Avec la parution de ce volume, Opta achève la réédition de Forteresse des Etoiles, le volumineux roman de Carolyn Cherryh qui fut récompensé par le prix Hugo en 1982.
Délivrée de la lourdeur inhérente à la mise en place d'un univers-décor complexe, la seconde partie du livre est plus captivante et plus forte que la première. Tous les éléments étant posés, l'énoncé étant connu, le rideau s'ouvre alors sur un théâtre cosmique où les scènes se succèdent, courtes et variées.
La Flotte de la Compagnie bat en retraite devant la force de frappe de l'Union et se réfugie sur la dernière station qui lui reste : Pell. Mais les vaisseaux de l'Union l'y suivent, et c'est l'affrontement inévitable à coup de bluff, de manœuvres insidieuses, d'éclats spectaculaires. Quatre familles d'intérêts se heurtent à partir de ce moment-là, incompatibles entre eux pour la plupart. La Terre désire s'allier avec l'Union. L'Union veut détruire ou pour le moins annexer la Flotte. La Flotte projette de détruire Pell. Et Pell, par l'intermédiaire de la famille Konstantin qui en est la fondatrice, se bat pour sa survie.
Un seul perdant parmi ces quatre partis suffirait peut-être à assurer le contentement des trois autres. Or, c'est exactement ce qui va se passer, dans un dénouement emprunt d'une naïveté qui contraste avec le déroulement âpre et tendu des hostilités. Si tout a très mal commencé et si tout s'est par la suite très mal déroulé, tout en revanche se termine très bien.
Il faut louer Cherryh pour la profondeur et la richesse de ses personnages parmi lesquels, s'il figure des gentils, n'apparaît aucun véritable méchant. Elle a su éviter l'écueil du manichéisme. Il faut la louer également pour la manière convaincante dont elle a dépeint l'univers-station Pell, avec la planète Downbelow qui lui procure son ravitaillement et qu'habitent de sympathiques extraterrestres ; les Downers.
Son talent maintenant connu et reconnu à produit un space-opera psychologique puissant et très réaliste. En un mot, Forteresse des Etoiles est unique en son genre.
Carolyn Cherryh n'a sans doute pas fini de nous subjuguer.
Éric SANVOISIN
Première parution : 1/12/1986 dans Fiction 381
Mise en ligne le : 1/5/2003