DENOËL
(Paris, France), coll. Présence du futur n° 481 Dépôt légal : décembre 1988 Première édition Recueil de nouvelles, 224 pages, catégorie / prix : 4 ISBN : 2-207-30481-7 Format : 11,0 x 18,0 cm Genre : Science-Fiction
Dans ce troisième tome de l'intégrale des nouvelles inédites ou devenues introuvables que Présence du Futur lui consacre, Philip K. Dick répond comme on pouvait le faire à la charnière des années 53-54. Il y a des extraterrestres roublards ou malveillants, des forces obscures qui nous manipulent, d'étranges gauchissements de l'espace et du temps. Mais s'il puise allègrement dans le bric-à-brac du genre, Dick, comme malgré lui, infléchit déjà son matériau dans des directions personnelles.
Le thème du simulacre, la vision paranoïaque du monde et jusqu'à l'interrogation métaphysique développée dans ses dernières œuvres : autant d'affleurements qui font de ces neuf textes (pour la première fois traduits en français, et dont l'un, paru sous pseudonyme, ne figure même pas dans la plupart des bibliographies) une sorte de « Dick : mode d'emploi ».
1 - Emmanuel JOUANNE, Introduction, pages 7 à 8, introduction 2 - L'Évolution d'un amour vital (The evolution of a vital love, 1975), pages 11 à 32, article, trad. Emmanuel JOUANNE 3 - Tant qu'il y a de la vie… (Some Kinds of Life, 1953), pages 35 à 50, nouvelle, trad. Pierre K. REY 4 - Le Pendu dans le square (The Hanging Stranger, 1953), pages 53 à 73, nouvelle, trad. Alain DORÉMIEUX 5 - Projet : Terre (Project: Earth, 1953), pages 77 à 107, nouvelle, trad. Pierre K. REY 6 - Des yeux voltigeurs (The Eyes Have It, 1953), pages 111 à 115, nouvelle, trad. Alain DORÉMIEUX 7 - Tony et les scarabées (Tony and the Beetles, 1953), pages 119 à 138, nouvelle, trad. Pierre K. REY 8 - Un vaisseau fabuleux (Prize Ship, 1954), pages 141 à 171, nouvelle, trad. Pierre K. REY 9 - Derrière la porte (Beyond the Door, 1954), pages 175 à 183, nouvelle, trad. Alain DORÉMIEUX 10 - La Crypte de cristal (The Crystal Crypt, 1954), pages 187 à 216, nouvelle, trad. Pierre K. REY
Critiques
Déjà le troisième volume de l'intégrale des nouvelles de Philip K. Dick inédites en France ou devenues difficiles à trouver : comme le temps passe ! Et les quatre volumes suivants sont d'ores et déjà annoncés pour l'année en cours, sous les titres provisoires de Un Auteur Eminent, Souvenir, Servir le Maître et Le Voyage Gelé. Comme dirait Jouanne en préface, « Dick n'a jamais été aussi vivant »...
Derrière la Porte continue l'exploration de l'œuvre de l'auteur, sur les années 1953 et 1954, durant lesquelles il a écrit et publié un nombre ahurissant de nouvelles (et on en découvre encore aujourd'hui ; pour preuve Tant qu'il y a de la Vie, présentée ici, jadis sortie sous le pseudonyme de Richard Phillips), assiégeant, on s'en rend compte à la lecture de sa bibliographie, la quasi-totalité des supports alors existants. On y retrouve un Dick encore débutant (sa première publication ne remontant qu'à 1952), obligé de composer avec la Science-Fiction de l'époque et la thématique alors en vigueur (les invasions extraterrestres notamment), donnant des textes bien classiques, mais un Dick qui se cherche, en qui on peut déjà, avec une bonne dose d'intuition, déceler le grand, l'immense auteur qu'il deviendra et quelques uns de ses traits caractéristiques : sa paranoïa dévorante (Le Pendu dans le Square, la chute de La Crypte de Cristal...), sa peur de la femme, ce que d'autres appelleraient la femme castratrice (Derrière la Porte).
Mais un thème constant apparaît tout au long de ces pages : celui de la guerre. Une guerre capable de décimer un pays entier, de dresser d'anciens amis les uns contre les autres. Il ne faut pas perdre de vue que la guerre de Corée faisait encore rage lorsqu'il écrivit certains de ces textes et que l'on était de surcroît en pleine guerre froide ! Et par conséquent, des nouvelles comme Tant qu'il y a de la Vie et Tony et les Scarabées, par exemple, ne sont rien d'autre qu'un violent réquisitoire contre la bêtise humaine, un plaidoyer pour la paix et l'amour. Certains auteurs actuels feraient bien d'en prendre de la graine !
Je ne pourrais donc, ne serait-ce qu'à ce titre, que conseiller la lecture de ce recueil, lequel voit le retour d'Alain Dorémieux à la traduction de son auteur favori, et ce en attendant toujours la biographie sur laquelle l'excellent Maxim Jakubowski planche depuis plusieurs années déjà.