Défier les lois de la physique avec Ant-Man, et celles de l’anatomie avec Pacific Rim. S’aventurer aux abords d’un trou noir… et y plonger avec Interstellar. Aller à rebrousse-temps avec Tenet. Communiquer avec les aliens lors d’un Premier Contact. Se retrouver Seul sur Mars et tenter d’y survivre. Disséquer La Chose d’un autre monde, puis s’interroger sur l’origine et l’évolution des espèces extraterrestres…
Dans cette édition définitive de La Science fait son cinéma, enrichie de cinq articles supplémentaires, Roland Lehoucq, astrophysicien au CEA et président du festival nantais des Utopiales, et Jean-Sébastien Steyer, paléontologue au Muséum national d’histoire naturelle de Paris et au CNRS, examinent les rapports entre science et septième art à travers le contenu scientifique d’une vingtaine de films. Ici, c’est la démarche qui importe : mobiliser ses connaissances, s’informer, aiguiser son esprit critique, développer sa capacité d’analyse, goûter au plaisir de la découverte.
Et, comme toujours, faire de la science en s’amusant !
Fort du succès de Fairedessciences avec Star Wars de Roland Lehoucq et des dossiers « Scientifiction » dans la revue Bifrost, le Bélial’ se tisse un habit de vulgarisateur de science et lance une nouvelle collection dédiée à la transmission du savoir, « Parallaxe », dotée d’une identité visuelle forte et belle, conçue par Cédric Bucaille. Ainsi, deux fois l’an, Olivier Girard (son fringant éditeur) et Roland Lehoucq (son savant directeur) se lanceront cheveux au vent à l’assaut des ombres de l’ignorance. « Parallaxe », c’est une question de point de vue, celui de la science-fiction sur le monde et de la science sur la fiction. Deux titres en assurent l’ouverture : La Science fait son cinéma de Roland Lehoucq (astrophysicien) et Jean-Sébastien Steyer (paléontologue), et Comment parler à un alien ? de Frédéric Landragin (linguiste). Pour aborder des sujets aussi distincts que la relativité en physique ou l’hypothèse de Sapir-Whorf en linguistique, les deux titres adoptent des approches différentes.
La Science fait son cinéma reprend, avec quelques retouches cosmétiques, quatorze articles publiés précédemment dans Bifrost, et les organise thématiquement pour tisser un lien. Le principe est efficace, les auteurs choisissent un film pour illustrer une thématique dont ils discutent du traitement en regard des connaissances scientifiques actuelles. L’accent est mis sur les disciplines de la physique et de la biologie. Ils y abordent aussi bien les surprises qui attendraient Paul Rudd dans le monde réel lorsqu’il revêt le costume d’Ant Man et les sévices que le trou noir Gargantua réserverait à Matthew McConaughey dans Interstellar, que la crédibilité des espèces extraterrestres en SF, ou les menaces qui pèsent sur les héros hollywoodiens dans l’espace. Le sérieux du fond s’orne d’humour et de bienveillance, même quand ça tape fort, comme sur Prometheus ou Pacific Rim.
Comment parler à un alien ? prend lui la forme d’un exposé sur les recherches actuelles en linguistique, plus cohérent dans sa structure, et focalisé dans son propos. Le livre s’intéresse à deux théories qui ont motivé plus particulièrement les auteurs de SF : celle de la grammaire universelle de Chomsky et celle de Sapir-Whorf sur l’influence du langage sur notre perception du monde. À travers l’étude de linguistique-fictions emblématiques, de L’Enchâssement (le Bélial’) de Ian Watson à « L’Histoire de ta vie » de Ted Chiang (dans le recueil La Tour de Babylone - « Folio SF »), et de nombreuses autres encore, l’auteur introduit progressivement le lecteur au vocabulaire et aux concepts de la linguistique moderne, jusqu’à les lui rendre familiers. Il raconte l’évolution des langues naturelles, celles que l’on parle, puis celle des langues synthétiques, celles que l’on crée, pour aboutir finalement à la question de la communication avec une espèce autre, aussi différente que pourrait l’être un extra-terrestre, et de toutes les difficultés qu’elle implique. Frédéric Landragin livre un texte passionnant, pointu dans ses concepts, qui reste accessible au béotien.
Ces deux ouvrages s’adressent essentiellement aux lecteurs de science-fiction. Les références à des œuvres plus ou moins connues y sont nombreuses, et il est utile de s’y entendre pour apprécier pleinement le propos. Cela étant, les deux titres réussissent magnifiquement l’exercice délicat de la vulgarisation scientifique. Notons enfin que la collection accomplit un pas de titan en traitant de la science-fiction non plus simplement en tant qu’objet, mais aussi en tant que source de savoir. Chapeau !
FEYDRAUTHA Première parution : 1/1/2019 Bifrost 93 Mise en ligne le : 11/7/2023