Un capitaine fou, tel Achab, à la poursuite d'une terrifiante comète. Une locomotive à vapeur qui entre en gare, en tractant de noirs wagons MGM, Warner Brothers, Paramount, RKO, NBC : est-ce Hollywood qu'on enterre ? Un romancier hémophile dont les ennemis affûtent les objets de la vie courante... Un homme, M. Smith, qui sombre dans le coma et dont le corps se transforme lentement, sa peau devenant si dure qu'on ne peut y enfoncer l'aiguille d'une intraveineuse ; mais quelle peut bien être la destination de cette métamorphose ?
Dans ce recueil testament, rassemblant vingt-cinq textes écrits entre 1946 et 2003, Ray Bradbury aborde tous les genres de l'imaginaire : de la chronique estivale, mélancolique, à la science-fiction poétique en passant par le fantastique horrifique.
Né en 1920, Ray Bradbury s'impose rapidement comme un écrivain majeur, faisant paraître une série de nouvelles oniriques et mélancoliques, plus tard réunies sous le titre de Chroniques martiennes. Publié en 1953, Fahrenheit 451, qui assoit la réputation mondiale de l'auteur, sera porté à l'écran par François Truffant. Il décède en 2012.
1 - Le Pyjama du chat (The Cat's Pajamas, 2004), pages 11 à 254, recueil de nouvelles, trad. Florence DOLISI 2 - Débordant de vie et d'inspiration (Alive and Kicking and Writing, 2004), pages 17 à 24, préface, trad. Florence DOLISI 3 - Le Jeune homme et la mer (Chrysalis, 1946), pages 25 à 38, nouvelle, trad. Florence DOLISI 4 - L'Île (The Island, 2004), pages 39 à 52, nouvelle, trad. Florence DOLISI 5 - Un peu avant l'aube (Sometime Before Dawn, 2004), pages 53 à 63, nouvelle, trad. Florence DOLISI 6 - Gloire à notre chef (Hail to the Chief, 2004), pages 64 à 76, nouvelle, trad. Florence DOLISI 7 - Nous ferons comme si de rien n'était (We'll Just Act Natural, 2004), pages 77 à 86, nouvelle, trad. Florence DOLISI 8 - Olé, Orozco ! Siqueiros, si ! (Olé, Orozco ! Siqueiros, si !, 2004), pages 87 à 96, nouvelle, trad. Florence DOLISI 9 - La Maison (The House, 2004), pages 97 à 110, nouvelle, trad. Florence DOLISI 10 - Le Convoi funéraire de John Wilkes Booth et des studios d'Hollywood (The John Wilkes Booth/Warner Brothers/MGM/NBC Funeral Train, 2004), pages 111 à 121, nouvelle, trad. Florence DOLISI 11 - Mort d'un homme prudent (A Careful Man Dies, 1946), pages 122 à 142, nouvelle, trad. Florence DOLISI 12 - Le Pyjama du chat (The Cat's Pajamas, 2004), pages 143 à 152, nouvelle, trad. Florence DOLISI 13 - Triangle (Triangle, 1951), pages 153 à 163, nouvelle, trad. Florence DOLISI 14 - La Bétonnière à mafiosi (The Mafioso Cement-Mixing Machine, 2004), pages 164 à 171, nouvelle, trad. Florence DOLISI 15 - Les Fantômes (The Ghosts, 2004), pages 172 à 180, nouvelle, trad. Florence DOLISI 16 - Mais où est mon chapeau ? (Where's my Hat, What's my Hurry?, 2004), pages 181 à 186, nouvelle, trad. Florence DOLISI 17 - La Transformation (The Transformation, 2004), pages 187 à 196, nouvelle, trad. Florence DOLISI 18 - Route 66 (Sixty-Six, 2004), pages 197 à 208, nouvelle, trad. Florence DOLISI 19 - Des goûts et des couleurs (A Matter of Taste, 2004), pages 209 à 225, nouvelle, trad. Florence DOLISI 20 - I Get the Blues When It Rains (souvenir) (I Get the Blues When it Rains (A Remembrance), 2004), pages 226 à 234, nouvelle, trad. Florence DOLISI 21 - Tous mes ennemis sont morts (All my Enemies are Dead, 2004), pages 235 à 241, nouvelle, trad. Florence DOLISI 22 - Le Collectionneur fou (The Completist, 2004), pages 242 à 246, nouvelle, trad. Florence DOLISI 23 - L'Orient-Express de l'Éternité (Epilogue: The R.B., G.K.C., and G.B.S. Forever Orient Express, 2004), pages 247 à 254, poésie, trad. Florence DOLISI 24 - La Chrysalide (Chrysalis, 1946), pages 255 à 293, nouvelle, trad. Florence DOLISI 25 - Maintenant et à jamais (Now and Forever: Somewhere a Band Is Playing & Leviathan '99, 2007), pages 295 à 507, recueil de nouvelles, trad. Florence DOLISI 26 - Quelque part (Somewhere, 2007), pages 299 à 301, introduction, trad. Florence DOLISI 27 - Quelque part joue une fanfare (Somewhere a Band is Playing, 2007), pages 305 à 412, nouvelle, trad. FOLIAS 28 - Rêve de radio (Radio Dream, 2007), pages 415 à 417, introduction, trad. Florence DOLISI 29 - Léviathan 99 (Leviathan '99, 2007), pages 421 à 507, nouvelle, trad. Florence DOLISI
Ce qui est bien, avec un recueil de Ray Bradbruy, c'est qu'on y retrouve toujours la même chose.
Ce qui est moins bien, avec un recueil de Ray Bradbruy, c'est qu'on y retrouve toujours la même chose.
En effet, la patte de l'auteur est reconnaissable dès les premières lignes de chaque texte : un mélange de nostalgie poétique et d'horreur sourde, une quiétude qu'on devine ne tenir qu'à un fil au-dessus des abîmes. Et une volonté de mélanger les genres, science-fiction, fantastique, réalisme, sans favoriser l'un au détriment des autres : une liberté de ton que seul un auteur de la trempe de Bradbury peut se permettre. Tout comme de se faire côtoyer des nouvelles sans intérêt (« Le convoi funéraire de John Wilkes Booth et des studios d'Hollywood ») et des petits bijoux finement ciselés (« Le jeune homme et la mer »), en passant par de longs poèmes (« L'Orient-Express de l'Éternité »). L'auteur nous fait ainsi éprouver toute une palette de sentiments, et nous prend régulièrement à contre-pied d'un récit à l'autre ; cette richesse fait tout l'intérêt des recueils de Bradbury. Il n'en reste pas moins que tout cela sent le déjà vu, et qu'on se demande régulièrement s'il était utile de ressortir telle nouvelle écrite il y a cinquante ans alors que Bradbury a déjà dit la même chose, parfois mieux, dans un texte précédemment publié.
Hormis la grosse vingtaine de nouvelles, le recueil se termine par deux morceaux de choix, à savoir deux novellas. La première, « Quelque part joue une fanfare », aurait parfaitement pu trouver sa place dans un livre comme Le Pays d’octobre, ou servir de scénario à un épisode de La Quatrième Dimension : un homme arrive dans une ville perdue des États-Unis, qui semble un peu particulière... Un texte mélancolique et envoûtant. Quant à « Léviathan 99 », il s’agit d’un texte de pure science-fiction, décalque transparent du Moby Dick de Melville, la baleine étant ici remplacée par une comète – le fameux Léviathan – ayant aveuglé le capitaine du vaisseau. Bel exercice au cours duquel Bradbury se montre à la hauteur de son modèle, même s’il s’est avant tout fait plaisir et que le lecteur aura sans doute un peu de mal à trouver une autre justification à ce texte.
Au final, si vous aimez ce territoire bradburyen familier, où l'on déambule tranquillement, sans réelle destination, sans réel but si ce n'est de trouver la sérénité tout en prenant un certain plaisir à vous exposer aux menaces, parfois voilées, qui pèsent sur votre chemin, alors vous retrouverez dans Léviathan 99 exactement ce que vous cherchiez.
Qu'on soit fan ou pas, un nouveau livre signé par l'auteur des Chroniques Martiennes, c'est toujours un événement. Celui-ci, inédit dans sa composition, constitue en fait l'assemblage de deux recueils américains : The Cat's Pajama et Now and Forever, séparés par la nouvelle « La Chrysalide » (jamais traduite en France et adaptée en long-métrage par Tony Baez Milan en 2009). L'occasion de découvrir vingt-cinq récits du maître américain qui file tout droit vers ses 90 ans.
The Cat's Pajama comprend vingt-et-un textes écrits entre 1946 et 2003, qui, comme le rappelle la quatrième de couverture, abordent « tous les genres de l'imaginaire : de la chronique estivale, mélancolique, à la science-fiction poétique en passant par le fantastique horrifique ». Et on peut ajouter le poème et l'autobiographie. Résultat : à chaque début de nouvelle, on ignore totalement l'univers dans lequel on va être plongé. Ce qui peut surprendre et s'avérer d'autant plus plaisant. Quand on espère du fantastique, c'est de l'autobiographie ; on veut de la science-fiction, on se retrouve avec un poème. On passe d'un hymne à la tolérance avec « Le Jeune homme et la mer » à un récit angoissant dans « L'Ile », d'un texte policier avec « Mort d'un homme prudent » à une nouvelle fleur bleue dans « Le Pyjama du chat »... Cette hétérogénéité, certes enrichissante, a toutefois ses inconvénients. Les attentes, quelles qu'elles soient, sont parfois déçues. Quand on entame une lecture, on ne peut se départir d'envies, de représentations qui nous préparent à en apprécier le contenu. Ici cette anticipation tourne court, l'ensemble s'avérant par trop inégal. Malgré tout cette première partie, environnée d'un sentiment de nostalgie fugace mâtiné d'un soupçon de tristesse, n'en demeure pas moins agréable, même si dénuée de texte véritablement marquant.
« La Chrysalide » reprend le thème classique de la métamorphose : un homme qui devrait être mort survit on ne sait comment dans une sorte de gangue rigide. Les scientifiques qui suivent son cas s'affrontent pour savoir quel sort lui faire subir : détruire ce danger potentiel ou protéger ce futur mutant. Conventionnel, mais de bonne facture.
La deuxième partie, Now and Forever, se compose de deux novellas : « Quelque part joue une fanfare » et « Léviathan 99 ».
Dans la première, on retrouve la légèreté de ton de Bradbury et son amour inconditionnel des images. Un jeune homme se rend dans une petite ville perdue au milieu du désert : son exploration de cette étrange cité entraîne le lecteur d'un mystère à un autre. Le rythme est soutenu grâce à de courts chapitres et, même si le dénouement se révèle prévisible, on ne s'ennuie en aucun cas, bien au contraire.
La nouvelle titre, « Léviathan 99 », hommage au Moby Dick de Herman Melville, a été retravaillée de nombreuses fois nous apprend Bradbury dans sa préface. Elle a même été rallongée en 1972 de 40 pages ! Heureusement, le texte proposé ici est réduit à une taille proche de celle d'origine. L'histoire de cet homme à la poursuite d'une comète terrifiante, le Léviathan du titre, tel Achab traquant sans relâche la baleine, a beau s'avérer assez captivante, la folie du capitaine du Cetus 7 n'atteint pas la puissance de l'original. Ainsi, en dépit de quelques trouvailles — dont ces extraits d'émissions radio anciennes interceptés comme des bouteilles à la mer — , l'ensemble paraît quelque peu artificiel et échoue à faire oublier Melville, et de beaucoup.
Reste au final un recueil certes pas déplaisant, mais qui ne s'inscrira pas au pinacle d'une œuvre fondatrice, œuvre que son auteur vieillissant semble définitivement incapable de renouveler. A réserver aux inconditionnels, en somme.