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La Trilogie steampunk

Paul DI FILIPPO

Titre original : The Steampunk Trilogy, 1995
Traduction de Monique LEBAILLY
Illustration de Adèle SILLY

BRAGELONNE (Paris, France), coll. Le Mois du Cuivre / Steampunk
Dépôt légal : février 2017
Réédition
Recueil de nouvelles, 336 pages, catégorie / prix : 28 €
ISBN : 979-10-281-0242-5
Format : 15,3 x 23,8 cm
Genre : Science-Fiction

Photographie de couverture : © Shutterstock.



Quatrième de couverture
     La reine Victoria en fille légère toujours de sortie, remplacée par une sensuelle créature mi-femme mi-salamandre qui lui ressemble étrangement ? Walt Whitman en séducteur impénitent d’une Emily Dickinson inspirée, loin de rester insensible à ses charmes ? Une promenade dans le royaume des morts, où l’on croise le chemin d’un jeune Allen Ginsberg, et l’invasion du Massachusetts par des monstres lovecraftiens ?
     Ces trois récits vous réservent tout cela et plus, sous la plume déjantée et savoureuse d’un maître fondateur du steampunk, dont ce roman est l’un des fleurons.

     Né en 1954 à Rhode Island, Paul Di Filippo est un écrivain et critique de science-fiction et surtout l’un des fers de lance du courant steampunk. Célébrant le bizarre et l’étrange, son œuvre imaginative a été nommée à de nombreux prix comme le Nebula et le Hugo et a emporté le British Science Fiction Association Award.
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition J'AI LU, Science-Fiction (1992 - 2001, 3ème série - dos violet/blanc) (2000)

     Comme son titre l'indique, cet ouvrage se compose de trois nouvelles dont le point commun est d'être situées dans un XIXème siècle revisité.

     La première nouvelle, Victoria, est un amusant récit où la jeune Reine Victoria est remplacée par une chimère femme-triton, à l'appétit sexuel féroce — qu'il faut bien se dévouer à contenter pour être tranquille. On imagine ce que cette idée loufoque aurait pu avoir d'inconvenant dans l'austère société britannique de l'ère victorienne !

     Le court roman de 133 pages qui suit, Des Hottentotes, n'est pas moins irrespectueux... Il met en scène un naturaliste suisse parfaitement odieux, un créationiste qui — alors qu'ailleurs un certain Darwin est en train de rédiger un ouvrage qui fera grand bruit — est ancré dans ses convictions de supériorité de la race blanche sur les autres, et bien sûr de l'homme sur la femme... Ce savant bourré de préjugés détestables est très proche de Cley, le « héros » de Physiognomy, roman de Jeffrey Ford récemment paru dans la collection Millénaires. Les deux auteurs ont choisi la même façon de présenter leurs personnages : sans distance, en plongeant au cœur même de leur pensée ; c'est au lecteur de porter un jugement sur les thèses défendues, sans que l'auteur ne prenne parti autrement que par une ironie latente et jubilatoire.
     Ce naturaliste sera entraîné dans une course-poursuite des plus folles, à la recherche d'un sexe féminin formolé ! Ce sexe, déformé par des rituels sexuels complexes appliqués aux fillettes Hottentotes, a été élevé au statut de fétiche et pourrait avoir des propriétés maléfiques. Cette quête mènera les protagonistes jusqu'à un peuple écailleux, prétexte à un hommage au Dagon de Lovecraft, mais aussi à Melville.

     Il est plus difficile de porter un jugement sur la troisième nouvelle — Walt et Emily — lorsque l'on ne connaît pas les poètes anglais mis en scène (Emily Dickinson, Walt Whitman et Allen Ginsberg), ou lorsque l'on n'est pas sensible à cette poésie. L'atmosphère est en outre très différente, beaucoup moins humoristique, plus onirique et poétique.

     La trilogie steampunk est un recueil incontournable pour les amateurs de ce genre si particulier qu'est le steampunk. On y atteint la quintessence du genre, avec une imagerie et une inventivité étonnantes, alliées à une dérision jubilatoire et à quelques entorses salutaires à la bienséance. Un délice !

Pascal PATOZ (lui écrire)
Première parution : 18/6/2000
nooSFere


Edition J'AI LU, Science-Fiction (1992 - 2001, 3ème série - dos violet/blanc) (2000)

     Qu'est-ce que le « steampunk »  ? C'est un sous-genre de la SF assez difficile à cerner. On tourne vaporeusement autour de l'Angleterre du XIXe siècle, et de développements technologiques du début de la révolution industrielle qui auraient pu se faire mais qui n'ont jamais été réalisés. Paul Di Filippo élargit un peu le champ, car deux des trois longues nouvelles réunies dans ce recueil se passent en Amérique, et il s'intéresse plus aux mentalités et aux idées (scientifiques, culturelles et sociales) de l'époque qu'aux inventions.
     La première nouvelle, Victoria, se déroule en 1838 à Londres. La jeune reine Victoria s'est éclipsée du palais de Buckingham quelques semaines avant son couronnement et se cache quelque part en ville. Pour sauver la monarchie, le Premier ministre demande à un jeune savant fou, Cosmo Cowperthwaite, de lui prêter comme remplaçante provisoire sa créature, un hybride qu'il a réalisé entre un triton et un être humain, qui est la sosie parfaite de la disparue, mais qui possède aussi une étrange séduction sexuelle...
     Dans Hottentots, vers 1848, le célèbre naturaliste suisse Louis Agassiz poursuit ses recherches au Massachusetts. Mais il se voit embarqué contre son gré dans une quête pour retrouver un puissant fétiche magique, fabriqué à partir du sexe de la « Vénus des Hottentots », qui a été volé par un maléfique sorcier africain. Un anarchiste polonais et un proto-nazi prussien sont aussi sur la même piste, et, même si c'est complètement anachronique, l'ombre d'un certain H. P. Lovecraft plane sur cette histoire.
     Emily et Walt est le récit d'une rencontre entre les deux plus grands poètes américains du XIXe siècle, aux caractères diamétralement opposés  : Emily Dickinson — timide, prude et neurasthénique — et Walt Whitman — robuste et exubérant (surtout sur le plan sexuel). Ensemble, ils vont entamer un voyage transdimensionnel au « Pays de l'Été », où ils vont retrouver leur petit-fils spirituel dans l'avenir, Allen Ginsberg.
     Trois histoires complètement rocambolesques, écrites avec un sens de l'humour délirant et parfois assez grivois. Mais peut-être le plus grand plaisir de ce livre est son côté ludique, à cause de la profusion des allusions et références scientifiques, littéraires et historiques de tous genres. Lesquels des personnages sont réels, et lesquels sont imaginaires  ? Faute d'un bagage culturel sérieux sur le XIXe siècle, il vaudrait peut-être mieux garder un dictionnaire de noms propres à portée de main. En tout cas, un livre fascinant et très, très amusant.

Tom CLEGG (lui écrire)
Première parution : 1/6/2000
dans Galaxies 17
Mise en ligne le : 26/10/2001


Edition J'AI LU, Science-Fiction (1992 - 2001, 3ème série - dos violet/blanc) (2000)

     Les temps modernes ont commencé bien plus tôt que nous le pensons. C'est en fin de compte le message du steampunk qui, en bricolant la technologie du XIXe siècle, nous rappelle que nous avons tendance à considérer comme primitives toutes les époques qui nous ont précédées. En poussant jusque dans leurs plus exotiques limites les techniques des deux siècles précédents, les auteurs du steampunk rendent justice aux savants des âges de la vapeur, de l'électricité et du fer — pour notre plus grand plaisir.

     La Trilogie steampunk représente ce que l'on a fait de mieux dans le genre : trois novellas dans lesquelles des scientifiques se livrent à des expériences aux conséquences plus qu'inattendues.
     Dans « Victoria », Cosmo Cowperthwait, inventeur malheureux d'un nouveau moyen de production d'énergie — au moyen d'uranium, ce qui a provoqué la mort de toute sa famille dans une gigantesque explosion... — s'est tourné vers la biologie. Le résultat ? Victoria, une salamandre à taille et forme humaine, qu'il vient de cacher dans un bordel londonien lorsqu'il reçoit la visite du premier ministre en personne. Pourquoi un tel personnage s'intéresse-t-il à un obscur savant ? Hé bien, parce que la jeune reine Victoria, dont le couronnement approche, a disparu, et qu'il a besoin de sa créature pour donner le change. S'ensuit une enquête qui mène le malheureux Cowperthwait et son valet dans les bas-fonds de Londres, jusqu'à l'école de jeunes filles d'une dame nommée Otto et à un duel avec un homme au nez d'argent ! Tout est réussi dans ce texte : des personnages plus excentriques les uns que les autres aux situations comiques ou grotesques, sans oublier les inventions de Cosmo.
     La deuxième novella n'a pas le rythme de la première. Le professeur Agassiz, fervent défenseur du créationnisme contre les théories de Darwin, y part à la recherche d'un étrange fétiche, et tombe sur quelques monstres tout droits sortis de Lovecraft. Le personnage et son racisme sont joyeusement caricaturés, mais l'intrigue est moins rondement menée que dans la première nouvelle.
     Le meilleur est pour la fin, avec « Walt et Emilie ». Walt, c'est Walt Whitman, le grand poète américain du XIXe siècle, d'abord vilipendé pour s'être fait le chantre de la sexualité dans ses poèmes, mais reconnu à la fin de sa vie. Emily, c'est Emily Dickinson, poétesse inconnue de son vivant, mais dont les quatrains incisifs, qui déchiffrent de manière quasi métaphysique émotions et sentiments, seront publiés après sa mort. Di Filippo fait se rencontrer la recluse d'Amherst, Massachussets, et le démocrate élégiaque à l'occasion d'une expérience menée par le frère d'Emily — qui vécut effectivement non loin du couple formé par lui et par sa meilleure amie. L'expérience en question vise à atteindre Summerland, c'est à dire l'au-delà, pour y rencontrer les morts du passé et du futur. Passons sur les détails de l'expérience — le voyage se fait dans un schooner et la machinerie est rechargée en courant électrique par des autruches ! — pour dire qu'ils finissent par rencontrer Allen Ginsberg, autre poète américain, mais de la beat generation cette fois.

     Avec ce merveilleux texte, Paul Di Filippo, nouvelliste émérite mais auteur hélas peu connu ici — des textes sont parus en leur temps dans Fiction, l'anthologie Mozart en verres miroirs, la revue Cyberdreams et, plus récemment, Galaxies et Bifrost — donne toute la mesure de son talent et prouve, s'il en était besoin, que le steampunk n'est pas que décoratif.
     En réunissant Walt Whitman, Emily Dickinson et Allen Ginsberg dans une aventure surnaturelle, il rend hommage à ce que la culture américaine peut produire de meilleur. Walt Whitman eut du mal à être lu parce qu'il défendait des idées démocrates et pensait qu'on trahissait les idéaux de la révolution. Allen Ginsberg, qui s'adresse à Whitman dans un de ses poèmes (A super-market in Califorma, Howl), critiqua les valeurs de la société américaine dans toute son œuvre. Emily Dickinson, recluse dans une petite ville du Massachussets, vécut à l'opposé de l'image de l'écrivain américain moderne, voyageur aux multiples métiers prêt à prendre la pose pour la postérité — et n'en produisit pas moins une œuvre dont la forme, comme le fond, sont d'une éclatante modernité. Les temps modernes ont vraiment commencé plus tôt qu'on ne le pense, y compris en ce qui concerne les idées.
     Tout cela est fait sans la moindre lourdeur, au contraire, avec humour et une capacité à inventer des machines et des situations cocasses qui ne peuvent que réjouir le cœur du lecteur de S-F qui s'empressera de poser ce livre sur les rayons de sa bibliothèque, en attendant la traduction de Ribofunk, le deuxième recueil de l'auteur.

Sylvie DENIS
Première parution : 1/7/2000
dans Bifrost 19
Mise en ligne le : 11/11/2003


Edition J'AI LU, Science-Fiction (1992 - 2001, 3ème série - dos violet/blanc) (2000)

     Trois nouvelles pour un courant.
     Le titre est affirmatif et claque au vent comme un manifeste !
     En 1986 paraissait Mozart en verres miroirs, l'anthologie fameuse de Bruce Sterling, qui intronisait publiquement le courant cyberpunk. Neuf ans après, l'un des participants à ce recueil, Paul Di Filippo, écrit La Trilogie Steampunk, qui se veut tout aussi promotionnel, comme la bible officielle du mouvement. Deux nouvelles et une novella. Significativement, la première s'intitule Victoria. Figure emblématique du steampunk, la jeune reine britannique disparaît un mois avant son couronnement. Pendant que les recherches s'activent, le Premier ministre a l'idée de la remplacer par un... triton, création frankensteinesque du professeur Cowperthwait. Le thème est original et fait démarrer le livre sur des chapeaux de roues ! Plus long, Des Hottentotes est plus remarquable encore. Avec un art consommé de l'évocation, Di Filippo nous plonge dans un autre univers, celui de l'Amérique blanche conservatrice du milieu du XIXe siècle. Le très raciste professeur Louis Agassiz se verra amené par un Sud-Africain nommé Jacob César et son épouse hottentote à poursuivre un sorcier détenteur d'un fétiche redoutable en forme de sexe féminin conservé dans un bocal ! Au fil d'un récit d'une grande intelligence, l'auteur nous amènera jusqu'à Marblehead où vivent les repoussants Miskatonics, peuple poisson, ainsi qu'un certain Howard Phillips... (Souvenons-nous que Di Filippo vit à Providence, Rhode Island !) Des Hottentotes est passionnant à lire, très bien écrit et surtout très amusant. Le sabir parlé par Jacob César, mi-français mi-allemand, est particulièrement savoureux. Et les amateurs de Lovecraft apprécieront les clins d'œil... Le troisième texte, Walt et Emily, nécessite une connaissance plus pointue de la littérature. On y retrouve en effet Walt Whitman et Emily Dickinson, deux grands noms de la poésie américaine. Ils se rencontrent, s'aiment et partent à la découverte de l'Au-delà, dans une quête spirite vers le monde des enfants non-nés. Le texte est beau et baigne dans un climat d'étrangeté onirique. Aux côtés de K.W.Jeter, J. Blaylock et P. McAuley, le steampunk s'est trouvé plus qu'un porte-parole : un nouveau Maître !

Bruno PEETERS
Première parution : 1/9/2000
dans Phenix 55
Mise en ligne le : 1/2/2004

Cité dans les pages thématiques suivantes
Steampunk

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