GALLIMARD
(Paris, France), coll. Folio SF n° 269 Date de parution : 1er février 2007 Dépôt légal : janvier 2007 Réédition Roman, 416 pages, catégorie / prix : F9 ISBN : 978-2-07-031264-1 Format : 10,8 x 17,8 cm✅ Genre : Fantasy
Titania, Obéron, Puck et les autres fées du Songe d'une nuit d'été ne sont pas sortis de l'imagination de Shakespeare, mais existent bel et bien. Pour combien de temps encore ? La forêt de Sherwood, leur résidence ancestrale, est en train de disparaître, rongée par le développement urbain. Obéron, le roi des fées, décide de guider son peuple vers la Nouvelle Forêt, où leur magie restera intacte. Ils partent à bord d'un car hors d'âge, guidés par Sid, un jeune mécanicien qu'ils ont asservi. Mais l'ignoble sorcière Morgan le Fay fera tout pour les arrêter.
La confrontation entre le monde contemporain et le Petit Peuple est source de quiproquos aussi drôles que poétiques. Roman de fantasy léger et intelligent, La compagnie des fées dresse, au passage, une cartographie précise des lieux de magie en Grande-Bretagne.
Né en 1941 à York, en Angleterre, Garry Kilworth a passé son enfance à parcourir le monde. Il s'engage clans la RAF à l'âge de quinze ans et y restera dix-sept ans. En 1977, il publie son premier roman et a écrit depuis de nombreux autres romans de fantasy et de science-fiction, parmi lesquels Roche-Nuée et Abandonati (Editions Denoël).
La forêt de Sherwood se réduit : le Petit Peuple en perd sa magie et ne parvient plus à se cacher des humains. La décision de déménager vers la Nouvelle Forêt est le début d'un périple aux allures d'épopée à bord d'un bus bringuebalant mené par Sid, un mécanicien capturé par le roi Obéron, et par Titania, qui a appris la conduite.
En cours de route, cette dernière « échange » contre un poisson, laissé dans la poussette, un nourrisson en qui elle voit un descendant de Guenièvre et Lancelot. Le petit groupe s'étoffe d'une caravane d'itinérants new age se rendant à un festival à Stonehenge, qui la confond avec une troupe théâtrale. Mais l'infâme Morgan n'est pas décidée à laisser le Petit Peuple réussir son transfert, sauf à obtenir l'enfant qui lui permettra de rétablir l'ordre ancien sur Terre, quand la magie d'Avalon était toute-puissante...
Ignorants des usages humains, Puck, Titania, Obéron et les autres membres du Petit Peuple multiplient les péripéties cocasses. On se souviendra longtemps de la visite au supermarché pour l'achat de couches-culottes, de la perturbation d'une répétition d'Un Songe d'une nuit d'été, et des soupirs énamourés de Tom envers Titania, l'apprenti écrivain ne réalisant à aucun moment sa nature féerique. Les titres des chapitres sont, eux, empreints d'une poésie champêtre : au nombre de vingt-quatre, ils comptabilisent les heures par le biais d'événements floraux comme « le coquelicot se referme » (dix-neuf heures) ou « la reine-des-prés jaune s'ouvre » (deux heures).
Ponctué par quelques passages dramatiques, cette fantasy où la poésie le dispute à un humour espiègle est d'une exquise fraîcheur et se révèle un excellent moment de lecture. Une occasion toute trouvée de mieux découvrir un auteur, en France, curieusement peu traduit.
La forêt de Sherwood est devenue vraiment trop petite, les elfes doivent déménager. Emmenés par leurs souverains Obéron et Tatiana, avec l'aide de l'humain Sid, capturé par l'adorable reine des fées, les voilà qui filent en car vers la Nouvelle Forêt qu'a repérée Puck au cours de ses nombreux voyages. Le trajet ne devrait prendre qu'une nuit, mais avec les elfes, rien ne se passe jamais comme prévu, Sid en a fait la triste expérience. Au cours d'une fête de village où ils se sont arrêtés, Tatiana enlève un bébé qui est la descendante de Guenièvre et Lancelot. Cela, ainsi que le raffut qu'ils font — et qui provoque le réveil de la Vache Brun-Grisâtre, de géants et autres créatures magiques — ne peut qu'exciter la convoitise de la terrifiante Morgan le Fay. Cette dernière va les poursuivre à travers le pays afin d'immoler l'enfant pour rétablir l'époque du roi Arthur et gouverner par la terreur.
Ce qui commence comme un hommage burlesque à Shakespeare et à son Songe d'une nuit d'été se continue comme un roman d'aventures passionnantes. Garry Kilworth allie avec un grand bonheur l'humour et l'émotion. C'est un livre à déguster à différents degrés, de l'allusion à la limite de la private joke au burlesque éclaté, ce qui n'empêche pas, par moments, de trembler pour les différents protagonistes, elfes ou humains, de cette histoire peu banale.
Un excellent roman de fantasy urbaine, à lire absolument !
Lucie CHENU Première parution : 1/9/2005 dans Faeries 19 Mise en ligne le : 7/10/2006