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Cailloux dans le ciel

Isaac ASIMOV

Titre original : Pebble in the Sky, 1950
Première parution : États-Unis, New York : Doubleday, 19 janvier 1950   ISFDB
Cycle : Empire (Cycle de l') vol. 1 

Traduction de Michel DEUTSCH
Illustration de Wojtek SIUDMAK

J'AI LU (Paris, France), coll. Science-Fiction (1985 - 1993, 2ème série - dos violet) précédent dans la collection n° 552 suivant dans la collection
Dépôt légal : janvier 1989, Achevé d'imprimer : 13 janvier 1989
Retirage
Roman, 256 pages, catégorie / prix : 3
ISBN : 2-277-11552-5
Format : 11,0 x 16,5 cm
Genre : Science-Fiction

Autres éditions
   HACHETTE / GALLIMARD, 1953
   J'AI LU, 1974, 1974, 1977, 1981, 1983, 1985, 1992, 1995, 2001, 2014
   in Le Grand livre des robots - 2 : La gloire de Trantor, OMNIBUS, 2000
   in Le Grand livre des robots - 2 : La gloire de Trantor, 2003
   in Le Grand livre des robots - 2 : La gloire de Trantor, PRESSES DE LA CITÉ, 1991

Quatrième de couverture
     Isaac Asimov
     Né à Smolensk (U.R.S.S.) en 1920. Naturalisé américain, il est diplômé de biologie et de chimie. Parallèlement à son activité scientifique, il mène, depuis 1939, une carrière d'écrivain, à la fois dans le domaine de l'anticipation et dans celui de la vulgarisation scientifique.
 
     Pour Joseph Schwartz, la chose arriva à l'instant où à avait un pied en l'air. Il se trouvait dans la banlieue de Chicago et s'apprêtait à enjamber une poupée de chiffon. Lorsqu'il reposa le pied, après avoir éprouvé une fugitive impression de vertige, sa chaussure s'enfonça dans l'herbe. Il était alors dans une forêt.
     Ce qu'il ignorait, c'est qu'il ne s'était pas déplacé dans l'espace, mais qu'il avait effectué un immense bond dans le temps. Désormais, la Terre n'était plus qu'une petite planète d'intérêt stratégique secondaire dans l'immense empire galactique dirigé depuis Trantor.
     La présence d'un homme venu du passé va-t-elle modifier les rapports de force entre les Terriens et la garnison de soldats impériaux ?
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition J'AI LU, Science-Fiction (2001 - 2007) (2012)

     Joseph Schwartz est un homme en tous points médiocre. Ancien tailleur à la retraite, il mène une existence on ne peut plus banale dans la banlieue de Chicago. Jusqu'au jour où, suite à un incident dans un laboratoire voisin, il se retrouve subitement propulsé dans un autre monde. Un monde qui pourrait se trouver quelque part à l'autre bout de la galaxie, tant il est différent de celui qu'il connait, mais qui n'est autre que la Terre, quelques dizaines de milliers d'années dans le futur.

     En 1950, Isaac Asimov a déjà dix ans de carrière derrière lui et une quarantaine de nouvelles publiées, dont celles qui constitueront les premiers volets des cycles des « Robots » et de « Fondation ». Mais Cailloux dans le ciel est l'œuvre d'un romancier débutant, et le résultat s'en ressent. Asimov a toutes les peines du monde à donner du rythme à son récit et à accrocher son lecteur. La faute à un personnage principal falot, qui se laisse bringuebaler par les évènements, à une intrigue mollassonne, qui reste longtemps sans ligne directrice claire — les enjeux dramatiques de cette histoire ne sont révélés que bien trop tard — et à une action dont le lecteur ne découvre la progression qu'indirectement, à travers les dialogues entre les différents protagonistes. Ce dernier point demeure toutefois celui que l'auteur maitrise le mieux, les échanges étant le plus souvent vifs et adroits.

     Malgré ses indéniables carences formelles, Cailloux dans le ciel possède pourtant certaines qualités. L'un des éléments les plus intéressants du roman est la description que fait Asimov de cette Terre d'un avenir lointain. Perdue au sein d'un empire galactique regroupant deux cent millions de mondes, c'est une planète arriérée, en grande partie inhabitable à cause de son fort taux de radioactivité, et dont les habitants sont en butte à un racisme particulièrement virulent. « Pour moi, le seul bon Terrien, c'est le Terrien mort. Et même alors, en général, ils puent. » Un monde méprisé, certes, mais aussi, comme on le découvre au fil du récit, un monde méprisable. L'arrogance des Terriens, en constante rébellion contre les autorités impériales, n'a d'égale que la barbarie de leurs mœurs, dont la manifestation la plus spectaculaire est l'euthanasie pratiquée de manière systématique à l'encontre des vieillards et, plus généralement, de toute personne jugée improductive. Dans ces conditions, on ne s'étonnera guère que l'ensemble de la population galactique refuse d'envisager un seul instant que la Terre puisse être le berceau historique de l'humanité.

     Adoptant le point de vue du modeste Joseph Schwartz, Isaac Asimov donne à voir une situation moins simple qu'il ne paraît de prime abord, dénonçant avec la même sévérité les préjugés des uns et l'obscurantisme des autres, et abordant les thèmes du nationalisme, de la discrimination ou du terrorisme. Le roman gagne beaucoup en intérêt dans ses derniers chapitres, lorsqu'est révélé un complot dont les conséquences, à l'échelle galactique, pourraient se révéler dramatiques. Les différents personnages montrent alors leur véritable visage, et les motivations des différentes factions qui s'affrontent laissent deviner toute la complexité des rapports de force au sein de cet univers.

     Si le roman s'inscrit dans la même histoire du futur que « Fondation », quelques millénaires en amont, Cailloux dans le ciel n'entretient toutefois que de lointains rapports avec cette œuvre — son principal point commun étant la place centrale qu'occupe Trantor au sein de l'empire galactique qui y est décrit — et sera ensuite réuni avec deux autres romans de l'auteur, Tyrann / Poussière d'étoiles et Les Courants de l'espace, pour former le « Cycle de l'Empire »,. Un cycle en marge des œuvres les plus fameuses d'Asimov, mais qui lui permit d'aborder différentes périodes historiques de cette civilisation, de son essor à son apogée. Cailloux dans le ciel, premier roman de l'auteur, apparaît comme une tentative initiale en bonne partie ratée, mais pas totalement dénuée d'intérêt.

Philippe BOULIER
Première parution : 1/4/2012
dans Bifrost 66
Mise en ligne le : 5/5/2013


Edition J'AI LU, Science-Fiction (1970 - 1984, 1ère série) (1975)

 
[ critique commune de deux romans : La ville sous Globe par Edmond Hamilton, Le Masque science-fiction et Cailloux dans le ciel par Isaac Asimov, J'ai Lu ]
note nooSFere

     Le hasard des programmes ou le Seigneur de la science-fiction ont voulu que deux des meilleurs titres du Rayon Fantastique se propulsent en même temps sur les rayons des librairies et au premier rang des présentoirs. L'un était pour moi - et pour pas mal d'autres, je pense - absolument légendaire : il s'agit du roman d'E. Hamilton, Ville sous globe, que Le Masque vient de publier avec un article défini qui n'ajoute rien à sa gloire. Je l'ai ouvert avec une appréhension extrême. La magie allait-elle jouer aussi fort qu'à l'époque où j'avais dix-huit ans et la célèbre collection de Stephen Spriel et Georges H. Gallet ? J'étais alors auxiliaire dans un bureau tel qu'un jeune postier de 1974 n'en a jamais vu dans ses cauchemars les plus déprimants. Hamilton, ça a fait du bruit dans ma vie ! Et quelques semaines plus tard : Le monde des A. Bien, bien. Aussitôt après : La faune de l'espace. Puis : Cailloux dans le ciel. Essayez d'imaginer, bonnes gens. Entre la science-fiction et la révolution, mon cœur balançait. Si on ne nous avait pas donné ensuite Un martien sur la Terre et Le dernier astronef, je n'aurais jamais eu l'idée de m'inscrire au parti communiste !
     Je tiens Cailloux dans le ciel pour l'un des meilleurs romans d'Asimov. Je le trouve supérieur à Fondation et presque égal à La fin de l'éternité, mais peut-être me laissè-je porter par le vent tiède de la nostalgie. En tout cas, un très bon choix de Jacques Sadoul qui, à vrai dire, n'en fait presque jamais de mauvais. Malheureusement, la typographie de l'édition J'ai Lu est presque microscopique. Bon, il faudra s'y faire. Autant de gagné pour les arbres et l'oxygène ! Après tout, rien ne vous oblige à vous esquinter les yeux en cherchant un emploi dans les petites annonces de France-Soir ni à risquer l'accident rétinien en regardant le porte-parole du gouvernement à la télé. Economisez vos cônes et vos bâtonnets pour lire de la SF : vous ne le regretterez pas.
     Outre leur première publication au Rayon fantastique, ces deux romans présentent une analogie qui n'est pas due au hasard. Ils appartiennent l'un et l'autre à la postérité immédiate de la bombe d'Hiroshima et de la guerre de Corée. Et ils sont très typiques de ce point de vue, car ils se situent également loin après la destruction (partielle) de l'humanité par la guerre nucléaire et montrent un (ou plusieurs) américain(s) moyen(s) de notre temps, affrontant la civilisation galactique du futur. Mort et renaissance de l'homme. C'est encore l'optimisme, un optimisme modéré, mitigé, raisonné, et la science n'est plus notre sainte mère.
     Même scénario dans les deux cas. Une bombe « superatomique » s'abat sur la petite ville.de Middletown, où se trouvait un mystérieux laboratoire dont on nous dit sans plus de précision qu'il constituait « un des centres vitaux de la défense antiatomique américaine ». Et Middletown avec ses cinquante mille habitants sont transportés jusqu'en cette « fin du monde » qu'évoque le titre anglais. Joseph Schwartz, le petit tailleur vieillissant de Cailloux dans le ciel, est projeté lui aussi dans un lointain futur, à la suite d'un accident survenu dans un laboratoire de recherches nucléaires de Chicago. Kenniston et les habitants de Middletown se retrouvent isolés sur une Terre mourante, éclairée par un pauvre et pâle soleil et abandonnée par les survivants qui ont émigré depuis Dieu sait quand vers la gloire des Etoiles. Qui ont fui la planète froide en laissant, intactes, leurs « villes sous globe », comme celle qu'on voit sur la couverture naïve de l'édition Hachette. Par contre, la Terre sur laquelle Joseph Schwartz est expédié par un mystérieux rayon - petit monde minable à la périphérie d'un vaste empire - doit à la guerre et à ses séquelles d'être tenue en quarantaine par les seigneurs de la galaxie. Le héros de La ville sous globe n'aura pour affronter les hommes et les humanoïdes du lointain futur que son regard clair, son courage de bon Américain et l'amour d'une belle galactique, l'administrateur Varn Allan. Malgré les facultés psi que Joseph Schwartz doit à l'invention du docteur Shekt, le tailleur de Chicago n'est qu'un pauvre type, un anti-héros que ses dons apparentent au mulot de Perry Rhodan plus qu'à Gilbert Gosseyn. Le véritable héros de Cailloux dans le ciel, c'est l'extraterrestre Bel Arvardan.
     Les deux ouvrages se séparent dans le dénouement. La science a fait le malheur des gens de Middletown ; mais elle les sauvera en réchauffant la Terre grâce à la bombe de Jon Arnold. Au contraire, la science aura de nouveau le mauvais rôle à la fin du roman d'Asimov, alors que les Terriens se préparent à déclencher une guerre bactériologique contre l'Empire. Tout s'arrangera, bien sûr, grâce à l'amour de Varn pour Kenniston - Hamilton - ou du Dr Arvardan pour la touchante Pola - Asimov. Le Terrien et la Galactique. Le Galactique et la Terrienne. Les possibilités sont limitées avec cette fichue race primitive, dotée seulement de deux sexes !
     La plus grande qualité de La ville sous globe, c'est la simplicité du récit. L'intrigue très linéaire laisse toute la place à une description sensible et discrète de la vieille ville et de la planète mourante et à la psychologie des hommes et des femmes de Middletown, jetés dans un monde incompréhensible, luttant avec acharnement pour sauver quelques bribes d'un présent devenu en une seconde un passé lointain et presque inimaginable.
     La plus grande qualité de Cailloux dans le ciel, c'est - fait étrange - l'humanité. Pour une fois, Asimov a écrit un bouquin qui ressemble à sa tête (bien sympathique). Humanité symbolisée par ces vers de Browning que Joseph Schwartz se récite au commencement et à la fin du livre :
     « Vieillissons ensemble !
     Le meilleur, encore, est à naître,
     L'apogée, la raison d'être de tout ce qui a été vécu. »
     Dans une littérature - la SF classique - qui se livrait volontiers au culte de la jeunesse, c'était une attachante originalité d'avoir choisi, comme Asimov, d'évoquer les charmes et les mérites de la vieillesse, à travers un bonhomme très ordinaire. Dans une littérature - la SF classique - volontiers raciste, c'était une originalité digne d'éloge d'avoir peint comme Hamilton des humanoïdes (Gor Holl, Magro) plus humains que les humains.
     Je me souviens tout à coup d'une définition moitié géniale, moitié paradoxale, entendue dans je ne sais quelle spirituelle assemblée : « La science - fiction, c'est ce genre d'histoires où la Terre s'écrit toujours avec une majuscule. » Elle s'applique fort bien à ces deux excellents romans. Oui, j'aime beaucoup la spéculative fiction et la new wave, car le temps des changements est venu, mais je ne souhaite pas que la Terre perde sa majuscule dans les jeux de l'esprit.

Michel JEURY
Première parution : 1/4/1975
dans Fiction 256
Mise en ligne le : 12/1/2015


Edition HACHETTE / GALLIMARD, Le Rayon fantastique (1953)

[Critique des livres suivants :

L'univers vivant de Jimmy Guieu, Fleuve Noir Anticipation n° 22

L'incroyable futur de Jean-Gaston Vandel, Fleuve Noir Anticipation n° 24

L'infernale menace de Vargo Statten, Fleuve Noir Anticipation n° 23

Cailloux dans le ciel d'Isaac Asimov, Gallimard Rayon Fantastique n° 16

Contes de l'absude de Pierre Boulle, Julliard

3 romans aux Editions du Sillage coll "Horizons fantastiques" : L'univers Vagabond de Léon Groc et Jacqueline Zorn, Paradis atomiques de H. Teldy Naim, et Cette sacrée Planète de Fowler Wright.]

 

    Sans qu'on puisse parler de chefs-d'œuvre – même en « science-fiction » ceux-ci sont rares – la production d'A. S. romancée a été, ces derniers temps, des plus honorables. 

    L'ouvrage le plus curieux est peut-être « L'Univers vivant », de Jimmy Guieu (Fleuve Noir), où l'auteur reprend une théorie déjà exprimée dans un précédent roman (« Au-delà de l'infini ») et selon laquelle notre univers ne serait qu'un atome dans le corps d'un être vivant. Or, depuis quelque temps, les catastrophes cycliques se multiplient et les savants en viennent à penser que l'être en question est souffrant. Aussi organise-t-on une expédition destinée à vérifier le bien-fondé de ladite théorie. Celle-ci se révèle exacte, le « malade » étant une princesse que des ennemis de sa famille ont exilée sur une autre planète. À partir de ce moment, c'est une « guerre des mondes » sur une petite échelle que notre confrère Guieu parvient sans peine à rendre intéressante. À la fin, tout rentre dans l'ordre sans que, pour autant, l'amour ait été négligé. La première partie du roman est nettement supérieure à la seconde, mais l'ensemble nous a fort diverti.

    Très divertissant est également « L'Incroyable futur », de Jean-Gaston Vandel (Fleuve Noir). Nous y voyons un jeune savant, Bill Cordell, mettre au point un produit qui, après absorption, lui permet de lire dans les pensées des gens. Ayant quitté l'usine qui l'employait et devenu journaliste, il réussit deux ou trois interviews politiques qui attirent sur lui l'attention du chef tout-puissant de la police, et le pauvre Bill finirait misérablement assassiné sans l'intervention de quelques hommes mystérieux, venus d'un autre univers, qui reconnaissent en lui le chef d'une humanité future évoluée. (Précisons que l'action du roman ne se déroule pas de nos jours.) Les tendances spiritualistes sont nettes chez l'auteur qui, rappelons-le, n'a jamais publié d'œuvre sans intérêt.

    Vargo Statten, qui nous a habitués à une production de classe, ne se dément pas dans la première partie de « L'Infernale Menace » (The Red Insects) (également au Fleuve Noir), véritable modèle de « suspense » et de mystère, où l'on voit l'Humanité livrer une guerre sans merci à des fourmis devenues géantes grâce à l'adjonction, par un savant plus ou moins fou, d'un système pulmonaire. Nous avons aimé la seconde partie, où ladite Humanité est sauvée par l'intervention de nos petits-enfants du Nme siècle, réduits en esclavage par les fourmis, mais capables, comme ces dernières, de voyager dans le Temps et de lutter aux côtés de leurs ancêtres. Dans cette deuxième partie, Statten tombe malheureusement dans certains excès du « space opéra » (expression fort employée aux U.S.A., par similitude avec « soap opéra » qui désigne les spectacles radiophoniques publicitaires à la guimauve) qui détruisent l'unité d'action.

    Isaac Asimov est un des auteurs américains d'AS les plus réputés, mais son premier roman à paraître en français, « Cailloux dans le ciel » (Pebbles in the Sky) (Rayon Fantastique-Gallimard), n'est qu'honorable, sans plus. C'est l'histoire d'un petit tailleur du nom de Joseph Schwartz qui, par suite de l'« échappement » d'un rayon radio-actif, se trouve projeté dans le Temps. L'Univers est bien différent alors. L'Humanité vit sur un grand nombre de planètes, cependant que notre propre Terre est le paria du monde. Elle est tout imprégnée de radio-activité et ses rares habitants, une fois atteint un certain âge, sont proprement mis à mort pour laisser place aux jeunes. Bien entendu, il y a des mécontents qui complotent la perte de l'Univers mais, doté de pouvoirs surnaturels à la suite d'un traitement approprié, Schwartz sauvera la Galaxie, réconciliera tous les hommes de bonne volonté et finira décoré d'un ordre que seuls de rares élus ont le droit d'arborer. (Et dire que, selon les Américains, seuls les Français aiment porter un ruban à la boutonnière !) Le roman est écrit avec beaucoup de soin et fort bien adapté par Mme Audiberti, mais nous aurions aimé qu'Asimov fît son entrée sur le marché français avec quelque chose de plus convaincant et de plus solide que cela. 

    Voltaire eût aimé « Les Contes de l'absurde », de Pierre Boulle (Julliard) qui ont valu à son auteur le Prix de la Nouvelle 1953. Nous ignorons si, dans le civil, l'auteur est ou a été spécialiste de philo ou de math', mais les deux éventualités sont également vraisemblables. Philosophiques, ces cinq contes le sont tous, mais bien d'autres domaines pourraient les revendiquer également : le genre policier serait en droit de s'annexer « Le Poids d'un sonnet » qui eût enchanté Edgar Poe ou Conan Doyle ; l'anticipation, elle, a directement inspiré « Une nuit interminable » où, grâce à un emploi exagéré (nous ne voyons pas d'autre mot) de machines à explorer le temps, on voit un homme tuer sa victime dans le futur, être tué par elle dans le passé pour, finalement, se confondre avec elle dans un présent logiquement issu d'un « nouveau » passé ; le genre « terreur », lui, est bien représenté par « L'Hallucination » ; le genre « branquignol » même pourrait, à son choix, apposer son étiquette sur « Le Règne des sages » ou sur « Le Parfait Robot ». Mais quel que soit le genre fondamental auquel ils appartiennent, ces cinq contes sont tous d'une lecture exceptionnellement agréable, teintés d'un humour très fin, intéressants ; enfin, évidemment, logiques jusqu'à… l'absurde. Oui, Pierre Boulle a bien mérité le Prix de la Nouvelle. 

    Les Éditions du Sillage ont, jusqu'à présent, fait preuve d'un goût excellent dans leur collection « Horizons fantastiques ». Elles ont publié un roman de « science-fiction » français : « L'Univers vagabond », de Léon Groc et Jacqueline Zorn, et deux romans traduits de l'anglais : « Paradis atomiques », de H. Teldy Naim, et « Cette sacrée Planète » (The World Below), de Fowler Wright. M. Léon Groc est un des meilleurs romanciers de science-fiction français, auteur notamment de « La Révolte des pierres » et de « La Planète de cristal ». « L'Univers vagabond » exploite la possibilité d'atteindre d'autres systèmes solaires en dépit de l'énorme distance qui nous sépare des étoiles en utilisant un astronef de dimensions suffisantes pour être habité par des familles se reproduisant pendant les générations. Ce livre contient aussi la brillante idée de piles atomiques intelligentes, forme de vie utilisant à la fois le carbone et l'uranium. 

    Nous ne savons pas si M. R. Teldy Naim est réellement américain. Son roman d'anticipation est comparable en tout cas aux bons « science-fiction » américains.

    M. S. Fowler Wright est surtout connu en France pour « Prélude à Prague » et « 4 jours de guerre » (Hachette, éd.), clairvoyantes anticipations en 1936 de la guerre 1939-1945. 

    Son livre est une brillante satire sociale. La beauté du style rappelle le fait que M. S. Fowler Wright a fait une remarquable traduction en anglais de « La Divine Comédie », de Dante.

Igor B. MASLOWSKI
Première parution : 1/10/1953
Fiction 1
Mise en ligne le : 19/2/2025

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