Rudy RUCKER Titre original : Master of Space and Time, 1984 Première parution : New York, USA : Bluejay Books, A Bluejay International Edition, novembre 1984ISFDB Traduction de Jean BONNEFOY Illustration de Jean-Pierre TESSARI
DENOËL
(Paris, France), coll. Présence du futur n° 418 Dépôt légal : mars 1986, Achevé d'imprimer : mars 1986 Première édition Roman, 224 pages, catégorie / prix : 6 ISBN : 2-207-30418-3 Format : 10,8 x 17,8 cm✅ Genre : Science-Fiction
Imaginez que vous rencontriez le Maître de l'espace et du temps ?
Incroyable… surtout quand ledit Maître n'est autre que votre vieux pote Harry, un inventeur un peu tordu dont le « blonzeur » (c'est le nom de l'invention) lui permet de modifier la réalité à sa guise, en modifiant la physique même de notre univers.
Une fois blonzé, on peut voir se réaliser tous ses vœux : devenir beau et riche. Voler. Supprimer la faim dans le monde (à coups d'arbres à côtelettes et de pommiers à beignets).
Mais tout n'est pas si simple, et comme dans tout conte, il y a une morale, même si celle-ci fait intervenir la physique quantique, la constante de Planck et les gluons.
L'auteur :
Se partageant avec un égal bonheur entre les mathématiques et la littérature, Rudy Rucker sait avec humour et talent marier les deux domaines.
Comme en témoigne le prix Philip K. Dick qui a couronné son roman Software, en 1983.
Maître de l'espace et du temps est son premier roman publié en français.
Critiques
Dans son ouvrage de vulgarisation scientifique rigolote La quatrième dimension (voir critique dans FICTION 373), le mathématicien Rudy Rucker racontait, à l'aide de petits dessins et de jeux à faire par le lecteur, comment passer d'une dimension à une autre ou d'un temps à un autre, avec le secours de la physique moderne... C'est à un même survol qu'il se livre dans Maître de l'espace et du temps, à un même jeu — ou à une même suite d'énigmes paraphysiciennes (et pataphysiciennes). Un savant farfelu, Harry Gerber, invente grâce à un paradoxe temporel bien connu (la machine lui arrive avant qu'il l'ait inventée, donc il n'a plus qu'à la copier au présent pour se la renvoyer dans le passé et... etc) un blonzeur, qui lui permet, avec la complicité de son pote (et récitant) Joe Fletcher, de « devenir le maître de l'espace et du temps »... pendant quelque temps. S'ensuivent donc, s'emboîtent donc des péripéties à la fois surréalistes et logiques (parfois), comme celle-ci : Gerber a découvert que l'univers s'accroît : passant alternativement dans le passé et le futur, il suscite donc une infinité de doubles de lui-même, tout petits, ou géants ; en chemin, il projette un inoffensif lézard dans le futur : le lézard devient Godzilla. Et tout ceci grâce aux « gluons » : Les gluons sont les particules qui collent entre eux les quarks. Un proton est composé de trois quarks plus quelques gluons pour les maintenir ensemble. Les gluons existent en trois couleurs : rouge, bleu et jaune. Les rouges sont les plus faciles à obtenir (p. 51).
Et ainsi de suite, comme dirait l'autre. Ce manuel de physique farfelu et pince-toi-d'là possède ses limites : plus ou moins étendues selon la bonne ou la mauvaise volonté du lecteur. De ses connaissances aussi. Edwin Abbott et Lewis Carroll, comme le prétend la prière d'insérer de l'ouvrage ? plus modestement Lewis Padgett, le pseudonyme d'Henry Kuttner et Catherine Moore quand ils écrivaient les aventures d'un autre savant farfelu, le professeur Callegher, au très fort parfum de fourties, de séries B et de Galaxy... Hommage, alors ? Certainement, et même bien lourdement appuyé, comme en témoigne le long, trop long épisode consacré aux buveurs de cerveau (ici appelés mord-moelle — l'nœud ? ?), des créatures qui viennent tout droit des larves titaniennes de Marionnettes humaines de Robert Heinlein. Naturellement, on sourit souvent. Mais il me semble tout de même que cet aimable et astucieux pastiche a été salué avec des cris d'enthousiasme quelque peu superfétatoires...