Site clair (Changer
 
    Fiche livre     Connexion adhérent
Expiration

Ted CHIANG

Titre original : Exhalation, 2019
Première parution : New-York, USA : Alfred A. Knopf, 7 mai 2019   ISFDB
Traduction de Théophile SERSIRON
Illustration de Aurélien POLICE

GALLIMARD (Paris, France), coll. Folio SF précédent dans la collection n° 702 suivant dans la collection
Dépôt légal : mai 2023, Achevé d'imprimer : 8 mai 2023
Retirage
Recueil de nouvelles, 496 pages, catégorie / prix : F9
ISBN : 978-2-07-297190-7
Format : 10,8 x 17,8 cm
Genre : Science-Fiction


Quatrième de couverture

Un jeune marchand de Bagdad rongé par le remords entreprend un voyage dans le temps grâce à une incroyable machine.
Dans un futur plus ou moins lointain, un chercheur en anatomie décide de disséquer les rouages de son propre cerveau pour en comprendre le fonctionnement.
Un mathématicien du XIXe siècle met au point une machine censée éduquer les enfants de manière rationnelle. Mais lorsqu’il confie son propre fils à cette Nurse automatique, les choses ne se passent pas tout à fait comme prévu…

À travers ces neuf nouvelles d’une inventivité et d’une intelligence rares, Ted Chiang interroge avec brio notre rapport aux machines, au temps, à la mémoire, et en définitive, ce qui fait notre humanité.

Révélé en 2002 avec La tour de Babylone, Ted Chiang s'est imposé comme une figure incontournable de la science-fiction. Sa nouvelle « L'histoire de ta vie », adaptée au cinéma par Denis Villeneuve sous le titre Premier contact, lui a valu une reconnaissance internationale. Aujourd'hui traduit dans une vingtaine de pays, Ted Chiang a reçu quatre fois les prix Hugo et Nebula, et six fois le prix Locus. Expiration regroupe ses neuf nouvelles les plus récentes, dont trois prix Hugo.

Sommaire
Afficher les différentes éditions des textes
1 - Le Marchand et la porte de l'alchimiste (The Merchant and the Alchemist's Gate, 2007), pages 11 à 56, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
2 - Expiration (Exhalation, 2008), pages 57 à 86, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
3 - Ce qu'on attend de nous (What's Expected of Us, 2007), pages 87 à 94, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
4 - Le Cycle de vie des objets logiciels (The Lifecycle of Software Objects, 2010), pages 95 à 236, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
5 - La Nurse automatique brevetée de Dacey (Dacey's Patent Automatic Nanny, 2011), pages 237 à 254, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
6 - La Vérité du fait, la vérité de l'émotion (The Truth of Fact, the Truth of Feeling, 2013), pages 255 à 316, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
7 - Le Grand silence (The Great Silence, 2015), pages 317 à 326, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
8 - Omphalos (Omphalos, 2019), pages 327 à 372, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
9 - L'Angoisse est le vertige de la liberté (Anxiety Is the Dizziness of Freedom, 2019), pages 373 à 463, nouvelle, trad. Théophile SERSIRON
10 - Notes sur les textes (2019), pages 465 à 479, notes, trad. Théophile SERSIRON
11 - Remerciements (2019), pages 481 à 481, notes, trad. Théophile SERSIRON
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition DENOËL, Lunes d'Encre (2021)

Ted Chiang jouit d'une grosse cote, certainement parce que les anglophones l'ont couvert de prix, et de plus il est maintenant dans le cercle des auteurs adaptés avec succès au cinéma (même si Premier contact est une trahison à peu près totale). Je ne suis pas un fan ébaubi : La tour de Babylone a quelques nouvelles que j'avais trouvé de premier ordre, tout en me disant qu'il y avait aussi pas mal d'enfumage intellectuel dans ses textes, du genre "voyez à quel point je joue avec virtuosité avec les idées".

J'ai été très agréablement surpris par Expiration, qui me semble dénué de ce défaut. Non pas que Ted Chiang, conseillé par un éditeur cupide, se serait mis à la portée des pauvres lecteurs dans mon genre, abrutis de mauvaises séries télé, car il ne semble pas en avoir rabattu de son exigence intellectuelle, une ou deux nouvelles sont même pas faciles à suivre. Mais les textes sont toujours empreints d'implications existentielles et d'émotions, ce qui faisait parfois défaut au premier recueil de l'auteur.

Ted Chiang laisse ici s'épanouir son goût pour les univers créés de toute pièce, qui ne se placent pas dans un futur ou une galaxie lointaine, mais nulle part... La nouvelle Omphalos imagine un univers où la "science chrétienne" trouve des preuves et est la norme, ce qui n'exclut pas des révolutions théologico-scientifiques... Expiration envisage un monde mécanique compliqué dont l'énergie est la pneumatique (mais il y a des fuites !)... Le marchand et la porte de l'alchimiste est un mini-conte des mille et une nuits, où une porte permet de voyager de 20 ans en avant ou en arrière... La nurse automatique brevetée de Dacey est du steampunk, car elle narre le destin commercial des nounous mécaniques qu'on aurait vu apparaitre à la fin du 19ème siècle, et dont leur inventeur espérait une moralité inflexible, propre à améliorer le monde...

Les deux textes qui m'ont le plus frappé sont le plus long et le plus court : Le cycle de vie des objets logiciels narre l'autonomisation d'intelligences artificielles balbutiantes, mais cette autonomie est peut-être juste une entrée dans la misère commune ; et Ce qu'on attend de nous, un texte de 5 pages consacré à un objet d'une simplicité diabolique : juste un petit boitier doté d'un bouton qui allume un voyant ; mais basé sur la physique la plus avancée, ce boitier nous devance d'une seconde dans le temps, quoi que vous fassiez il s'allumera toujours une seconde avant la pression de votre doigt, ce qui provoque une crise existentielle mondiale...

Il est probable que Ted Chiang tire son inspiration autant d'Isaac Asimov que de Jorge Luis Borges, c'est-à-dire que ça veut d'abord jouer avec malice, talent et émotion, avec les limites de notre compréhension du monde et de notre condition. Respects.

 

Sylvain FONTAINE
Première parution : 15/3/2021
nooSFere


Edition DENOËL, Lunes d'Encre (2020)

    Voici presque trois lustres qu’en notre bonne vieille terre de France paraissait un livre des plus remarquables, resté inégalé en ce siècle : La Tour de Babylone, premier recueil de Ted Chiang. Dire que notre auteur, qui a commencé à publier en 1990, voici trente ans, est un auteur parcimonieux, relève de l’euphémisme achevé. Contrairement à la plupart de ses confrères et consœurs qui ne sont traduits qu’avec parcimonie – quand ils le sont –, Ted Chiang fait partie des rares à voire leur œuvre traduite en intégralité. Deux recueils, dix-sept nouvelles en tout et pour tout. Affirmer que ce livre est attendu relève de la tautologie…

    Tour d’horizon :

    Avec en ouverture « Le Marchand et la porte de l’alchimiste ». Dans une Bagdad qui semble celle des Mille et une nuits — Chiang a trouvé ce contexte propice en raison de la place de la destinée dans l’Islam –, un alchimiste dispose de portes temporelles dont il fait profiter ses clients ébahis auxquels il conte d’étranges histoires. L’auteur opte pour une option rare : celle où il est impossible de changer le passé, de créer des paradoxes. Si le passé s’est déroulé ainsi qu’il l’a fait et que vous entreprenez un tel voyage temporel, votre action dans le passé est déjà intégrée à votre présent mais il est de plus déjà écrit que vous feriez ce voyage.

    « Expiration » nous introduit dans l’un des univers les plus singuliers qu’ait su créer la SF. Un monde inséré au sein d’une infinie masse de métal où vit une société de robots pneumatiques et où la circulation d’air est le souffle de vie, la source première d’énergie ainsi que de toute pensée. Nous y suivons les tribulations d’un robot chercheur s’inquiétant d’une soudaine baisse de pression. L’auteur nous y montre son personnage observant son mécanisme de pensée à l’instar de celui de la fourmi électrique de Dick et utilise l’air comme une métaphore de l’accroissement de l’entropie – magistral, prix Hugo 2009 et initialement traduit par Roland Wagner sous le titre « Exhalaison » dans le n°56 de Bifrost.

    « Ce que l’on attend de nous », une short short, met en scène la commercialisation d’un appareil contenant une boucle rétro-temporelle d’une seconde. La diode s’allume une seconde avant que l’on appuie sur le bouton. Si la diode s’allume, c’est que quelqu’un « a déjà appuyé » sur le bouton une seconde dans l’avenir. Chiang interroge dès lors ce qui reste du libre-arbitre si nous ne sommes plus sur le cutting edge du temps, mais à la traine d’une seconde dans un passé déjà figé.

    « Le Cycle de vie des objets logiciels », longue novella de 130 pages, nous entretient de l’éducation. Celle des objets logiciels (digimos) y étant comparée à celle des enfants, voire des animaux, et où l’auteur aborde la responsabilité parentale.

    « La Nurse automatique brevetée de Dacey », pendant du texte précédent, nous révèle ce qu’il advient – selon Ted Chiang – des enfants dont l’éducation aurait été exclusivement confiée à des machines avec les meilleures intentions du monde, lesquelles pavent le chemin de l’enfer et les chiens ne faisant pas des chats…

    Dans « La Vérité du fait, la vérité de l’émotion », l’auteur donne ici à réfléchir sur l’invention d’une mémoire absolue et l’opportunité de se souvenir de tout, qu’il met en abîme avec l’irruption de l’écriture au sein d’une culture orale à l’époque coloniale. Il pèse le pour et le contre, mais ne s’étend pas sur l’une des principales qualités de la mémoire, la faculté d’oubli. Que pourrait-on faire si nous n’avions oublié les traumatismes d’échecs de la petite enfance ? Quelle résilience possible pour qui garderait un parfait souvenir des pires souffrances endurées, et s’il nous fallait les souffrir à nouveau à chaque évocation ?

    « Le Grand silence » est celui du paradoxe de Fermi. Nous y voyons le cri des perroquets nous interpeller en se proposant comme une possible réponse extraterrestre sans toutefois se faire trop d’illusion quant à nous.

    « Omphalos » est un ensemble de prières adressées à Dieu, ainsi qu’il se doit, par une chercheuse dans un univers où le créationnisme est la réalité physique du monde, mais où une découverte astronomique pourrait gravement grever la foi en démontrant que l’humanité n’est pas le dessein de Dieu, si tant est qu’il en ait un.

    Enfin, dans « L’Angoisse est le vertige de la liberté », les prismes permettent de communiquer avec des alternatives quantiques à notre monde et de voir ce que l’on aurait pu être et faire. Il en découle un certain nombre de problèmes psychosociaux. Des gens pouvant se sentir coupable de n’avoir pas fait aussi bien que leur parallêtre. Ted Chiang interroge encore le libre-arbitre, qui n’est bien sûr qu’une illusion à laquelle il est impossible d’échapper dans un univers à la fois déterministe et imprédictible.

    Tous ces textes, extrêmement intéressants, suscitent maintes réflexions sur les implications morales de la technique. Toutefois, à l’exception des deux premiers, ils s’avèrent très (trop ?) didactiques. Ted Chiang expose sa pensée en nous invitant à le suivre. Il ne se passe pas grand-chose non plus dans ces récits, qui sont autant d’articles de réflexions, passionnants, certes, déguisés en fictions. C’est hautement intellectuel. Ce recueil est très (trop, encore) intéressant, mais il ne surpassera ni n’égalera La Tour de Babylone. Le record du monde n’est pas tombé. Expiration restera comme l’un des livres de SF importants de la dernière décennie, mais malgré tout décevant quoi qu’excellent.

Jean-Pierre LION
Première parution : 1/10/2020
Bifrost 100
Mise en ligne le : 16/4/2024

Prix obtenus
Locus, Recueil, 2020

Le Cycle de vie des objets logiciels : Hugo novella / Court roman, 2011
Locus novella / Court roman, 2011
Expiration : British Science Fiction nouvelle / Short story, 2008
Hugo nouvelle / Short story, 2009
Locus nouvelle / Short story, 2009
Grand Prix de l'Imaginaire nouvelle étrangère, 2010
Le Marchand et la porte de l'alchimiste : Nebula novelette, 2007
Hugo novelette, 2008
Omphalos : Locus novelette, 2020

retour en haut de page

Dans la nooSFere : 87293 livres, 112213 photos de couvertures, 83729 quatrièmes.
10815 critiques, 47164 intervenant·e·s, 1982 photographies, 3915 adaptations.
 
NooSFere est une encyclopédie et une base de données bibliographique.
Nous ne sommes ni libraire ni éditeur, nous ne vendons pas de livres et ne publions pas de textes. Trouver une librairie !
A propos de l'association  -   Vie privée et cookies/RGPD