Il y avait bien longtemps que, par paresse, je n'avais pas lu Caroff... Erreur coupable ! Grâce à lui, et à Simulations, j'ai pu réapprendre opportunément que « Les hommes devaient forcément se battre, c'était dans leur nature », qu'une femme qui fait l'amour prend son pied « comme un cheval de labours », et que si les Noirs encombrent les premiers rangs des amphis de Fac, c'est que « Leurs études étaient payées par leur pays, fallait pas 'igoler sinon pi-ête couper cabéche... » (mais ici, l'auteur a peut-être voulu faire du San Antonio, qui sait ?).
Trêve de plaisanteries faciles et d'idéologie hystérique : Simulations n'est pas un mauvais roman ; c'est même un plaisant exercice de suspens, où l'on suit deux virils pilotes de chasse (ils semblent appartenir à l'an 3000 et quelque, mais le futur décrit ne paraît pas excéder une dizaine d'années standard) qui, à la suite d'un accident de simulateur, sautent continuellement d'un univers à un autre, d'un temps à un autre — à moins que tout n'ait lieu dans leur cerveau. L'explication finale ne casse pas les barres mais, grâce à une indéniable imprégnation jeuryenne, Caroff nous mène en bateau sans ennui. Parfois même, à l'occasion d'incidentes de récit, ou de la description de personnages secondaires, il paraît être tenté par l'écriture, en fouillant son style avec des pinces à sucre, au lieu de pioches. Et puis il y a de l'humour, présente par exemple dans cette femme enceinte acoustique, haha !
Faut-il suivre l'auteur ? En tout cas, on peut s'y arrêter le temps de ce bouquin...
Jean-Pierre ANDREVON (lui écrire) (site web)
Première parution : 1/1/1984 dans Fiction 347
Mise en ligne le : 1/12/2005