Lisa TUTTLE Titre original : Gabriel, 1987 Première parution : New-York, USA : Tor Book, 1987 Traduction de Nathalie SERVAL
DENOËL
(Paris, France), coll. Présences n° (5) Dépôt légal : février 1992 Première édition Roman, 262 pages, catégorie / prix : 115 FF ISBN : 2-207-23941-1 Format : 14,0 x 20,5 cm Genre : Fantastique
« Il s'appelait Gabriel Archer et avait été mon mari durant onze mois. Il était mort à vingt-trois ans, à quelques jours de mon dix-neuvième anniversaire. Dix ans plus tard jour pour jour, il était revenu me hanter. »
En revenant s'installer à La Nouvelle-Orléans, où elle a trouvé un emploi enfin intéressant, Dinah Whelan savait qu'elle devrait affronter le souvenir de Gabriel, de sa mystérieuse séduction et des instants d'égarement qui ont fini par le mener au suicide. Mais rien ne pouvait lui laisser prévoir que le passé allait la poursuivre sous les espèces de Ben, un gamin solitaire et attachant qui ressemble étrangement à Gabriel et s'identifie au défunt jusqu'à vouer à Dinah une véritable adoration.
D'abord intriguée, puis amusée et émue — quoi de plus charmant qu'un beau petit garçon mal aimé ? — , Dinah commence à paniquer lorsque la passion de Ben se fait envahissante, encombrante, dévorante...
Comme celle de Gabriel, qui lui avait juré un amour plus fort que le temps et la mort elle-même.
Lisa Tuttle, née en 1952 au Texas et installée en Grande-Bretagne depuis 1980, a publié son premier récit à l'âge de vingt ans. Auteur de nombreuses nouvelles, domaine dans lequel s'épanouit son art de l'ambiguïté et du sous-entendu inquiétant (voir Le Nid dans la collection Présence du Fantastique), elle s'impose aujourd'hui comme une romancière dont la petite musique de nuit ne s'oublie pas de sitôt.
(critique commune du roman Gabriel et du recueil Sur les ailes du cauchemar)
Je ne dirai rien du roman Gabriel, qui m'a énormément déçu. C'est du Harlequin travesti en pseudo fantastique avec fantôme, enfant de la copine qui est la réplique du mari mort, fuites, etc. A quoi se mêle une histoire sans intérêt de club de remise en forme.
En revanche Sur les ailes du cauchemar est un recueil intéressant de 13 nouvelles. Toutes ne sont pas des chefs d'oeuvre, mais certaines comme Lézard du désir sont à marquer d'une pierre (tombale) blanche. Je me suis interrogé sur la première, qui donne son titre au roman. Personnellement elle m'a troublé, malgré des facilités et l'aspect prévisible de la chute. Sans regrets annonce ou rappelle un peu Gabriel, mais c'est mieux traité dans le cadre d'une nouvelle (L.Tuttle me parait meilleure nouvelliste que romancière). La colonisation d'Edwin Beal reprend le vieux thème de SF de « l'homme monde » et des ET minuscules, mais c'est ici traité sur un mode horrifique, et qui n'est pas sans rappeler Lukundoo le chef d'oeuvre d'E. Lucas White paru dans les Histoires abominables présentées par Hitchcock.
Un tel recueil, qui fait suite celui de Le nid (13 nouvelles déjà dans le n°6 de la même collection) amène à poser une question rebattue, mais qui s'impose à la réflexion. A savoir : les auteures de textes fantastiques explorent-elles vraiment le même monde fantasmatique que les auteurs masculins ? J'avoue qu'à lire ces textes, ceux de Silvina Ocampo, et d'autres, le doute me saisit. Ce n'est pas une question d'écriture, mais bien une question d'angle d'attaque et de choix des éléments. Je n'insisterai pas sur le nombre de fois où un enfant est au centre du récit (mais chez Henri James aussi, dans Le Tour d'écrou...). Ce n'est pas sa présence, c'est le type de rapports que l'enfant permet dans ces textes. Rapports à l'accouchement et à la mort, avec la fausse-couche comme prétexte à l'apparition de fantômes. Fantasmes liés à la manière de nourrir l'enfant qui est parfois une sorte de monstre, de « chose » « alien » comme on le voyait déjà dans La tombe de Jamie in Territoires de l'inquiétude n°1. Sans oublier le fait que ce qui importe dans ces textes de Tuttle, c'est moins les faits que les sentiments et leur aspect passionnel. Parfois comme dans le romanGabriel, ils envahissent tout et c'est raté, mais dans les nouvelles, c'est souvent fascinant.