1 - Daniel RICHE, Éditorial, pages 8 à 11, éditorial 2 - Hilary BAILEY, La Chute de Frenchy Steiner (The fall of Frenchy Steiner, 1964), pages 14 à 54, nouvelle, trad. Liliane SZTAJN 3 - Jean-Claude DUNYACH, En attendant les porteurs d'enfants, pages 57 à 73, nouvelle 4 - Daniel RICHE, Approches, pages 76 à 199, dossier 5 - James Graham BALLARD, Souvenirs de l'ère spatiale (Memories of the Space Age, 1982), pages 78 à 112, nouvelle, trad. Natalie ZIMMERMANN 6 - James Graham BALLARD & David PRINGLE, De Shanghai à Shepperton (From Shanghai to Shepperton, 1982), pages 113 à 151, article, trad. Lorris MURAIL 7 - Catherine BRESSON, Ballard chez lui (Ballard at home), pages 152 à 183, entretien avec James Graham BALLARD, trad. Catherine BRESSON 8 - Jean BAUDRILLARD, Crash, pages 184 à 192, article 9 - James Graham BALLARD, Ce que je crois (What I Believe, 1984), pages 193 à 198, article, trad. Jean BONNEFOY 10 - (non mentionné), Repères bibliographiques, pages 199 à 199, bibliographie 11 - Philippe CURVAL, Manifeste pour la science-fiction, pages 202 à 210, article 12 - Emmanuel JOUANNE, Raisons en miettes, pages 211 à 222, article 13 - André RUELLAN, La Preuve, pages 223 à 223, nouvelle 14 - Livres, pages 224 à 251, critique(s) 15 - Denis GUIOT, Liste des parutions, pages 252 à 255, index
Critiques
Après de trop nombreuses tentatives péchant soit par leur conception, soit par leur réalisation, la science-fiction en France attendait toujours une nouvelle revue capable de soutenir la comparaison et l'émulation avec Fiction. Voilà qui est fait. Les formules sont très différentes, donc la compétition devrait rester amicale. Mais il n'est pas étonnant que ce soit l'éditeur le plus dynamique, dans le domaine qui nous occupe, depuis pas mal d'années qui la concrétise enfin.
Car Science-Fiction, dirigée par Daniel Riche, et dont le comité de rédaction comprend Philippe Curval, Elisabeth Gille et Robert Louit, est une réussite sur tous les plans.
Esthétique, d'abord, car cela frappe l'œil. La maquette (due à Ariette Bourdier) est jeune, lisible, d'une efficacité et d'une clarté dignes d'éloges. L'intégration d'illustrations venues d'horizons souvent très différents, parfois extérieurs à la SF, achève de conférer à l'objet-livre un aspect moderne et intriguant. Une réussite signée Roman Cieslewicz.
Politique, ensuite. Dès l'éditorial, l'équipe, s'exprimant par la plume de Daniel Riche, affiche son désir de jeter des ponts entre la SF et les autres formes d'expression littéraire d'une part ; et d'autre part entre l'écrit-SF et les diverses incarnations de son imaginaire : cinéma, jeux, musique, vidéo, mode, publicité... De même, c'est son atout-maître, la revue entend privilégier la critique et la réflexion ; les fictions servent (elles aussi) d'illustration.
Poétique, encore. Les articles sur le thème Pourquoi la SF ? signés de Philippe Curval et d'Emmanuel Jouanne sont, pour le premier, un modèle d'intelligence et de raisonnable ambition, pour le second, un non-modèle de provocation intelligente et d'irréductible passion. Ils fournissent ample matière à débat, comme il était souhaité. De même les Approches de Ballard qui remplissent la moitié de la revue mêlent : une splendide novella récente ; un long article autobiographique, passionnant par sa mise à nu des racines des fantasmes ballardiens ; une courte étude remarquable (quoique déjà parue à deux reprises) de Jean Baudrillard sur Crash ! ; une longue interview, la meilleure que j'ai lue de l'auteur en France, due à Catherine Bresson ; et un Ce que je crois visionnaire et distancié. Indispensable.
Littéraire, enfin. Jean-Claude Dunyach livre une nouvelle percutante qui témoigne de sa faculté de renouvellement. André Ruellan pique avec une short-short absurde, au détour d'une page non répertoriée au sommaire. Hilary Bailey offre une novella superbe, remarquable uchronie qui aura attendu vingt ans sa traduction !
Alors, même si on annonce Stanislas Lem dans la rubrique « Livres » bien qu'il n'y figure pas, même si une faute d'inattention dans la traduction de la nouvelle de Ballard saute aux yeux (page 81 : les « physiciens » de la clinique sont plutôt des médecins, qui se dit en anglais physiciens ; tandis qu'un physicien est « a physicist »), ce ne sont là que petites scories : elles n'obscurcissent pas du tout cette réussite totale éclatante.
Il faut que le public suive. Je ne saurais que l'y encourager chaleureusement.