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Shadrak dans la fournaise

Robert SILVERBERG

Titre original : Shadrach in the Furnace, 1976
Première parution : Analog Science Fiction/Science Fact, août à octobre 1976. En volume : États-Unis, Indianapolis (Indiana) : Bobbs-Merrill Company, 1976
Traduction de Robert LOUIT

Robert LAFFONT (Paris, France), coll. Ailleurs et demain
Date de parution : octobre 1981
Dépôt légal : 4ème trimestre 1981, Achevé d'imprimer : 18 septembre 1981
Première édition
Roman, 288 pages, catégorie / prix : nd
ISBN : 2-221-00714-X
Format : 13,5 x 21,5 cm
Genre : Science-Fiction



Quatrième de couverture
     De sa tour d'Oulan-Bator, Gengis II Mao IV Khan règne, en ce XXIe siècle, sur le monde entier. Sur ce qu'il en reste. En 1991, une éruption cataclysmique du Cotopaxi a assombri le ciel pour des semaines. A la faveur de la terreur et de la nuit, des émeutes. Puis des révolutions. Des guerres, enfin. Et sur les ruines du vieil ordre, les survivants meurent lentement du pourrissement organique, virus surgi d'une usine d'armes bactériologiques. L'humanité pourrit sur pied.
     Sauf à Oulan-Bator, sauf dans l'organisation du Khan, où grâce à l'antidote de Roncevic, développé sur son ordre, le pourrissement est arrêté. Grâce à l'électronique, le Khan a des yeux partout. Il est le garant de Reconstruction. Il manifeste une vitalité prodigieuse. Il a quatre-vingt-treize ans. Il ne veut pas mourir. Avec l'aide de Shadrak, noir américain devenu son médecin, il ne mourra jamais. Grâce à trois projets immortalité dont le plus sinistre, Avatar, consiste à transférer dans un corps jeune sa personnalité. Pour assurer une tyrannie éternelle ?
 
     Robert Silverberg (Les monades urbaines, Le château de Lord Valentin) propose ici un roman d'une exceptionnelle vigueur, des personnages hors du commun, une action haletante, et aussi une réflexion profonde sur le pouvoir. Shadrak est peut-être son chef-d'œuvre.
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition LIVRE DE POCHE, SF (2ème série, 1987-) (2008)

     En 2012 Gengis Mao règne sur une Terre au bord du chaos, à Oulan Bator, dans un empire Mongol hérité de l'ancienne URSS. La population humaine a été réduite des deux tiers en raison d'une éruption volcanique gigantesque survenue en Amérique du Sud, et des séquelles d'une guerre bactériologique qui condamne les survivants au « pourrissement organique », sorte de peste du futur.

     Réfugié au sommet d'une Tour en compagnie d'une oligarchie, le tyran dirige, observe, contrôle le monde par l'intermédiaire d'innombrables satellites ou caméras.

     Ce n'est pas sa seule occupation. Prévoyant, il s'est adjoint les services d'un médecin à temps complet, Shadrak Mordecai, dont le corps est incrusté d'une multitude de capteurs qui le renseignent constamment sur l'état de santé de son patient, ou ses activités en cours.

     Pourquoi se doter d'un tel attirail médical ? Gengis Mao est en fait un vieil homme obsédé par la mort dont il repousse l'échéance à coup de transplantations d'organes. Quant à son successeur désigné, Mangu, c'est en réalité un pantin, futur réceptacle de l'esprit du dictateur.

     Mais voilà que Mangu décède. Oui va le remplacer ?

     Paru en 1976, ce roman fut un échec commercial et constitua un tournant dans la carrière de Robert Silverberg. En professionnel de l'écriture, l'auteur cherchera d'autres voies romanesques. S'ensuivront le cycle de « Majipoor » et une série de volumes inégaux, plus volumineux, moins « personnels ».

     C'en sera fini des ouvrages courts et haletants de la « période faste », des flamboyances stylistiques de L'Oreille interne ou du Fils de l'homme.

     Pourtant, à y regarder de plus près, Shadrak dans la fournaise ne mérite pas cet ostracisme.

     Ainsi, les deux thèmes traités par Silverberg, l'identité corporelle (ou plus précisément ici le transfert) et l'interrogation éthique sont au coeur d'Axiomatique, le très remarqué et remarquable recueil de nouvelles de Greg Egan (éditions du Bélial').

     Deux consciences pour un corps unique, à l'instar de L'Homme programmé, autre roman de Silverberg, voilà donc la première bonne surprise conceptuelle de ce livre. Via les capteurs, Gengis Mao et Shadrak se partagent le corps du dictateur. Le médecin est ainsi averti des dérèglements organiques de son patient avant même que les manifestations symptomatiques remontent à la conscience de celui-ci. Silverberg pousse même plus loin l'idée de la confusion identitaire en faisant rédiger le journal intime de Gengis Mao par Shadrak.

     Au delà du thème du transfert (qu'a exploité à outrance un certain Alfred Hitchcok), ce roman invite le lecteur à d'autres réflexions : surgissent en effet aujourd'hui des injonctions médicalo-marketing du type « être à l'écoute de son propre corps » ou « être conscient de son corps ». Mais justement, que savons nous de notre intimité en dehors de manifestations pathologiques qu'il faut absolument réprimer ? L'idée profonde de Silverberg est peut être là : le corps, cet étranger que nous devons réduire au silence.

     Deuxième grand thème abordé dans l'ouvrage : le débat éthique.

     Shadrak dans la fournaise, comme beaucoup de récits de Robert Silverberg, retrace l'itinéraire spirituel d'un personnage. Le nom du médecin n'est d'ailleurs pas anecdotique. Le romancier l'a emprunté à un épisode biblique, le Livre de Daniel.

     La question posée est celle-ci : Gengis Mao est il un Mal nécessaire garant de l'ordre du monde et de sa survie, ou est il un Mal absolu ?

     Dans un premier temps, Shadrak prend parti pour le Mal nécessaire. Mais la mort de Mangu et la révélation qui s'ensuit soulèvent une deuxième question : peut on traiter le Mal sans y succomber à son tour ?

     Les affres de la fournaise évoquée dans le titre s'apparentent donc aux affres de la conscience et du choix.

     Pour résoudre ce dilemme, Shadrak s'efforce de rompre son emmurement moral (les tours n'ont pas bonne réputation chez Silverberg) et d'aller à la rencontre de l'humanité souffrante.

     Voilà donc la matière d'un roman très riche.

     Ces mouvements de l'âme humaine, que renforce le choix narratif du présent de l'indicatif, ne devraient pas laisser le lecteur indifférent.

Jean-Louis PEYRE
Première parution : 1/1/2008
dans Bifrost 49
Mise en ligne le : 26/5/2010

Prix obtenus
Cosmos 2000, [sans catégorie], 1982


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