SOLARIS
(Lévis (Québec), Canada), coll. Solaris (revue) n° 195 Dépôt légal : juillet 2015, Achevé d'imprimer : juillet 2015 Première édition Revue, 160 pages, catégorie / prix : 12,95 $ ISBN : néant Format : 13,5 x 21,0 cm Genre : Imaginaire
Évidemment, lire une revue, Solaris n ° 195, qui commence par les divers hommages de la SF québécoise à l'auteur Joël Champetier, disparu le 30 mai 2015 au terme d’une longue maladie, ne vous facilite pas la tâche pour apprécier ce que la revue contient d’autre. Cette entrée en matière étant douloureuse, même si on connaît peu Joël Champetier, auteur de formidables nouvelles et d’un roman d’horreur que je conseille sans réserve – La Mémoire du lac–, mieux vaut circonscrire sa lecture dans un temps différent de celui que l'on consacrera au reste de la revue.
Côté fictions, ce numéro n'est guère réjouissant : le prix Solaris 2015, « Garder un phénix en cage », de Jean-Louis Trudel, plein d'images et d'idées, souffre d'une narration morcelée extrêmement maladroite. « Testament d'une encloustrée » propose son lot de visions morbides fortes, mais ne convainc pas sur la longueur. Les deux nouvelles suivantes s'oublient aussi vite qu'on les lit. Et la dernière, « L'Enchanteresse portait des Levi's », est une très laborieuse fantasy urbaine.
Mario Tessier relève le niveau avec un excellent article sur le design en SF. Dans les critiques livres, on s'amusera beaucoup à lire Geneviève Blouin (l'auteure de « L'Enchanteresse portait des Levi's ») reprocher à Anne Fakhouri et Xavier Dollo tout un tas de choses sur leur roman à quatre mains, American Fays : ça fait un peu Fiat 500 se moquant d'une Ferrari à l'aile cabossée…
Au final un numéro triste, dont le sommet est l'article de Mario Tessier.
On ne sera pas beaucoup plus convaincu par la sélection de nouvelles du n° 196. Le texte d'Ève Patenaude ressemble à une mauvaise nouvelle d'Henry Kuttner. Les textes de Dave Côté et Ghislain St-Germain Forcier sont des exercices de style assez vains (surtout le second). Jean-Pierre Laigle donne une suite à son texte « Ô Laurentie », paru dans Solaris 187 en juin 2013 ; était-ce vraiment nécessaire ? Dominic Tardif s'essaye au twist à la Fight Club dans une fantasy sans conséquence. La meilleure nouvelle de la sélection est la dernière : « Les Semailles du temps, les moissons du ciel », de Mario Tessier, belle recension d'une mission spatiale de vingt-cinq millions d'années (pour commencer !), où l'auteur se permet de jouer sur le terrain de jeu habituel de Stephen Baxter, avec malheureusement un peu moins de vertige scientifique.
Deux articles complètent la livraison : « Je me souviens : modalités de la mémoire artificielle chez Isaac Asimov et Philip K. Dick » de Pierre-Alexandre Bonin ; « Lovecraft, gentleman astronome, ou quand les étoiles seront de nouveau alignées… » de Mario Tessier (encore !). Le premier article aurait pu être plus intéressant, le second est vraiment très bon.
Bien que peinant à trouver de bonnes nouvelles francophones (et ne publiant plus de nouvelles canadiennes anglophones depuis quelques numéros), Solaris reste cependant une revue de bonne tenue. Dommage qu'elle soit si québéco-centrée.
Thomas DAY Première parution : 1/1/2016 dans Bifrost 81 Mise en ligne le : 1/11/2020