J'AI LU
(Paris, France), coll. Science-Fiction (2001 - 2007) n° 5865 Dépôt légal : septembre 2001, Achevé d'imprimer : 14 septembre 2001 Première édition Roman, 352 pages, catégorie / prix : K ISBN : 2-290-31063-8 Format : 11,0 x 17,8 cm✅ Genre : Science-Fiction
Sur une station spatiale en orbite autour de la terre, un jeune réalisateur prépare un film sur l'ancienne vie de Blade Runner de Rick Deckard. Celui-ci, retiré du métier, a été engagé comme conseiller technique, et y voit l'occasion de gagner suffisamment d'argent pour quitter Mars, où il vit incognito avec Sarah Tyrell.
Mais bientôt les événements se précipitent : un réplicant est détruit durant le tournage d'une scène, et Deckard retrouve son ancien partenaire, Dave Holden, qui n'a que le temps de lui confier un mystérieux attaché-case avant d'être assassiné. Quelle n'est pas sa surprise de découvrir dans la mallette le cerveau enregistré de Roy Batty, son ennemi juré qu'il croyait à jamais disparu...
K. W. Jeter.
Né en 1950, disciple de Philip K. Dick, il partage avec un égal bonheur son talent entre science-fiction (il est l'inventeur du courant steampunk, qui réécrit le futur tel qu'il pouvait être conçu au XIXe siècle) et le fantastique, où il excelle dans les ambiances de claustrophobie et de paranoïa.
Critiques
La sortie de la traduction de Blade Runner 2 en toute fin d'année 1998 avait constitué un mini événement dans le microcosme SF français. Trois ans plus tard, sa suite sort dans une quasi indifférence générale : aucune des revues spécialisées nationales ne l'a chroniqué. On peut certes comprendre que la publication d'une suite de la suite d'un livre que Philip K. Dick n'avait pas prévu comme le premier d'un cycle n'excite pas grand monde, cette indifférence n'en reste pas moins quelque peu injustifiée. En me basant sur mes (plutôt vagues) souvenirs de BR2, je pourrais réduire la présente chronique à un laconique et paresseux : « vous aimerez autant ce livre que vous avez aimé l'opus 2 ». On ne manque pas en effet d'y retrouver les personnages principaux, l'ambiance, les grandes thématiques dickiennes sur la réalité et la définition de l'humain. On a là aussi un récit mené de manière compétente, la réapparition sous une forme ou une autre de personnages morts (Dave Holden, JF Sebastian, Roy Batty, Kowalski...). On se délecte de quelques scènes excellentes (mention spéciale à celle du marchand de divinités en poudre !) et personnages hauts en couleur.
Mais cette fois, Jeter a situé l'essentiel de son intrigue sur Mars (où Deckard vit avec Sarah Tyrell dans un clapier digne du Dieu venu du Centaure). Exit donc le Los Angeles noir et pluvieux, d'où lien plus lâche avec le film (contrairement à BR2, qui donnait parfois l'impression, lorsqu'on ne connaissait pas le film par cœur, de passer à côté de certaines choses). Deckard ne pourchasse plus personne, il est embringué, il se laisse embringuer dans une espèce de quête, de mission relative à un mystérieux secret sur les réplicants. De son côté, Sarah (dont la relation de couple avec Rick Deckard bat de l'aile d'une manière typiquement dickienne !) décide d'accéder à la requête des deux mystérieux émissaires venus lui demander de les accompagner dans un voyage indispensable pour la Tyrell Corporation pourtant détruite... Ces deux lignes d'intérêt inégal (celle suivie par Sarah paraît moins convaincante) recèlent chacune leurs mystères et se rejoindront bien entendu dans le dénouement.
Bref, Jeter semble s'être efforcé de s'éloigner du film pour se rapprocher de Dick (mais n'est pas Dick qui veut pour faire vivre de tels personnages en suscitant l'empathie du lecteur). Il a produit en professionnel un travail solide qui se lit sans déplaisir ni lassitude mais sent le travail de commande. Ni désagréable, ni ennuyeux, ni inintéressant, mais sans âme.