Les MacAran sont les meilleurs dresseurs de chevaux, de chiens et de faucons de chasse de Ténébreuse. La jeune Romilly MacAran possède le laran familial qui lui permet d'entrer en contact avec les animaux et, bien qu'elle soit normalement destinée à être mariée et à tenir la maison de son époux, elle ne se plaît qu'à la fauconnerie et aux écuries, et elle entend bien suivre la voie familiale. Cela n'est pas du goût de tous, à commencer par son père.
La Belle Fauconnière se déroule une bonne centaine d'années après Reine des orages. Ténébreuse s'est développée, des villes comme Caer Donn se sont bâties. Par contre, la société ténébrane n'a guère évolué. Les comyns dominent toujours la planète, se livrant à des guerres sans merci, où les pouvoirs psi tiennent encore une place importante. Le laran des MacAran sert à dresser des faucons de chasse, mais aussi des oiseaux-espions.
C'est dans ce troisième volume du cycle qu'apparaissent les thématiques féministes de Marion Zimmer Bradley. Les femmes ténébranes n'ont qu'une place minime et secondaire : elles sont tout juste bonnes à faire des femmes au foyer. Il est hors de question qu'elles puissent occuper d'autres places et développer leurs talents. En révolte contre cette société misogyne, Romilly MacAran rejoint la Sororité de l'épée, une association de guerrières qui regroupe des femmes en rupture de tradition, bien décidées à vivre pleinement leur vie et à s'épanouir à l'abri des hommes. Ce féminisme militant ne tombe cependant ni dans l'excès ni dans le manichéisme. Les personnages sont particulièrement nuancés et complexes, faisant bien ressortir toutes les ambiguïtés et parfois les impasses d'un féminisme trop militant.
L'homosexualité, qu'elle soit féminine ou masculine, est présente en toile de fond. Plusieurs personnages affichent plus ou moins leurs préférences, là encore sans tomber dans la caricature. Cette thématique se retrouve dans plusieurs autres volumes du cycle, de manière naturelle et plus ou moins diffuse. Ainsi la coutume des « bredins », les frères jurés, recèle beaucoup d'ambiguïtés qui ne sont pas toujours levées.
La Belle Fauconnière est un roman équilibré qui se lit avec beaucoup de plaisir. L'intrigue se déroule sans incohérences et les personnages sont riches et nuancés. La place et l'ampleur des pouvoirs psi sont beaucoup mieux définis que dans le volume précédent : nous ne sommes déjà plus dans l'ambiance « fantasy » de Reine des orages.
Samuel LE GOFF
Première parution : 4/1/2005 nooSFere