DENOËL
(Paris, France), coll. Présence du futur n° 605 Dépôt légal : février 1999 Roman, 176 pages, catégorie / prix : 3 ISBN : 2-207-30599-6 Format : 11,0 x 18,0 cm Genre : Science-Fiction
Dans un San Francisco d'Apocalypse transformé en archipel, l'aventurier Cutloss tente de survivre. Survivre malgré les tollmen qui mènent le jeu dans les échangeurs, les ponts suspendus, les cimetières de bagnoles. Survivre avec un secret terrible, lourd comme un amour à jamais perdu. Le voici donc obligé de traverser une cour des miracles où rien n'a plus de valeur que les chiens trafiqués, bio-améliorés dans le but d'espionner les Supérieurs. Ce cinquième volume des Hommes sans futur est l'un des plus réussis ; il vous invite à découvrir les splendeurs et les dangers d'une bien étrange Californie.
Pierre Pelot, né et vivant toujours dans les Vosges, auteur de plus de cent soixante romans appartenant à tous les genres, est avant tout un authentique écrivain populaire, à la langue drue et aux personnages taillés dans l'épaisseur du réel. Alors qu'il est en train d'évoquer l'émergence du genre humain dans sa grande saga, Sous le vent du monde, son cycle des « Hommes sans futur » décrit, cette fois à travers un bond en avant, une autre étape de l'évolution.
Aujourd'hui Pierre Pelot a complété son intense capacité d'écriture efficace d'une sensibilité non moins intense envers les franges les plus désespérées de l'espèce humaine. Et sans doute, de cette écriture de la déchéance, de la démerde et de la détresse, le cycle des Hommes sans futur est-il le plus ample dans sa vision. Au cœur de ses autres ouvrages, en effet, ce sont des individus ratés, déchus de la norme sociale, refusés de la société bien-pensante, que Pelot choisit de mettre en scène. Il s'agit bien d'une littérature du quart-monde, qui parle au nom de ceux-là qui vivent (dixit Pelot) « dans les souterrains des civilisations industrielles avancées » : l'auteur s'inscrit profondément dans ce choix qui est davantage qu'esthétique et pas du tout gratuit (la prise qu'exerce son écriture sur le lecteur ne permet pas d'en douter). Mais avec les Hommes sans futur, la variation d'ampleur et de noirceur est de taille : l'humanité tout entière glisse dans la catégorie des rejetés. Les Supérieurs sont apparus parmi les hommes, et ceux-ci régressent lentement au rang d'espèce en voie de disparition survivant provisoirement, de plus en plus sauvage. Le western se situait à la frontière de la civilisation : les mangeurs d'argile sont au-delà de toute civilisation.
Le chien courait sur l'autoroute en criant son nom a pour cadre l'archipel qui a succédé à San Francisco, poussière d'îles et de fragments d'autoroutes Au large, les constructions des Supérieurs. Et la lutte dérisoire pour un peu de pouvoir entre les tollmen et les habitants des îles. Brent Cutlass est un tueur, il cherche le chien échappé au monde des Supérieurs, le chien qui parle. Beaucoup de gens veulent le chien pour en tirer de l'argent, mais Cutlass le cherche car il a peut-être hérité de l'esprit de Jane Hearas, son amour disparu. Les affrontements seront brefs, frénétiques et violents dans ce crépuscule de l'homme. On se bat seulement pour se prouver qu'on existe encore, que la pourriture n'a pas tout à fait gagné. Déchéance, angoisse et mort. Cutlass ne veut pas renoncer. Il veut que les Supérieurs lui rendent Jane. Et il en mourra. On peut se demander si Pelot ira encore plus loin. La sérénité semble avoir totalement disparu de son univers. Tout est perdu, tout est fini — peut-être depuis toujours. Ce n'est pas gai, mais diablement prenant. Pelot sort de son cauchemar par l'écriture. Nous, nous y plongeons.