Bénéficiant enfin d'une distribution « poche » grâce aux réimpressions de certains titres parus précédemment chez NéO dans la collection « Terreur » des PRESSES DE LA CITE, Graham Masterton va peut-être connaître la consécration en langue française qu'il méritait depuis bien longtemps. En attendant, NéO, dans sa collection grand format, continue à publier des inédits de cet auteur anglais qui a réussi à perpétuer une certaine tradition populaire du Fantastique, héritée directement des pulps (ce qui est aussi le cas de Brian Lumley), tout en créant une œuvre originale et très personnelle.
Car il existe un « ton » Masterton. Ses traits principaux sont de ne reculer devant rien, de faire fi de certaines conventions du genre et de toujours savoir distiller une pincée, plus ou moins importante, d'humour dans ses histoires d'horreur, ce qui les rend, paradoxalement encore plus percutantes.
On le sait, la spécialité de Masterton, c'est l'intrusion dans le monde moderne de tout ce que les démonologies de la planète peuvent avoir de plus horrible. Une démarche qui n'est pas toujours exempte de demi-réussites (Le Djinn ou La Vengeance du Manitou) mais qui réserve en général d'excellentes surprises, car Masterton arrive la plupart du temps à tellement varier ses protagonistes et ses lieux d'action qu'il évite sans trop de peine le piège de la répétition.
Comme son titre le laisse deviner, Le Miroir de Satan propose une nouvelle mouture du bon vieux thème du Retour de l'Ange Déchu. Mais Masterton bâtit sur ces fondations bien connues une histoire complètement démente se déroulant dans le milieu du cinéma et de la télévision à Hollywood et utilisant comme ressort principal un détournement de la thématique de Lewis Carroll, le tout panaché d'une interprétation très personnelle de l'Apocalypse. Quand on vous disait que cet homme-là ne recule devant rien...
Avec ses trois cents pages grand format tassées, Le Miroir de Satan est un ouvrage de poids. Mais Graham Masterton ressemble à la cuisine du Périgord : c'est peut-être long à déguster, mais alors, quel régal !