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L'Autre Côté

Léo HENRY

Première parution : Paris, France : Rivages, janvier 2019


RIVAGES (Paris, France)
Date de parution : 6 février 2019
Dépôt légal : janvier 2019, Achevé d'imprimer : janvier 2019
Première édition
Roman, 128 pages, catégorie / prix : 15 €
ISBN : 978-2-7436-4616-5
Format : 14,0 x 20,5 cm
Genre : Fantasy

Illustration de bandeau : Michiel Schrikver.



Quatrième de couverture

Une mystérieuse épidémie condamne la cité-État de Kok Tepa à l’isolement et à l’autarcie. Seuls les Moines, gardiens des traditions et détenteurs du secret de l’immortalité, en sont préservés grâce à un sérum qui les protège de la maladie. Les autres castes, elles, sont touchées de plein fouet.
Rostam est passeur. Il planifie la fuite des familles qui refusent la mort et espèrent rejoindre l’Outre-Mer pour y être soignées.
Mais un jour, la fille de Rostam, Türabeg, contracte la terrible infection. Le passeur risquera tout pour la sauver, jusqu’à suivre à son tour les chemins de la migration. Il découvrira alors l’envers cauchemardesque de la brillante Kok Tepa.
Un roman poignant sur l’exil et le déracinement, sur l’amour infini d’un père prêt à briser les règles et braver tous les obstacles.

Né en 1979 à Strasbourg, Léo Henry est l’auteur de nombreux romans (Le Casse du continuumCosmique fric-frac, La Panse), de nouvelles (Les trois livres qu’Absalon Nathan n'écrira jamais, Grand Prix de l’Imaginaire 2010), de scénarios de bande dessinée (Sequana).

Critiques

Dans une théocratie fermée sur elle-même, ravagée par une épidémie contre laquelle seuls les dirigeants ont accès aux médicaments, Rostam organise l’exil de ceux qui veulent fuir vers d’autres pays qu’on imagine meilleurs. Un jour, il est lui-même contraint de partir avec sa fille malade et sa femme. À leur tour d’emprunter les routes clandestines, de confier leur vie à des passeurs interlopes, de se cacher, de franchir les frontières la nuit, et de rêver d’une destination où ils pourront vivre en paix et en sécurité.

L’odyssée de Rostam est lente, douloureuse, semée d’embûches, d’échecs et de retours en arrière. Elle transporte le lecteur d’un pays imaginaire, tels qu’on en trouve dans la littérature de fantaisie, jusqu’à des contrées de plus en plus réalistes, de plus en plus semblables à notre monde. Avec la description minutieuse du calvaire de ce migrant qui veut simplement sauver son enfant, Léo Henry nous immerge dans le quotidien des réfugiés qui tentent d’accéder à la forteresse européenne.

Ce court roman, âpre et sec, qui évoque Volodine lorsqu’il dépeint l’univers carcéral, ne laisse pas indemne. C’est un texte puissant et nécessaire.

Jean-François SEIGNOL (lui écrire)
Première parution : 9/4/2019 nooSFere


[Focus Léo Henry :

- L'Autre côté - Rivages

- Twin Peaks 90210 - Les Règles de la nuit]

 

    L’ancrage est dans un univers imaginaire, la Cité-État de Kok Tepa d’apparence médiévale, la ville où on mange ses morts, quelque part en Ouzbékistan, gouvernée par des Moines qui vivent à l’écart de la basse ville, une mosaïque de castes miséreuses. Mais il y a des drones, des motos taxis, des aérostats et des ascenseurs ; les moines sont préservés de la maladie qui rôde, douloureuse, mortelle, atroce, par des médicaments venus de l’autre bout du monde. Rostam, ami d’enfance de Timur à présent Moine promu à l’immortalité, est un passeur qui aide ceux qui choisissent l’exil, premier maillon d’une filière pour atteindre l’Outre-Mer. Quand sa fille est frappée par la maladie, ses relations ne lui permettent pas d’obtenir des médicaments et sa femme le convainc de la faire soigner à l’étranger… Le passeur devient un immigré et découvre l’envers du décor, ses contacts peu fiables qui achèvent de détrousser les victimes, les dures conditions d’un périple dans des 4×4 ou des bus brinquebalant, les séjours dans des lieux interlopes ou des lieux de rétention. Les lieux imaginaires, dont la toponymie est empruntée à l’Ouzbékistan, à l’Afghanistan, au Tadjikistan, sans renvoyer à un itinéraire précis, ne font que renforcer l’impression de vacuité, la dissolution du temps et de l’espace qui achève de dissiper le but dans la fragilité d’un rêve sans consistance.

    Seuls quelques chapitres portent un titre, comme des fragments de mémoire d’une errance où rien de saillant n’émerge, hormis les trahisons, les coups bas, les dangers. Les phrases courtes, les descriptions minimalistes et mornes durant les longues attentes, hachées dans les moments d’action, achèvent de donner de la situation un sentiment de désolation où se désagrègent les personnalités. La scène de l’incendie dans le centre de rétention est exemplaire, faite d’images fugitives, vision fragmentée dont le sens échappe, un puzzle que l’urgence laisse épars. La description stroboscopique de l’immigration, la perte de repères, donne à vivre de l’intérieur l’éprouvant parcours de ceux qui cherchent un monde meilleur.

    Un récit basé sur des faits réels, décrivant un itinéraire, des intervenants et des organismes renvoyant à l’actualité, n’aurait pas eu pareil impact.

    C’est encore la fiction qui devient le révélateur de certains aspects de la société dans Twin Peaks 90210, à travers un autre parcours halluciné dans la jungle des coïncidences et des liens hasardeux. La quête devient ici enquête, celle qui tente de mettre à jour les relations entre deux séries télévisées bien distinctes, Twin Peaks de David Lynch et Beverly Hills, 90210, d’Aaron Spelling, présentées concomitamment sur deux chaînes différentes. Les correspondances sont à ce point troublantes qu’elles ne peuvent être dues au hasard. Quels sont les liens qui les unissent ? Pourquoi Sheryl, dans Beverly Hills 90210, porte-t-elle le prénom de l’actrice qui incarne Laura Palmer dans Twin Peaks et con-somme-t-elle une boisson bleue une semaine avant que les protagonistes ne boivent à leur tour un cocktail de même couleur ? C’est autour de la théorie du complot qu’est bâti cet essai. Léo Henry livre les détails de l’enquête qu’il a menée : on croise Jacques Mucchielli et Pacôme Thiellement, connaisseurs de l’œuvre de Lynch, Erwann Perchoc, « le numéro un et demi du Bélial’ », qui lui conseille de cartographier les embranchements des deux séries, et même le scénariste et réalisateur Darren Star, créateur de Beverly Hills 90210, croisé à New York. L’accumulation de détails donne à l’ensemble un indéniable effet de réel. Léo Henry s’amuse beaucoup à établir des liens convaincants en jouant sur tous les registres. Il y a du « Tlön Uqbar Orbis Tertius » de Borges dans cette construction hallucinante, mais c’est davantage au crazy wall, la mosaïque de photos et références tissés de liens par l’enquêteur obstiné que songe l’auteur. Cette mise au jour d’une réalité cachée est un fantasme emblématique de nos sociétés surinformées, qui cherche à donner du sens à une masse de données étouffante. La vérité est ailleurs, assurément inaccessible, et renvoie davantage à l’enquêteur qu’au monde qu’il s’emploie à décrypter. C’est de ce que l’auteur cherche à nous persuader, avec une habile pirouette finale. Fascinant de bout en bout, une fiction en forme d’essai, à moins que ce ne soit l’inverse, d’une grande intelligente.

    En deux courts textes, Léo Henry réaffirme ce qu’en Bifrosty, on sait depuis un moment déjà : il est à ce jour l’un des plus passionnants auteurs d’Imaginaire qui soit.

Claude ECKEN (lui écrire)
Première parution : 1/4/2019 dans Bifrost 94
Mise en ligne le : 14/9/2023

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