Leto II, le Tyran, l'Empereur-Dieu, est mort depuis des milliers d'années, mais son souvenir est dans toutes les mémoires. Sa disparition a entraîné un tourbillon de violences, la Grande Famine, la Dispersion de l'humanité à travers les univers. Pourtant ces désordres ont assuré la survie de l'humanité conformément aux plans du Tyran ; et ses Prêtres en tirent argument pour justifer leurs ambitions.
Mais la révérende Mère Taraza sait bien que le pouvoir vient de l'Épice, source de la prescience. La planète Dune, devenue Rakis, restera-t-elle le centre de toutes les intrigues alors que le Bene Tleilax a appris à produire l'épice sans le secours des vers géants ? Les forces qui se mesurent dans l'ombre sont à l'affût du moindre signe.
Or les signes se produisent là où nul ne les attendait. Sir Rakis, une jeune fille, presque une enfant, semble pouvoir commander aux vers géants. Sur tout le pourtour de l'Empire, les Égarés de la Grande Dispersion commencent à revenir. Que cherchent-ils ? Que fuient-ils ?
Lors de la parution des Enfants de Dune, certains lecteurs avaient fait la moue : peut-être parce que l'absence de Paul d'Atréïdes ne faisait pas de Dune une série où rebondissements fertiles, complots perpétuels auraient lancé le héros vers de nouvelles aventures. L'Empereur-Dieu de Dune confirma en quelque sorte cette désaffection du public, quittant les sentiers battus du roman-fleuve, de la saga interminable se poursuivant génération après génération : trop de distance temporelle (quelques milliers d'années plus tard...), un univers à nouveau différent (alors qu'on venait enfin de s'installer dans le précédent), et une action diluée dans les bavardages incessants des intrigues de palais.
Cependant, c'est toujours à une réflexion sur le pouvoir que Frank Herbert nous convie. Après la domination tyrannique (mais nécessaire) de Leto II, voici le pouvoir fractionné : la conscience de l'Empereur-Dieu se retrouve fragmentée dans les vers géants et Rakis (en ces temps encore plus lointains, le nom a changé) s'équilibre autour des diverses forces en présence. Outre celles figurant dans les volumes précédents, apparaissent les Prêtres de l'Empereur-Dieu, les Honorées Matriarches, descendances des Truitesses. Mais voici que les prostituées ont développé une arme que les Bene Gesserit se refusent à utiliser : le sexe. Ainsi, après avoir joué sur des rapports de force, la politique utilise la séduction.
Mais la séduction n'est qu'une façade destinée à masquer les choses essentielles, et la véritable structure du pouvoir. Dans ce roman foisonnant de personnages singuliers, les rebondissements vont bon train. La religion instaurée par Paul se dissout,. Dune n'est plus le centre de l'univers et les sorcières Gesserit semblent tout diriger.
Il ne faut pas chercher à retrouver dans cette suite la fresque haute en couleurs du début, mais se laisser porter par le récit. Et alors, la lecture des Dune redevient intéressante, ne serait-ce que par l'apparition, dans ce cinquième volume, d'une captivante jeune fille, Sheeana, qui a le pouvoir de commander aux vers des sables.
Claude ECKEN (lui écrire) Première parution : 1/1/1986 L'Ecran fantastique 64 Mise en ligne le : 17/7/2003