Le héros — dont nous ignorons le nom — est toujours à la recherche de sa femme Madalis. Il poursuit sa quête dans l'étrange édifice qu'est Thorinth, où il va découvrir l'importance du sogrom, une poudre issue des algues vertes qui tapissent les profondeurs du lac intérieur de Thorinth. Ces algues possèdent une intelligence où se dissolvent les consciences des cadavres qu'elles absorbent, tandis que la poudre agit comme une drogue, principalement utilisée par deux castes : les Sanodath, des tueurs fanatiques qui l'ingèrent « pour se mettre en phase avec leur folie suicidaire » et les Epancheurs de sogrom, les fossoyeurs de Thorinth, chez qui « le sogrom libère un amour de tout ce qui est morbide » (p.15).
A condition d'accepter les univers extravagants et oniriques, on retrouvera avec plaisir Thorinth et sa galerie de personnages excentriques, comme l'obsédé des virgules, le dessinateur à l'envers, etc. Le non sense règne, mais cela n'empêche pas Fructus de faire progresser l'intrigue de façon cohérente et d'en préciser les enjeux : Madalis, la femme du héros, a été expédiée à Thorinth à la suite d'expériences hasardeuses de manipulations cellulaires et elle semble décidée à les poursuivre à l'intérieur de sa nouvelle prison... La création graphique demeure superbe, avec des couleurs de pénombre ocre ou bleutée, toujours assez sombres mais donnant moins l'impression de monotonie que dans le précédent tome.
Par contre, la note d'humour que sont censés représenter les schnouboufs paraît beaucoup trop appuyée : la bestiole-golem devient envahissante, tandis que l'obsession d'Elide quant à la propreté de son schnoubouf est vraiment trop répétitive pour ne pas être franchement agaçante. Cet humour assez lourd jure un peu dans un album qui mériterait plus de finesse, mais il s'agit d'un défaut mineur — d'autres y verront peut-être même une qualité — qui ne diminue guère l'intérêt que l'on pourra porter à cette série. Reste à savoir où elle va nous conduire...
Pascal Patoz nooSFere 02/01/2003
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