Henry KUTTNER Titre original : Fury / Destination Infinity, 1950 Première parution : Astounding Science Fiction, mai à juillet 1947. En volume : Grosset & Dunlap, Science Fiction Classics, 1950ISFDB Traduction de Jean-Claude DUMOULIN Illustration de (non mentionné)
HACHETTE / GALLIMARD
(Paris, France), coll. Le Rayon fantastique n° (54) Dépôt légal : 1er trimestre 1958, Achevé d'imprimer : mars 1958 Première édition Roman, 256 pages, catégorie / prix : nd ISBN : néant Format : 11,7 x 18,0 cm✅ Genre : Science-Fiction
Sept cents ans après avoir fait sauter sa planète natale dans ses guerres atomiques, l'humanité s'est refait une vie sur Vénus. Mais à la surface de l'astre se déchaîne l'exubérance monstrueuse du sol même et des êtres d'une ère secondaire. La « terre » ferme est fermée à l'homme.
Le voici donc refoulé au lieu d'origine de toute vie : à la mer. Puis, au fond des océans de Vénus, sous les dômes gigantesques, imperméables et climatisées, l'homme a dépassé son niveau de civilisation sur la Terre. L'artificiel triomphe sous le règne nécessaire de la science. La société s'est fossilisée en castes. La plus haute se distingue par une sorte d'immortalité héréditaire. Elle en tire, avec une domination sans recours, ces jouissances sans combat où les maîtres s'épuisent. Et du haut en bas, cette société, figée au sein des mers et de l'abondance, se met à pourrir peu à peu.
Comment un homme de proie et de génie — et comme si souvent un aristocrate rejeté par sa classe — révolutionne toutes choses. Comment il culbute l'ordre établi par des menées aussi criminelles que grandioses. Comment il arrache les hommes à la décadence pour les lancer à la conquête de la surface de Vénus, avec ses monstres fascinateurs ou atroces et sa géographie de cauchemar. Comment il reçoit la rétribution stupéfiante et logique de son génie et de ses crimes. Voilà ce que relate cette biographie épique d'un César des temps à venir.
Naturellement, vous autres fidèles-lecteurs-de-SF, depuis le commencement des Temps, vous connaissez ce roman. D'accord, mais après tout, vous n'êtes pas les seuls, il y a les petits nouveaux tremblants, impressionnés, ralliez-vous à mon panache noir, je suis des vôtres, je roule pour vous. Et je vous conseille, sans blague, de vous jeter sur ce livre, qui narre talentueusement une bien belle saga, en 249 pages imprimées plutôt mini. Ecoutez ça : la Terre, on n'en parle plus, elle est ratatinée depuis belle lurette, polluée, machinée, essorée, laminée, bouzillée, bref, complètement naze. A présent, l'humanité vit sur Vénus. Sous la mer, dans les immenses dômes des Garderies. L'humanité, c'est principalement les Familles (immortelles, anciens survivants contaminés de bien chouette façon puisque la contamination égale l'immortalité) qui dirigent le monde, et les sujets normaux, ceux qui meurent connement vers soixante-dix ans. C'est aussi les rares Francs Compagnons d'antan, qui avaient commencé la colonisation des territoires de Vénus. C'est la monotonie d'une vie parfaitement réglée, dans laquelle tout est prévu, toujours. Et dans tout cela, voici Sam Reed. Pauvre Sam, trafiqué biochimiquement dès sa naissance parce que son père, un immortel cinglé de la famille Harker (une des plus puissantes) n'a pas tenu le coup à la mort de son épouse quand celle-ci donna naissance au rejeton. Pauvre Sam Reed/Harker ; à la recherche de son identité, nouveau Messie marqué par le destin...
Tout cela paraît bien classique (et ça l'est), mais c'est tellement bien raconté, mes enfants... On passe sur la lourdeur de certaines tournures de phrases (mais après tout, hein, qui est parfait ?) pour se laisser porter avec un égal bonheur tout au long de cette Aventure, avec un grand A, et on suit, sans se lasser jamais, la queste superbement héroïque de Sam. D'accord, ça sent parfois l'apologie de l'homme-chef-messie, pourtant Sam Reed est suffisamment salaud-pousse-toit-de-là pour n'en pas paraître inconditionnellement sympathique. Pitoyable, certes. Et même, manipulé lui aussi comme les copains. L'homme-chef, il est ailleurs, sous un masque, comme toujours. Méfiance, camarades — les cartes abattues, c'est toujours truqué.
Si j'en avais le courage, je vous signalerais des passages particulièrement forts, ou je ferais une étude en trois volumes de ce roman.
Sans blagues : Vénus et le Titan, n'oubliez pas. Une très bonne démonstration d'une certaine SF — pour Saga-Fiction. Bon appétit.