Robert SHECKLEY Titre original : Options, 1975 Première parution : New York, USA : Pyramid Books, juin 1975ISFDB Traduction de Philippe R. HUPP Illustration de (non mentionné)
CALMANN-LÉVY
(Paris, France), coll. Dimensions SF Dépôt légal : 2ème trimestre 1976, Achevé d'imprimer : 15 avril 1976 Première édition Roman, 272 pages, catégorie / prix : nd ISBN : 2-7021-0133-X Format : 14,0 x 21,0 cm✅ Genre : Science-Fiction
Mishkin, l'idiot, le cosmonaute raté, s'échoue sur Harmonia à la suite d'une panne. Rien de très grave, en apparence. Mais Harmonia, planète-cerveau, renferme mille pièges. Et quand on n'a pour seul compagnon qu'un robot-tarentule, mal embouché, la recherche d'une minable pièce de rechange se transforme en odyssée. On rencontre en chemin des tas de créatures fabuleuses, y compris plusieurs autres versions de soi-même.
Options, c'est la promenade philosophique de l'homme et du robot aux confins de l'espace intersidéral et de l'espace mental.
Options, c'est l'intrusion du zen dans la science-fiction.
Options, c'est un voyage qui n'a pas de fin, un trip cosmicomique.
Options, c'est le retour de Robert Sheckley au roman après huit ans d'absence, un retour qui surprendra plus d'un lecteur.
Critiques
Le livre contient son propre mode d'emploi, page 186 : « Ces discontinuités apparentes ont été étudiées et mises en place pour votre propre sécurité et votre bien-être. Nous vous prions de ne pas les rattacher au moyen de relations « logiques ». Ce genre de liaison prématurée nuirait considérablement à leur caractère factice et aurait pour résultat un risque d'accident très dangereux, voire fatal pour vous. Nous vous recommandons d'appréhender votre environnement de la manière la plus dissolue ». C'est sans doute pourquoi le prière d'insérer parle d'« intrusion du zen dans la science-fiction ». Comme les gourous n'ont pas encore apporté la lumière en bas Dauphiné, je n'y vois que l'expulsion de la science-fiction par le zani. Ils peuvent pourtant faire bon ménage, à preuve Mindswap (Transfert stellaire). Mais à vouloir surcarroller Lewis, Sheckley a tout perdu, même l'humour. Malheur au canular qui se prolonge et se prend au sérieux !
Options est un roman bien étrange qui sort de la verve quotidienne de Sheckley et qui, en partie pour cela, a été diversement accueilli lors de sa parution par les fans de l'auteur. Il dérange parfois par ses aspects incompréhensibles, amuse parfois par sa coloration loufoque, voire absurde. Mais surtout, ça n'est pas un roman. C'est un traité qui porte sur le sujet suivant : comment écrire un roman sans queue ni tête, ou, plus subtilement, comment tout faire pour ne pas écrire un roman ? Sheckley a parfaitement réussi dans sa tâche. Il a tout fait pour ne pas écrire un roman, et ses efforts ont donné Options.
Ne nous appesantissons pas sur le procédé quelquefois facile dont Sheckley détermine lui-même les règles à la page 128 (« Ces discontinuités apparentes ont été étudiées et mises en place pour votre propre sécurité et votre bien-être. Nous vous prions de ne pas les rattacher au moyen de relations » logiques « . Ce genre de liaison prématurée nuirait considérablement à leur caractère factice et aurait pour résultat un risque d'accident très dangereux, voire fatal, pour vous. Nous vous recommandons d'appréhender votre environnement de la manière la plus dissolue. N'oubliez pas que, pour une perception de champ totale, il faut un balayage à faible intensité. En vous remerciant. ») et à la 129 (« Lisez les inversions. » « II faut s'attendre à des distorsions. »), qui lui permet finalement d'écrire un livre sur lui-même. Car Options, est comme l'éclat de verre d'un vaste miroir informe, une poussière d'autobiographie. L'auteur est le sujet d'Options, l'auteur et ses rapports avec ses personnages, l'auteur et sa haine de sa création, l'auteur et l'inanité de son imagination qui se résume à une intrigue succinte ; retrouver une pièce de moteur d'astronef qui plus que probablement n'existe que dans son esprit...
Options aurait pu porter ce sous-titre : manuel de l'écrivain qui ne veut aller nulle part, ou comment l'écrivain sue à influer sur un univers créé à l'origine par lui et qui échappe maintenant à son créateur, intégralement, qui lui rit au nez, qui tourne son orgueil en dérision, en un mot qui prend la poudre d'escampette.
Options est un livre autonome dans lequel l'auteur devient un personnage, un héros éreinté, un dieu qui ne croit pas en lui-même. Un livre pathétique qui n'est absolument pas drôle et qu'il convient de lire avec des lunettes pare-balles.
Attention, danger, livre miné ! Si vous êtes zénés, c'est normal...
Paru en 1976 dans la collection Dimensions, Options avait, à l'époque, dérouté plus d'un lecteur 1.
Imaginez un bon vieux spacionef en train de couler une bielle, ou quelque chose dans le genre, juste après l'échangeur des Nuages de Magellan. Pas d'autre solution pour cet innocent de Mishkin, cosmonaute de profession, que de poser sa charrette sur Harmonai. Mais sur cette foutue planète, les fantômes et autres hallucinations ont la même consistance que le réel car « le système nerveux n'est pas capable de faire la différence entre les événements réels et les événements imaginaires ». Flanqué d'un drôle de robot « du genre vieux-jeu, introverti et d'éthique protestante », Mishkin va devoir se taper un long voyage semé d'embûches, de digressions et de réflexions parallèles.
Déroutant roman-kaléidoscope qui se délite à chaque page et où Alice rencontre l'Idiot dans une ambiance zen, Options est incontestablement un drôle de trip. Même trois ans après !
Notes :
1. Au fait, toujours chez Calmann-Lévy, vient juste de sortir le tout dernier Sheckley Le mariage alchimique d'Alistair Crompton, un Sheckley farfelu et très en verve dont nous parlerons à la rentrée.
Après le Vent de nulle part, encore un ouvrage de chez Calmann-Lévy (et donc retenu d'abord par R. Louit) qui passe en poche. Bravo Demuth. Options est un ouvrage adorablement dément. Comme il est dit p. 124 « vous êtes priés de laisser votre logique au vestiaire ». La seule logique, ici, étant celle du récit, dans ses fantaisies. Aucune autre contrainte, dans ces 77 chapitres dont certains n'ont que 3 lignes ; et ce ne sont pas les moins chargés de sens — voyez les chap. 56, 59, 60 (ou encore, proche de la tradition bouddhique, les 35 ou 43). Imaginez un récit, parodiant toutes les inventions de la SF, commenté par Woody Allen en forme, et vous avez un aperçu du monstre. Comment accepter, après un tel feu d'artifice, les récits sages et linéaires, cousus de fil blanc d'un itinéraire ? Sheckley semble avoir pour but d'écœurer par sa réussite tous les auteurs qui prétendraient venir ensuite. Il réussit presque dans son entreprise. Un chef d'œuvre de dinguerie.