître dans la collection Baskerville dirigée par Jean-Daniel Brèque chez Rivière Blanche : une très astucieuse histoire de fantômes à multiples retournements. Un régal, et une découverte. En comparaison, la nouvelle de Jean Bréchal, sur une expérience qui tourne mal, paraît plus convenue ; il faut néanmoins la replacer dans son époque, puisqu'elle précède par exemple Les Mains d'Orlac de Maurice Renard de plus de deux décennies. Plutôt que de jouer la carte du surnaturel, le texte d'Amelia B. Edwards préfère opter pour la terreur, dans un huis-clos ferroviaire étouffant ; le plus étonnant à propos de cette histoire n'en reste pas moins le texte suivant, de Georges Price, qui semble le plagier de manière éhontée. Le deuxième texte proposé de Price est lui nettement plus convaincant : l'histoire d'un médecin qui invente une drogue permettant de bannir le sommeil ; ou comment une invention censée être bénéfique se révèle vite néfaste. Autre auteur à l'honneur avec deux nouvelles présentées, Alexander Moritz Frey nous conte tout d'abord l'histoire d'un usager des transports en commun victime d'une agression ; de policière, l'intrigue verse résolument dans le fantastique à la faveur d'un basculement imparable ; un motif circulaire qui est également à l’œuvre dans le deuxième texte de Frey, l'histoire d'un clochard qui se prend pour ce qu'il n'est pas.
Le numéro se conclut en fanfare par la première partie d'un dossier consacré au gorille voleur de femmes, concocté par François Ducos. Ce dernier livre un article consacré aux récits de voyages, où il traque toutes les apparitions de la funeste bête ; un essai qui ne prendra toute sa valeur que lorsqu'il sera complété par la deuxième partie, où Ducos traitera des signes dans les œuvres de fiction. Pour illustrer son propos, Ducos complète son article de textes de Bénédict-Henry Révoil et Gervésis Malissol, au traitement légèrement différent : le premier livre véritablement un reportage, là où le second emprunte plutôt la forme d'une fiction.
Au final, on ne que se féliciter de ce nouveau numéro, qui allie une présentation classieuse à un sommaire particulièrement solide. Sans renier le travail effectué précédemment par Joëlle Losfeld et Zulma, le Visage Vert franchit un nouveau palier. Et le plus passionnant est que cette fois-ci, il ne faudra attendre que six mois pour que s'offre à nous le prochain numéro !