BÉLIAL'
(Avon/Fontainebleau, France) Date de parution : 1er novembre 2002 Dépôt légal : novembre 2002, Achevé d'imprimer : novembre 2002 Première édition Recueil de romans, 448 pages, catégorie / prix : 21 € ISBN : 2-84344-044-0 Format : 14,0 x 20,5 cm✅ Genre : Fantasy
Au cœur de l'île de Crète se niche une vaste forêt interdite aux Hommes. Là, dans cet océan d'arbres millénaires et de collines verdoyantes, festoient et chassent les ultimes représentants de ceux qu'on appelle les Bêtes : Centaures, Dryades, Panisci, Telchins...
C'est là que vit Eunostos, le dernier des Minotaures, figure emblématique d'un monde voué à disparaître.
Publié pour la première fois en un seul volume, la Trilogie du Minotaure fait d'ores et déjà partie des créations majeures de la fantasy, tel Le Seigneur des anneaux ou La Forêt des Mythagos.
Thomas Burnett Swann, né en Floride en 1928, nous a quittés en 1976. Il laisse une des œuvres les plus originales du merveilleux.
Depuis la Trilogie du Minotaure jusqu'au Manoir des roses en passant par La Forêt d'Envers-monde et de nombreux autres romans encore inédits en France, Swann s'est fait le chantre de la magie ancienne. Son univers, d'une profonde sensualité, est celui des créatures mythologiques et d'une Histoire plus ancienne que la mémoire des Hommes.
La Trilogie du Minotaure englobe trois romans écrits sur une période de dix ans (1966 à 1975) par l'écrivain américain Thomas Burnett Swann. C'est l'une des créations les plus merveilleuses de la fantasy moderne. À ce titre, elle a sa place dans la bibliothèque de tout amateur du genre. Elle fait pour la première fois l'objet d'une édition complète et révisée aux éditions du Bélial’.
Ces récits doivent leur originalité au filon mythologique auquel a puisé l'auteur. En effet, si l'on ne compte plus les dérivées des mythes et légendes celtes (exploites jusqu'à l'écœurement), il n'en est pas de même pour ceux de l'Antiquité, et la fantasy moderne est plutôt avare de textes reposant sur la mythologie de la Grèce antique (et même un peu avant). Dans ces trois romans, Thomas Burnett Swann parcourt les décennies qui ont conduit à la fin d'un monde, celui d'une coexistence tolérante entre Hommes et Bêtes. La majuscule est importante, car comme le précise l'un des protagonistes, les Bêtes ne sont pas des animaux. Elles sont le fruit des relations qu'entretinrent jadis les Dieux avec les hommes ou les animaux (ainsi les Oursonnes d'Artémis, nées des ébats de la déesse et d'un ours). Dans ce Bestiaire fantastique, on trouve les centaures, fermiers et féroces guerriers si le besoin s'en fait sentir, les minotaures, poètes et artisans, mais aussi les dryades, habitantes des arbres, et bien d'autres personnages que je vous laisse le plaisir de découvrir. Le cadre de ces aventures est la Crète au temps du roi Minos et de son successeur Æacus. À cette époque, les Bêtes ne vivent déjà plus parmi les Hommes ; elles sont isolées dans une forêt pour éviter les affrontements et chacun respecte le territoire de l'autre.
Dans le premier livre, Le Labyrinthe du Minotaure, nous faisons la connaissance des deux personnages qui deviendront le fil conducteur des trois récits : Zoé, la dryade âgée de plus de trois cent soixante années et qui se vante d'avoir connu au moins autant d'amants, et Eunostos, un jeune minotaure (mi-homme, mi-taureau), poète timide enfermé dans un corps imposant. Lordon le voleur et sa compagne Hora la prostituée sont chassés du territoire des Hommes après que Lordon se soit fait prendre en flagrant délit. Leur peine est l'exil dans la forêt des Bêtes dont personne n'est jamais revenu. C'est là qu'ils font la connaissance de Zoé et Eunostos, mais aussi de Chiron le centaure, roi des Bêtes, qui les chasse de la forêt. Capturés par des tritons, ils sont vendus, ainsi que Cloches d'Argent le minotaure, pour combattre lors des Jeux de Phaïstos. Zoé, Eunostos et toute une petite troupe volent à leur secours, défiant les humains.
Ce qui fait le charme de ce roman, c'est bien entendu les aventures vécues par ses protagonistes, mais aussi le style poétique de Swann, son humour omniprésent et sa capacité à rendre très attachants et très humains des personnages Bestiaux tout en leur conservant leurs spécificités (les centaures ne sont pas des hommes avec un corps de cheval, mais bien des créatures mi-homme, mi-cheval avec toute la complexité et les contradictions liées à ce statut pour le moins particulier).
Quelques années plus tard, dans La Forêt du Minotaure, Eunostos a grandi et il est le dernier Minotaure, le seul rescapé de sa race. Il est éperdument amoureux de Kora la dryade, qui elle ne rêve que de folles passions avec un prince crétois. C'est Zoé qui raconte ce récit mélancolique des amours contrariées du jeune minotaure, dont l'univers s'écroule le jour où Æacus, le frère du roi de Crète, se réfugie dans la forêt des Bêtes après une bataille. Kora n'aura désormais d'yeux que pour lui et portera ses enfants, Icare et Théa. À travers l'incursion d'Æacus, Swann inverse le point de vue du premier récit où les Bêtes avaient rejoint le monde des Hommes pour sauver leurs amis et s'en étaient plutôt bien tiré. Ici, c'est un Homme qui tentera de s'intégrer dans la forêt des Bêtes mais n'y parviendra pas. Swann montre ainsi le peu d'illusion qu'il entretient quant à la capacité des Hommes d'accepter et de vivre selon des règles différentes des leurs.
Dans l'ultime volume de la trilogie, Le Jour du Minotaure, c'est de nouveau d'invasion dont il est question. Le royaume de Crète est en train de s'effriter sous les coups de boutoir des Achéens et c'est toute une civilisation qui disparaît, un peuple d'esthètes qui laisse la place à des barbares essentiellement motivés par la conquête et le commerce. La forêt des Bêtes ne sera pas épargnée par ces changements, et c'est Eunostos qui tient une dernière fois la plume pour nous compter la fin du séjour des Bêtes parmi les Hommes. Une fin sombre, dans laquelle le dernier Minotaure aura une vision du futur, de ce monde où la différence deviendra inacceptable où « Bête deviendra synonyme d'animal et l'on appliquera l'épithète de bestial aux sauvages et aux meurtriers. » Et de conclure « Homme de l'avenir (...) demande-toi si après tout, la bestialité ne ressemble pas à l'humanité. Lis et comprends-nous. » (page 431).
La fantasy ne peut s'enorgueillir que de peu de réussites de cette ampleur (on pense à Robert Holdstock et à sa Forêt des Mythagos). Ne laissez pas passer votre chance.